La présidence slovène en exercice à l’UE, la future présidence française, la Commission européenne, le Conseil des ministres de l’UE, les représentants des Etats membres : ils étaient tous là le 16 mai au centre de conférences Borschette pour la première session de négociation d’un statut avancé revendiqué par le Maroc dans ses relations avec l’Europe. La délégation marocaine s’est appliquée à leur expliquer que Rabat souhaite désormais booster sa coopération avec l’UE vers un nouveau statut privilégié qui soit à la mesure de la spécificité de ses relations avec l’Europe. Sur le plan politique, il est demandé qu’au-delà du dialogue formel, organisé dans le cadre de l’actuel accord, il puisse s’établir des concertations politiques plus profondes et plus régulières avec les instances communautaires. Il serait également souhaitable de faire participer les ministres marocains, sur une base ad hoc, aux réunions ministérielles européennes.
Fort de la participation d’un contingent marocain à l’opération militaire européenne Althea en Bosnie et de l’expertise acquise par les éléments marocains sur d’autres théâtres du globe, le Maroc réclame aussi la possibilité de participer à la gestion civile des crises dans le cadre de la PESD (Politique européenne de sécurité et de défense), notamment dans le domaine de la sécurité maritime. Une demande qui aurait été bien accueillie par la partie européenne.
Coopérant déjà dans le domaine de la lutte contre le terrorisme, Rabat souhaite aussi développer une coopération plus approfondie dans les domaines judiciaire et des affaires intérieures. Sur le volet parlementaire, la partie marocaine voudrait développer des « canaux de contact approfondis entre les Parlements respectifs.
Dans le domaine économique, le Maroc souhaite s’arrimer plus étroitement au bloc européen. Selon une approche qui prend en considération les priorités définies par le Maroc (plans Azur et Emergence, plan Vert, etc.), Rabat plaide pour une coopération tous azimuts dans un large éventail de domaines porteurs de croissance tels que le tourisme, les transports, les infrastructures, l’agriculture, les télécoms, les connexions énergétiques et les technologies de l’information.
Pour accompagner toutes ces opérations, le Maroc a, bien sûr, expliqué que cela a un coût et qu’une aide communautaire accrue serait la bienvenue. Une sollicitation à laquelle la partie européenne a bien vite répondu que toutes les actions de l’UE sont actuellement encadrées dans le budget communautaire 2007-2013, que les marges de manœuvre sont très difficiles et que le Maroc serait bien inspiré d’en tenir compte.
Plus de mobilité de personnes
Cela étant, la partie marocaine estime qu’à l’intérieur des perspectives financières 2007-2013, il y aurait toujours des possibilités d’augmenter les enveloppes nationales notamment, en puisant dans les fonds thématiques non encore utilisés et qui, s’ils ne sont pas conséquents, additionnés les uns aux autres, constitueraient des sommes non négligeables.
La coopération dans le domaine social et culturel a été largement abordée lors de cette première session de négociation. En particulier la question de la circulation des personnes. Le Maroc a demandé à ce que, notamment les étudiants, les chercheurs, les hommes d’affaires mais aussi les jeunes Marocains, puissent circuler librement dans les pays membres de l’UE.
La partie marocaine a mis l’accent sur la nécessité d’une coopération accrue dans les domaines clés que sont l’emploi des jeunes et l’éducation. Car, comme on le sait, le Maroc qui n’a ni pétrole ni gaz, ne peut compter que sur ses seules ressources humaines. D’où l’appel lancé à l’UE pour épauler sérieusement le pays à réussir la réforme de son système éducatif, développer des passerelles entre les établissements marocains et européens, faciliter la reconnaissance réciproque des diplômes et élargir davantage le système d’échange universitaire européen Erasmus aux étudiants marocains.
Réalisme
Pour présenter sa shopping list, la partie marocaine a choisi la manière douce en soumettant un projet de « feuille de route » évolutive qui fixe une série d’étapes à franchir. Conscients des réalités politiques et économiques qui préoccupent, pour le moment, le partenaire européen, les Marocains ont donc été plutôt sages dans leurs demandes. « Nous avons fait des propositions réalistes et cohérentes qui ne peuvent pas être refusées, a confié à L’Economiste Menouar Alem, ambassadeur du Maroc auprès de l’UE. Le diplomate marocain se dit « confiant et même optimiste dans le timing de la feuille de route présentée par le Maroc. « Il nous faut maintenant capitaliser sur cette première bonne impression dont nous avons bénéficié à l’issue de cette première session de négociation, a-t-il ajouté. Une première réaction de l’UE est attendue pour fin juin 2008. D’ici là, les négociateurs prépareront une deuxième session prévue le 18 juillet, toujours à Bruxelles.
Source : L’Economiste - Aziz Ben Marzouq