Appel urgent à l’abolition du mariage des mineurs au Maroc
La loi est un énorme obstacle à la lutte contre le mariage des mineurs au Maroc, selon une étude qui vient d’être réalisée par le Conseil National des Droits de l’Homme (CNDH).
Bien que la loi ait interdit les mariages coutumiers (ou dits “par fatiha”), la pratique est toujours en vogue dans la société marocaine, notamment dans les zones rurales. Des associations continuent de mener des campagnes de sensibilisation pour protéger les femmes et les enfants qui sont victimes de ces mariages devenus une véritable hydre de Lerne.
Au Maroc, les mariages par fatiha ont toujours pignon sur rue alors que le Code pénal punit la pratique. L’article 475 du Code pénal dispose que : “quiconque, sans violences, enlève ou détourne un mineur de moins de dix-huit ans […] est punie d’un à cinq ans d’emprisonnement”. Des adolescentes voire préadolescentes sont données en mariage à des hommes beaucoup plus âgés sans qu’elles aient le droit de refuser. Ce type de mariage est célébré sans la présence d’un adoul ou d’un représentant de l’État. « On décide de marier une enfant à un monsieur beaucoup plus vieux, et il suffit de ramener des témoins. Pas d’enquête, pas de consentement, rien », déplore Meriem Othmani, présidente de l’INSAF.
À lire : Maroc : nouvelle étude sur le mariage des mineurs
Par conséquent, ces mariages n’ont aucun fondement juridique. « Une union par fatiha ne rentre pas dans le cadre de la loi, on ne peut pas la considérer comme un mariage. Les articles de loi relatifs au mariage ne s’y appliquent absolument pas », explique à TelQuel Maha Jawhari, avocate spécialiste du droit de la famille. « Depuis la fin de la période de régularisation des mariages coutumiers, en 2019, les tribunaux n’acceptent plus de faire produire des effets juridiques aux mariages coutumiers », renchérit l’avocat et vice-président de l’INSAF, Mohamed Oulkhouir.
À lire : Le mariage des mineures, une autre forme de pédophilie légale
Autres conséquences de ces unions illégales : les femmes et les enfants ne jouissent d’aucun droit. « La femme, de fait, n’a aucun droit dans cette union. Elle ne peut même pas aller déposer plainte pour violences ! Quant aux enfants de cette union, s’il n’y a pas mariage légal, ils ne sont pas reconnus et n’auront pas de droits », explique Meriem Othmani. En clair, les enfants issus de ces unions ne pourront pas être inscrits à l’état civil. « Ces mariages sont particulièrement dangereux puisqu’ils privent en réalité de tout droit la femme et les enfants qui pourraient naître de cette union issue d’un cadre extra légal », confirme le vice-président de l’INSAF.
À lire : Maroc : les chiffres scandaleux des mariages des mineures
Les filles victimes de ces mariages illégaux sont également victimes de viol. « Une mineure mariée par la fatiha est sans contestation possible victime de viol si ce pseudo-mariage est consommé », affirme Mohamed Oulkhaouir. « Ce sont des questions très techniques, mais effectivement, on peut considérer qu’une mineure victime d’un mariage coutumier est aussi victime d’atteinte à la pudeur, puisque les relations sexuelles ne sont tolérées que dans le cadre du mariage légal », renchérit l’avocate Maha Jawhari.
Aller plus loin
La loi est un énorme obstacle à la lutte contre le mariage des mineurs au Maroc, selon une étude qui vient d’être réalisée par le Conseil National des Droits de l’Homme (CNDH).
Une circulaire du ministère de l’Intérieur aurait interdit aux femmes de séjourner dans un hôtel de leur ville de résidence. Interpellé sur la question par le député de l’Union...
L’ex-ministre du Développement social, de la solidarité et de la famille, Nouzha Skalli s’est insurgée contre le mariage des mineures. A l’en croire, il s’agit d’une pédophilie...
La femme marocaine seule est toujours interdite de séjour dans les hôtels de son pays. Malgré l’inexistence d’une loi, cette vieille pratique résiste au temps.
Ces articles devraient vous intéresser :