Sylvain Chareyron, Louis-Alexandre Erb et Yannick L’Horty, tous chercheurs à l’Université Gustave Eiffel ont réalisé, pour la toute première fois, au printemps dernier, une étude sur les éventuelles discriminations autour de l’accès aux Masters à l’université. Ils ont ciblé à travers un testing 19 universités, les responsables de formation de 607 Masters et leur ont envoyé près de 2000 courriels, rapporte France Inter. Les universitaires ont testé deux critères : celui du handicap et celui du patronyme maghrébin. Ils ont envoyé trois e-mails quasi identiques à ces responsables. Il s’agit de l’envoi de courriels de candidats fictifs maghrébins ou de personnes en situation de handicap contenant des demandes d’information sur les cursus et leurs modalités d’inscription.
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« Nous n’avons pas trouvé de différence de traitement significative pour les étudiants qui mentionnent un handicap moteur lourd. Par contre, les étudiants supposés d’origine maghrébine sont dans l’ensemble pénalisés par rapport aux étudiants supposés franco-français, car on leur répond moins souvent en leur indiquant la marche à suivre pour s’inscrire », détaille Yannick L’Horty. « Grâce à l’observation des données selon les filières et à un questionnaire que nous avons ensuite envoyé aux responsables, nous avons identifié plusieurs facteurs de risques. Plus un Master est attractif, et donc très sélectif, plus le risque est important. Il apparaît aussi que là où la sélection des dossiers est faite par des individus isolés et non dans le cadre d’un processus collectif, le risque de discriminer est plus important », ajoute-t-il. Le chercheur rencontre ce mardi des acteurs du monde universitaire ou impliqués dans la lutte contre les discriminations pour lancer un Observatoire National des Discriminations et de l’Égalité dans le Supérieur (ONDES).
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L’étude révèle que les candidats fictifs maghrébins (toutes filières confondues) ont 12 % moins de chance d’obtenir une réponse. A comparer au chiffre (25 %) sur le marché de travail, notamment les candidatures sur des offres d’emploi, ce chiffre est moins alarmant. S’agissant des Masters scientifiques, les candidats maghrébins ont 20 % moins de chances de recevoir une réponse, précise le rapport d’étude. « Lorsque les principes d’égalité et de diversité sont battus en brèche, bien sûr qu’on doit s’en préoccuper. On ne peut pas balayer ces résultats d’un revers de main. Il faut voir comment on peut peut-être se saisir de cet outil pour poursuivre la surveillance, et travailler sur les facteurs de risques identifiés à travers cette étude », a commenté Manuel Tunon de Lara, à la tête de France Universités, qui représente les présidents d’universités, cette étude, appelant à une prise de conscience.