Maroc : l’enseignement en français au cœur d’une nouvelle polémique

24 mars 2024 - 08h00 - Maroc - Ecrit par : S.A

Des acteurs politiques affichent leur opposition aux accords de prêt d’un montant de 130 millions d’euros et d’une subvention de 4,7 millions d’euros signés par le ministre délégué chargé du Budget et la Directrice de l’Agence française de Développement à Rabat pour financer le renforcement de l’enseignement en français dans le système éducatif marocain.

Ahmed Abbadi, parlementaire du groupe du progrès et du socialisme à la Chambre des représentants, a contacté le ministre de l’Éducation nationale, de l’Enseignement primaire et du Sport pour l’alerter sur la nécessité de mettre fin à l’hésitation concernant la question des langues d’enseignement et l’enseignement des langues. Selon ses explications, les deux accords signés le 20 mars – Journée mondiale de la langue française – qui consacrent l’enseignement en français, invitent « à s’interroger sur ce que le secteur de l’Éducation nationale et de l’Enseignement primaire et du Sport avait révélé auparavant concernant l’orientation vers l’adoption de l’anglais dans l’enseignement des matières scientifiques à tous les niveaux secondaires d’ici 2030 ». Ces accords, fait observer l’élu, sont en contradiction avec la Charte nationale de l’éducation et de la formation. Ils contredisent également le concept de l’alternance linguistique dans le projet de loi-cadre relatif au système d’éducation et de formation et à la recherche scientifique, qui stipule que l’alternance linguistique est une approche pédagogique et un choix éducatif investissant dans l’enseignement bilingue ou multilingue, visant à diversifier les langues d’enseignement.

À lire :Le français indésirable même chez des ministres marocains (vidéo)

Pour Abbadi, le financement récemment reçu par le gouvernement marocain pour l’ancrage de la langue française dans l’éducation au Maroc « indique clairement la problématique de l’hésitation linguistique et l’incapacité de trancher pratiquement dans le choix adopté, ainsi que le recul par rapport aux engagements précédents de renforcer l’enseignement en anglais à différents niveaux préparatoires et secondaires ». Il a en outre demandé au ministre de l’Éducation nationale de révéler les objectifs de ces deux accords. Il a également interpellé Chakib Benmoussa sur les mesures et les procédures que son département prendrait pour mettre en œuvre les dispositions de la loi-cadre relative au système d’éducation et de formation et à la recherche scientifique liées à l’alternance linguistique et à sa diversité.

À lire :Maroc : l’anglais éclipse de plus en plus le français

« Nous devons accorder une importance particulière à la langue anglaise, car elle joue le rôle de langue universelle dans les domaines des sciences, de la technologie et des relations internationales, tandis que l’apprentissage des autres langues étrangères doit se faire dans la mesure où elles représentent pour nous une ouverture sur d’autres cultures ou pour des raisons pratiques économiques ou diplomatiques », a fortement recommandé Abdesselam Cheddadi, chercheur en linguistique, à travers un document de recherche présenté au Conseil supérieur de l’éducation. Selon lui, le français doit être traité avec réalisme et prudence. « Le français représente un atout précieux en raison de nos relations passées et présentes avec la France, mais il constitue également un danger si nous le laissons freiner notre projet de développer nos langues nationales », a ajouté le chercheur en linguistique.

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : France - Rabat - Prêt - Education - Agence française de développement

Aller plus loin

Le français indésirable même chez des ministres marocains (vidéo)

La crise entre le Maroc et la France semble avoir atteint le volet linguistique. Un ministre marocain a même refusé de s’exprimer en français.

Des Marocains appellent à « se débarrasser » du français dans les écoles

Depuis quelques semaines, de nombreux internautes marocains ont lancé une campagne sur les réseaux sociaux appelant à « se débarrasser » de la langue française dans la politique...

Maroc : l’anglais éclipse de plus en plus le français

La grande majorité des Marocains souhaitent que l’anglais remplace le français à l’école. C’est ce qui ressort d’un sondage réalisé par le Centre marocain de citoyenneté.

Maroc : l’enseignement de l’anglais au collège généralisé

L’enseignement de l’anglais sera généralisé dans les collèges au Maroc dès la rentrée scolaire 2023-2024, a annoncé dans une note Chakib Benmoussa, le ministre de l’Éducation...

Ces articles devraient vous intéresser :

Maroc : cette violence qui interpelle

La parlementaire Nadia Bouzendoufa, du Parti de l’Authenticité et de la Modernité, interpelle Mohamed Saad Berrada, ministre de l’Éducation nationale sur sa stratégie visant à réviser la circulaire ministérielle n° 14/867 et à adopter des mesures...

Quand la rentrée scolaire pousse les Marocains à l’endettement

L’approche de la rentrée scolaire et la fin des vacances d’été riment souvent avec le recours aux prêts bancaires devant permettre aux parents marocains de subvenir aux besoins de leurs enfants. Et, les banques se livrent une concurrence très forte.

Écoles privées au Maroc : hausse des frais et colère des parents

Des écoles privées ont décidé d’augmenter les frais de scolarité à la prochaine rentrée au grand dam des parents d’élèves. Préoccupée, une députée du Parti du Progrès et du Socialisme (PPS) appelle le gouvernement d’Aziz Akhannouch à agir pour empêcher...

Pénurie de médecins au Maroc : Le système de santé à bout de souffle

La pénurie de médecins persiste au Maroc. Par ailleurs, la réduction de la durée de formation en médecine suscite actuellement une vive protestation de la part des étudiants.

Des conditions strictes pour enseigner dans le privé au Maroc

Le ministère de l’Éducation nationale a récemment autorisé les enseignants du public à donner des cours supplémentaires dans le privé, sous certaines conditions. Pour arrondir leurs fins de mois, ces professeurs devront obtenir une autorisation...

Écoles françaises au Maroc : polémique sur l’homosexualité

Chakib Benmoussa, ministre de l’Éducation nationale, de l’Enseignement primaire et des Sports, s’est exprimé sur l’adoption par des institutions éducatives étrangères au Maroc de programmes promouvant l’homosexualité.

La chanteuse Mariem Hussein au cœur d’une nouvelle polémique

Des internautes marocains se sont indignés des propos de la chanteuse et actrice marocaine Mariem Hussein sur l’éducation sexuelle.

Écoles privées au Maroc : mauvaise nouvelle pour les parents

Mauvaise nouvelle pour des parents d’élèves au Maroc. Des écoles privées prévoient d’augmenter encore leurs frais de scolarité à la rentrée prochaine.

Le FMI va accorder un important prêt au Maroc

Le Fonds monétaire international (FMI) s’apprête à débloquer, à partir du nouveau fonds fiduciaire pour la résilience et la durabilité, un énorme prêt au Maroc, afin de renforcer la résistance du pays aux catastrophes liées au climat.

Maroc : constat inquiétant pour les élèves

L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a publié les résultats du Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA) pour 2022, révélant des difficultés majeures dans l’apprentissage au sein de l’école...