Après la tomate, le poivron. Le Maroc confirme de plus en plus sa place d’exportateur de poivron, notamment vers l’Europe, avec une forte augmentation de 45 % des exportations ces dernières années.
Les serres de la région de Huelva, en Andalousie, où poussent chaque année des tonnes de fraises, sont au bord de l’explosion. La récolte ne fait que commencer, mais ce verger de l’Europe fait face à une arrivée massive d’immigrés cherchant à se faire embaucher pour la saison.
Alors que l’année dernière, à cause du manque de main-d’oeuvre, les agriculteurs avaient perdu 15 000 tonnes de fraises, soit 9 millions d’euros, cette saison ils se retrouvent avec trop de petites mains. A l’origine de cette inadéquation, un malentendu entre le ministère du Travail et le gouvernement autonome d’Andalousie. Le 21 décembre 2001, les autorités nationales et régionales avaient signé un accord pour fixer le nombre d’immigrés à régulariser le temps de la récolte.
Les deux parties étaient tombées d’accord sur l’embauche de 3 500 travailleurs. Mais le gouvernement central relevait à 7 000 le nombre de travailleurs. Résultat : quelque 5 000 personnes en règle pour travailler dans la région se retrouvent sans emploi. Cette situation s’est encore aggravée depuis l’arrivée mi-mars de 6 800 travailleurs de l’Est.
Des dizaines d’agriculteurs espagnols ont fait le voyage cet hiver en Roumanie et en Pologne pour aller chercher eux-mêmes de la main-d’oeuvre : 5 800 Polonais et 1 000 Roumains ont été embauchés, alors que 7 000 immigrés marocains étaient venus spécialement pour la récolte. Payés 29,30 € par jour, les travailleurs de l’Est, en majorité des femmes, reçoivent un salaire plus ou moins égal à celui des Marocains, mais vivent dans de bien meilleures conditions.
Venus en cars, les premiers sont logés dans des foyers spécialement construits, alors que les Marocains occupent des semi-bidonvilles sans eau courante, plantés aux alentours des serres. Ces inégalités de traitement irritent les travailleurs musulmans qui cueillent les fraises, une tâche qui était dévolue aux Portugais depuis une dizaine d’années.
Pour Kamal, un des représentants de l’Association d’aide aux travailleurs immigrés marocains (Atime), les Espagnols cherchent à évincer les Marocains : « La situation est très tendue car nous sentons un racisme de plus en plus radical envers notre communauté. » Du côté des agriculteurs, on invoque la crise diplomatique entre Madrid et Rabat pour expliquer ce revirement vers les pays de l’Est.
Les 7 000 Marocains sans travail n’ont pas décidé de baisser les bras. Depuis une semaine, ils manifestent quasiment tous les jours dans différentes municipalités de la région. Sous le slogan « Une marche pour la dignité », ils revendiquent le droit d’avoir du travail et d’être de culture différente. « Cela fait des années que nous travaillons dans la culture des fraises, que nous vivons comme des esclaves et cette année on nous enlève le pain de la bouche ! », s’insurge Mohamed Hannan, présent dans une des manifestations pacifistes.
Sur le terrain, trois organisations humanitaires, financées en partie par la région d’Andalousie - Caritas, Huelva Acoge et la Croix-Rouge -, ont été dépêchées en urgence pour distribuer trois fois par semaine des vivres aux immigrés marocains
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