Seule une femme accompagnée de son mari, de son frère ou de son père peut accéder aux hôtels dans le royaume. Sans quoi, elle voit opposer un refus catégorique. Les exemples sont légion. Sur sa page Twitter, une Marocaine a dénoncé cette pratique, le 13 novembre. « Les hôtels de Casablanca n’acceptent pas les filles seules avec une carte d’identité portant une adresse casablancaise », s’est-elle indignée. Alors qu’elle se dirigeait vers un établissement faisant partie d’une célèbre chaîne espagnole, elle s’est vu refuser l’accès. Motif invoqué : « la loi » : « Si vous êtes seule et non accompagnée de votre mari, frère ou papa, vous n’avez pas le droit de loger dans l’hôtel », lui aurait répondu l’hôtel, relate Middle East Eye.
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La réalisatrice Sonia Terrab, cofondatrice de Moroccan Outlaws (les hors-la-loi marocaines) dénonce « une pratique clairement arbitraire et totalement moyenâgeuse ». Son collectif a reçu plusieurs témoignages dont celui d’une femme qui s’est vu refuser l’accès à un hôtel de la capitale économique, après avoir réservé une chambre pour célébrer l’anniversaire d’une amie de nationalité française. « Pourtant, la chambre était déjà payée. Non remboursée. J’ai dû chercher un endroit où dormir. Terrible traitement. Je n’avais pas les mots », écrit-elle. Son amie française ne subira pas le même traitement. Elle a dormi à l’hôtel comme programmé. « Je me suis sentie humiliée dans mon propre pays […] On vous traite comme du bétail. Après ça, j’ai quitté le Maroc évidemment », poursuit-elle.
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« Certains hôteliers justifient leur refus par une circulaire du ministère de l’Intérieur, mais il n’y a jamais eu de circulaire interdisant à une femme de séjourner seule dans un hôtel », commente un ancien haut cadre du ministère du Tourisme. Selon lui, cette pratique relève de l’excès de zèle des hôteliers. « En effet, ce sont les hôteliers qui font de l’excès de zèle pour éviter les problèmes. Ils ont peur que la police, en voyant qu’une femme célibataire séjourne dans l’hôtel, fasse une enquête ou leur cause des problèmes. Les hôtels se mettent donc d’accord avec les autorités locales et décident par eux-mêmes d’appliquer ces mesures, alors que rien ne les y oblige légalement », confirme Sonia Terrab à Middle East Eye.
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Au Maroc, la femme et l’homme sont pourtant égaux devant la loi. D’ailleurs, l’article 19 de la Constitution marocaine dispose : « L’homme et la femme jouissent, à égalité, des droits et libertés à caractère civil, politique, économique, social, culturel et environnemental ». De plus, l’article 431-1 du Code pénal punit d’un mois à deux ans d’emprisonnement et d’une amende pouvant atteindre 50 000 DH (4 800 euros) toute discrimination « lorsqu’elle consiste à refuser la fourniture d’un bien ou d’un service ».