France : Pour les élèves, un Français ne peut être que blanc

5 avril 2007 - 00h00 - France - Ecrit par : L.A

Très vite, les élèves ont su que leur prof d’histoire avait eu une petite fille. Ils lui ont alors demandé des photos. Sur l’une d’elles, on voit le petit cousin penché sur le berceau. « Mais, monsieur, c’est pas un renoi, lui ? », s’est exclamé un élève.

Guillaume Delmas, qui confiait dans Libération du 6 mars sa passion d’exercer au collège Jean-Vilar de La Courneuve, en Seine-Saint-Denis, a alors expliqué que le petit était en effet métis, né de mère française et de père zaïrois. « Pour eux, qui sont en quasi- totalité d’origine étrangère, un Français ne peut être que blanc, non musulman, et habitant hors des cités. Un prof peut avoir une petite fille blanche, mais un neveu de couleur, ça ne marche pas. »

Depuis les propos de Nicolas Sarkozy, proposant de l’inclure dans « un ministère de l’Immigration », l’identité nationale est devenue un thème de campagne. Et, dans son collège Ambition Réussite, label réservé aux établissements les plus difficiles, Guillaume Delmas est bien placé pour mesurer le caractère sensible du sujet. A deux reprises, il a l’occasion de l’aborder en classe. En quatrième, dans le cadre du cours sur la Révolution française, il étudie l’origine historique des symboles de la République. « Ça ne pose guère de problème. » Les choses se corsent lorsque, en cours d’éducation civique en troisième, on aborde les principes qui régissent la Constitution et la citoyenneté. « Ils ont un mal fou à se sentir citoyens français. Très vite, ils disent : "Je suis marocain" ou "Je suis algérien", alors qu’ils sont bien français, car nés en France ou de parents naturalisés français. Mais ils ont intégré le discours du rejet et du racisme. J’avoue que, lorsque je suis arrivé dans ce collège, je n’imaginais pas cela. Je croyais que ces élèves voudraient se battre pour voir reconnu leur statut de Français, avec les devoirs et les droits qui vont avec. »

Pour expliquer « l’échec total du discours généreux de l’intégration à la Française », il renvoie aux politiques menées, particulièrement ces cinq dernières années où Nicolas Sarkozy était ministre de l’Intérieur. « Lorsque nous évoquons ce que se signifie dans les faits l’égalité, les élèves parlent de discriminations, de leurs cités ghettos, des contrôles de police au faciès. Ils ne se sentent pas égaux en droits. D’où l’idée qu’un citoyen français, ça ne peut être que blanc. »

Militant au Snes, le principal syndicat du secondaire, et sympathisant socialiste, il s’était résolu à voter Ségolène Royal le 22 avril, malgré les bourdes de la candidate à l’égard des enseignants. Aujourd’hui, il est plus convaincu. « Lorsqu’elle est venue ici, elle a dit que les jeunes de banlieue n’étaient pas le problème, mais bien une partie de la solution. A l’exact opposé de la politique communautariste, ethnique et sécuritaire actuelle. »

Libération.fr - Véronique Soule

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : France - Intégration - Education

Ces articles devraient vous intéresser :

Maroc : Vent debout contre le français à l’école

Au Maroc, un regroupement d’enseignants, d’étudiants et d’élèves s’oppose à l’enseignement des matières scientifiques en français dans les écoles publiques, dénonçant une violation de la Constitution et des textes régissant le secteur de l’éducation.

Maroc : une école mise en vente avec ses élèves ?

Au Maroc, un agent immobilier se retrouve malgré lui au cœur d’une polémique après avoir publié une annonce de vente d’une école privée en incluant les élèves.

Des conditions strictes pour enseigner dans le privé au Maroc

Le ministère de l’Éducation nationale a récemment autorisé les enseignants du public à donner des cours supplémentaires dans le privé, sous certaines conditions. Pour arrondir leurs fins de mois, ces professeurs devront obtenir une autorisation...

Au Maroc, la santé des élèves menacée

Au Maroc, des associations de protection des consommateurs ont lancé un appel aux autorités compétentes afin qu’elles renforcent les contrôles en ce qui concerne la qualité des fournitures scolaires en cette période de reprise des classes. Objectif,...

Maîtrise de l’anglais : le Maroc à la traîne

Alors que les Marocains délaissent de plus en plus le français pour l’anglais, le Maroc est encore à la traîne quant à la maitrise de langue de Shakespeare.

Pénurie de médecins au Maroc : Le système de santé à bout de souffle

La pénurie de médecins persiste au Maroc. Par ailleurs, la réduction de la durée de formation en médecine suscite actuellement une vive protestation de la part des étudiants.

Maroc : indignation après l’assassinat d’une enseignante par un élève

Au Maroc, la Fédération nationale de l’enseignement (FNE, affiliée à l’Union marocaine du travail) appelle à une mobilisation forte et immédiate après l’agression violente d’une enseignante par un élève ayant entraîné la mort de celle-ci.

Maroc : des notes trop gonflées dans les écoles privées ?

Au Maroc, le phénomène des « notes gonflées » continue de sévir dans des écoles privées. C’est du moins le constat fait suite à la fuite de certains relevés de note sur les réseaux sociaux après la publication des résultats du BAC 2024.

La chanteuse Mariem Hussein au cœur d’une nouvelle polémique

Des internautes marocains se sont indignés des propos de la chanteuse et actrice marocaine Mariem Hussein sur l’éducation sexuelle.

Quand la rentrée scolaire pousse les Marocains à l’endettement

L’approche de la rentrée scolaire et la fin des vacances d’été riment souvent avec le recours aux prêts bancaires devant permettre aux parents marocains de subvenir aux besoins de leurs enfants. Et, les banques se livrent une concurrence très forte.