Au Maroc, la mère divorcée, qui obtient généralement la garde de l’enfant, n’en a pas la tutelle qui revient de droit au père. Les défenseurs des droits des femmes appellent à une réforme du Code de la famille pour corriger ce qu’ils qualifient...
Peu d’observateurs et d’analystes politiques ont relevé le recul qu’a connu la représentation politique des femmes au niveau de l’instance législative. Pour ceux qui aiment les chiffres, commençons par les rappeler.
Avancée en 2002, recul en 2007
La précédente Chambre des représentants comportait 35 députées, elle n’en comprend plus que 34, sur un ensemble de 325 députés. En termes de pourcentage de représentation féminine, on est passé de 10,77% qu’on arrondissait volontiers à 10,8% dans la précédente législature, à 10,46% à l’actuelle législature. En fait l’accès en 2002 des 35 femmes à la Chambre des représentants avec un taux de 10,8% a constitué une avancée importante saluée aussi bien au niveau international que national par une belle unanimité.
Le mouvement pour les droits des femmes avait toutes les raisons d’afficher sa satisfaction, car on était passé de 2 députées et un taux de 0,66% avant 2002 à 35 députées et un taux de 10,8% ! Dans son classement international en matière de représentation politique des femmes, le Maroc était alors passé du dernier rang, au 72e rang dans le monde et en deuxième position parmi les pays arabes juste après la Tunisie qui trônait alors en tête des pays arabes avec 11,5% de femmes dans son parlement. Donc, en 2002, nous étions en plein progrès, et tous les espoirs étaient permis de voir la participation des femmes à la vie politique se renforcer.
Dans un monde en marche vers l’égalité : qui n’avance pas recule !
Qu’en est-il en 2007 ? Les chiffres comparatifs parlent d’eux-mêmes :
Avec 34 députées sur 325, le Maroc n’ayant plus que 10,46% de femmes au Parlement, recule à la 94e place au monde et n’occupe plus que le 7e rang parmi les pays arabes après l’Irak (25,5%), la Tunisie (22,5%), les Emirats arabes unis (22,5%), le Soudan (18,1%), la Mauritanie (17,9%) et la Syrie (12%)*.
S’il existe actuellement un déséquilibre évident dans le monde en matière d’accès des femmes dans les parlements puisque le pourcentage moyen des femmes ne dépasse pas 17,5%, on voit clairement que le Maroc n’atteint même pas cette moyenne. Il est même loin de la moyenne de représentation des femmes dans les parlements africains qui est de 17,2% !
Ces éléments montrent que de nombreux pays, y compris des pays arabes comme la république sœur et voisine de Mauritanie, adoptent des mesures volontaristes en faveur de la représentation politique des femmes. De nombreux pays marchent dans le sens de l’Histoire au moment où notre pays régresse !
Quel est le profil des femmes élues ?
La question du nombre ne doit pas nous faire occulter la question du profil des femmes élues. Il n’est nullement question dans cet article d’égratigner en quoi que ce soit les femmes qui ont été élues sur les listes nationales des différents partis.
Mais il y a lieu de dénoncer la façon triviale dont se sont comportés la plupart des partis, y compris ceux d’entre eux qui appartiennent au camp démocratique, en éliminant les femmes politiques et les militantes dans la plupart des cas, au profit de femmes inexpérimentées et nouvelles venues dans le monde de la politique.
Dans plusieurs partis, les femmes députées sortantes ou membres des bureaux politiques de leurs partis, ou encore les militantes expérimentées et ayant un parcours politique ont été purement et simplement mises sur la touche, par des dirigeants eux-mêmes en place depuis des lustres !
Ainsi, on signifie aux militantes que rien ne sert pour elles de lutter et de militer, car lorsqu’il faudra choisir des profils pour assumer la responsabilité publique, ce n’est pas à elles qu’on fera appel mais à des novices, sans expérience politique, voire extérieures au parti.
La question féminine, une contre-performance de la majorité sortante !
Ainsi en 2007, la représentation des femmes au Parlement a été affaiblie au moment où leurs droits acquis grâce à leurs luttes sont menacés par un renforcement des forces les plus conservatrices à la Chambre des représentants. Cette contre-performance du gouvernement de Driss Jettou et de la majorité sortante est due à l’absence de vision en matière d’amélioration de la représentation politique des femmes. Face aux enjeux majeurs de bonne gouvernance et de développement liés à la promotion des femmes aux postes de responsabilité, le Maroc a ainsi failli à ses engagements à l’égard de la communauté internationale et notamment à la réalisation des objectifs du millénaire pour le développement (objectif n° 3 : promouvoir l’égalité des sexes et donner du pouvoir aux femmes).
L’absence de stratégie en la matière des gouvernements précédents s’est traduite en 2003 lors des élections municipales par un taux catastrophique de représentation des femmes dans les communes (0,58%), ce qui a valu aux partis politiques une interpellation de SM le Roi Mohammed VI du haut de la tribune parlementaire lors de la séance d’ouverture de la deuxième année de la précédente législature en octobre 2003. Toujours en l’absence de concertation avec les femmes et parce qu’aucune stratégie n’a été mise en place pour les législatives 2007, si ce n’est une action isolée de sensibilisation sur la participation des femmes, aucun progrès n’a été accompli au contraire, on a assisté à une régression.
Trop d’interrogations
Aujourd’hui, nous sommes à la veille de la constitution d’un nouveau gouvernement. Abbas El Fassi, Premier ministre désigné, est en train de mener des concertations avec les chefs de partis, exclusivement des hommes. Les voix des femmes seront-elles entendues ?
Certes, le nouveau Premier ministre s’est déjà prononcé, en application des directives royales, sur la nécessité d’avoir une représentation féminine accrue au gouvernement, mais les femmes et surtout les militantes politiques sont confrontées à bien des interrogations.
• Quelle sera la place de la question féminine et de l’agenda de l’égalité dans le prochain gouvernement ?
• Y aura-t-il enfin une instance nationale supérieure, un ministère chargé de la question de l’égalité au moment où on sait que ce sont les femmes qui souffrent le plus du déficit social et des disparités en matière d’éducation, de santé, d’accès aux ressources ou à la couverture sociale d’une façon générale. Cette question est majeure, car c’est bien à cause de ces déficits que le Maroc reste malheureusement classé 123e en 2006 sur l’échelle de l’indice de développement humain du Pnud, malgré tous les efforts louables déployés par notre pays en matière sociale et notamment dans le cadre de l’INDH.
• Quel sera le nombre de femmes titulaires de portefeuilles dans le prochain gouvernement ?
• Les partis politiques vont-ils cibler la compétence dans le choix des profils proposés aussi bien pour les hommes que pour les femmes ?
• Quels postes seront confiés à ces futures femmes ministres ? S’agira-t-il de simples portefeuilles d’appoint ou de ministères stratégiques pour le développement humain ?
De la réponse à ces questions dépend en partie le succès du prochain gouvernement et sa capacité à affronter les deux principaux défis que sont la question sociale et la lutte contre la corruption. Que ce soit dans l’une ou dans l’autre de ces questions les femmes disposent d’atouts et de compétences reconnues. A notre pays de bien vouloir les utiliser !
L’Economiste - Nouzha Skalli, députée à la Chambre des représentants
Ces articles devraient vous intéresser :