De nombreux artistes marocains se tournent vers la plateforme YouTube qui est devenu un moyen pour eux de gagner de l’argent et d’éviter la marginalisation.
La vieille ville marocaine s’apprête à accueillir la 13e édition du Festival des musiques sacrées du monde. Une semaine de rencontres durant laquelle la tolérance prospère.
L’organisation islamique pour l’éducation, les sciences et la culture (Isesco) a désigné cette année Fès « Capitale de la culture islamique ». Un devoir supplémentaire de tolérance et de lumière pour la vieille cité marocaine, qui n’a pas de mal à l’honorer, en dépit de l’intégrisme rampant qui fait son lit dans les quartiers les plus déshérités du royaume chérifien. Son université, l’une des plus anciennes du monde, la Qaraouiyine, accueille actuellement, outre les étudiants nationaux, 1 200 jeunes provenant de 33 pays d’Afrique. Une centaine d’Américains résident dans la médina pour des séjours de six semaines afin d’apprendre la langue. Quant aux Européens, et spécialement les Français, ils sont maintenant nombreux à avoir acheté un riad et à y vivre.
En janvier, la Qaraouiyine organisait un colloque international consacré au dialogue entre les cultures et les religions. Suivaient un récital en amazigh, la langue berbère longtemps étouffée, de la danse contemporaine, du jazz dans les riads, un Festival national de musique arabo-andalouse, un autre qui vient de naître sur les cultures soufies… Côté patrimoine, la médina, classée par l’Unesco, qui reçoit déjà l’aide de la Banque mondiale, est soutenue par l’université de Harvard et le programme Aga Khan, notamment pour le réaménagement de l’ancien méchouar, cette place d’armes dont la monumentale et splendide porte sert de fond de scène lors du Festival annuel des musiques sacrées du monde.
Des débats préalables aux concerts
La 13e édition de cette manifestation s’ouvrira vendredi avec Barbara Hendricks. La soprano, accompagnée par l’Ensemble de Drottningholm (Suède), a choisi Haendel et Pergolèse. Du baroque dans un haut lieu de l’islam ? Sur place, cela n’étonne personne. L’année dernière, William Christie et ses Arts florissants avaient joué Rameau, Mozart, Mondonville et Rigel. Surtout, ici, toutes les formes spirituelles sont les bienvenues. Une autorité, Chérif Khaznadar, le fondateur de la Maison des cultures du monde à Paris, a bâti la programmation 2007. Il n’a pas oublié le 800e anniversaire de la naissance du Jalaleddine Roumi. Les textes de ce grand poète mystique où l’amour de Dieu va de pair avec un salutaire humanisme jalonneront les soirées fassies jusqu’au 4 juin. Ils seront dits en turc, avec une cérémonie de confréries Mawlawi et Qadiri d’Istanbul ; en persan, avec la chanteuse Parissa et l’ensemble Dastan ; en arabe, dans une création de la chanteuse Waed Bouhassoun et en ourdou, avec les maîtres qawalis du Pakistan.
Dans un autre genre, Chérif Khaznadar fait venir son ami Bartabas et son cheval Le Caravage. La belle complicité de l’homme et de l’animal s’épanouira au lever du soleil, dans les carrières des Mérinides, au son de la flûte ottomane de Kudsi Erguner et de la voix de Nezih Uzel. Pareillement, la Béninoise Angélique Kidjo, la griotte mauritanienne Aïcha Mint Chighaly, le « zoulou blanc » Johnny Clegg et le London Community Gospel Choir s’emploieront à étoffer une diversité fort utile. En effet, plusieurs matinées de débats préalables aux concerts sont nées sur ce socle. Elles réunissent des artistes, intellectuels et politiques du monde entier qui tentent d’œuvrer à la résolution des crises actuelles. Cette année, Jacques Attali ( La Confrérie des éveillés , Fayard, 2004, et Une brève histoire de l’avenir , Fayard, 2006) discutera avec Michael Barry, coordinateur des missions afghanes de Médecins du monde et directeur du département d’art islamique au MoMA de New York, Dominique Baudis, pré sident de l’Institut du monde arabe de Paris, l’historien d’art Jean Clair ou encore Tarek Mitri, le ministre de la Culture et ministre des Affaires étrangères par intérim au Liban. On écoutera aussi le grand rabbin du Consistoire central de France ou encore l’astrophysicien Trinh Xuan Thuan. Jacques Chirac, qui lancera à l’automne sa Fondation pour le développement durable et le dialogue des cultures, est attendu.
Le Figaro - Éric Biétry-Rivierre
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