L’ambition d’un rapprochement à travers ce qui est communément appelé « un acquis communautaire » suppose que le Maroc honore d’abord un certain nombre d’engagements et de directives de l’UE.
Un socle commun de références harmonisées qui définit l’ensemble des réglementations à respecter. « Il n’y a pas de raison qu’un consommateur marocain ait moins d’exigences que l’européen en termes de qualité et de traçabilité des produits », souligne Jérôme Cassiers, conseiller aux affaires politiques et au commerce auprès de la délégation de la Commission européenne à Rabat.
Pour y arriver, il va falloir mettre à niveau, non seulement la législation, mais aussi les instances, organismes administratifs, laboratoires, normes… L’étape actuelle consiste à mener des négociations sur deux principaux secteurs : l’agriculture et les services. « Jusque-là, des avancées ont été enregistrées dans l’étape des négociations », ajoute Cassiers. L’avantage du Maroc, poursuit-il, c’est qu’il dispose de par son histoire d’un système très élaboré et assez proche du modèle français.
Série limitée
Sur le volet agricole, les négociations en cours ont pour objectif d’arriver à une ouverture progressive et asymétrique sur l’ensemble à l’exception de certains produits sensibles. Et par produit sensible, l’on entend, côté marocain, le blé (céréales), certains produits laitiers, les viandes et le sucre. L’UE a enregistré une sensibilité du Maroc à ouvrir ses frontières. Côté UE, l’on parle d’une série limitée notamment les agrumes, légumes, fraises, tomates… Les produits agricoles seront toutefois soumis aux quotas tarifaires. Autrement, dès que l’on dépasse les quotas convenus, l’on paie le tarif sur le surplus des tonnages.
L’autre volet important en négociation porte sur les services. Le 27 février, les deux partenaires ont procédé à l’échange des offres respectives. De l’analyse de ces offres, seront déclinés et débattus les secteurs porteurs pour plus de convergence. L’enjeu est d’aller du tarifaire vers le réglementaire dans un marché intégré de commerce et services.
Au-delà du volet économique et du marché communautaire, l’ambition du statut avancé est de ratisser le plus large possible par une coordination plus élargie dans plusieurs domaines (politique, migrations, santé, éducation, justice…). Ce qui suppose une mise à niveau tous azimuts côté marocain.
Le rapprochement avec l’UE ne s’arrête pas au commerce, les recommandations vont aussi vers le renforcement des droits de l’homme avec l’appui d’une stratégie dédiée aux droits humains, à la gouvernance, la justice. C’est un chantier qui se base sur un acquis de réformes sociétales, économiques et politiques.
En même temps, le Maroc reste souverain d’engager les décisions qui lui conviennent ainsi que le rythme et les dates jugées opportunes, précise Cassiers.
En plus des biens et services, la réflexion sur le mouvement de personnes est en cours. La facilitation de la délivrance des visas est aussi au programme de l’UE pour favoriser les déplacements des fournisseurs et opérateurs économiques. Cet aspect sera traité pour une approche migratoire globale en vue de lutter contre l’immigration clandestine, favoriser la migration légale et le codéveloppement.
Côté financements, le Maroc reste à ce jour le 1er bénéficiaire de programmes d’appui communautaires, aides et dons européens, à l’exception de la Palestine qui a un statut particulier. En dépit de la conjoncture internationale, les fonds d’appui n’ont pas été révisés à la baisse. L’espoir est que la sortie de la crise ait lieu avant 2011, date prévue pour la 2e vague d’appui (2011-2013). L’an dernier, l’UE a engagé 228 millions d’euros. Le programme de soutien financier de l’UE s’élève à 654 millions d’euros pour la période 2007-2010. Les packages de fonds d’aide vont jusqu’à 2013. Ils visent notamment l’appui de la gouvernance, l’informatisation, la santé, l’éducation-alphabétisation, la justice, le programme villes sans bidonvilles ou encore l’appui aux associations professionnelles. En contrepartie, le Maroc s’engage à mener un certain nombre de réformes avec un calendrier de résultats précis. Ce qui explique, jusque-là, des déblocages par tranche.
Bémol
Unr fois par an, l’UE publie un rapport sur la situation économique et sociale au Maroc. Une sorte de baromètre pour apprécier le degré d’implication et d’harmonisation des procédures. Parmi les aspects récurrents sur lesquels l’UE reste intransigeante, la situation des droits de l’homme, la gouvernance, le climat des affaires et de l’investissement… Les précédents rapports sont très critiques, voire accablants surtout envers le système judiciaire, la corruption, la santé, l’éducation. La liberté d’expression est aussi pointée du doigt avec un code de la presse qui prévoit, notamment, des sanctions pénales.
Source : L’Economiste - A. R.