Le Maroc veut miser sur le tourisme sportif

28 janvier 2008 - 20h42 - Maroc - Ecrit par : L.A

Le tourisme actif représente 60% des voyages à travers le monde, indique l’ONMT (Office national marocain du tourisme). D’ici 2020, il sera pratiqué par près d’un milliard de personnes. Mais où en est actuellement le Maroc ? On le sait, avec la mer, la montagne et le désert, ses atouts sont multiples. Reste à mettre à contribution les régions pour développer des activités sportives captivantes d’un tourisme dynamique. Pas si simple que ça.

La première idée qui vient en tête est d’exploiter une ressource locale. Là où il y a la mer, on aménage un port de plaisance, une plage, on organise des excursions de pêches. Le plan Azur, et notamment la construction de six stations balnéaires à travers le pays, s’inscrit dans cette optique. Mais de nombreuses niches restent à identifier. « Partout en Europe, les réseaux de sentiers pédestres en montagne ont eu un effet structurant », explique Claude Origet du Cluzeau, présidente de l’Académie européenne du tourisme, invitée au Forum sport et tourisme, qui s’est tenu mardi dernier à Casablanca.

« Une seconde stratégie est de développer des sports et jeux identitaires », révèle l’experte venue témoigner de l’expérience européenne. On joue à la pelote en Pays basque, au rugby au pays de Galles et à la pétanque en Provence. Certaines activités, qui faisaient d’abord partie du quotidien des habitants d’une région, peuvent même être déviées en attrait touristique. C’est le cas notamment de la plongée sous-marine dans les Cyclades, en Grèce. On peut aussi construire de grandes infrastructures, comme les terrains de golf ou les parcs aquatiques. Mais attention ! Ces constructions doivent servir « à renforcer une destination », prévient Origet du Cluzeau.

Le sport spectacle peut également aider à drainer les flux touristiques vers les régions. « On oublie souvent que là où il y a un beau port de plaisance, il y a aussi des locaux qui viennent se promener pour admirer les embarcations ». Ceci sans compter tous les grands évènements : Coupes du monde, Championnats mondiaux, etc.

Enfin, une nouvelle tendance se dégage de plus en plus dans le paysage du tourisme sportif : le sport en ville. « Les grands marathons, le vélo en ville, les spas et fitness, etc ».

Ce qu’il faut retenir, toujours selon Origet du Cluzeau, c’est que les sports sont presque toujours importés. « Et à ce moment-là, il faut voir si ça prend ou pas ». Le surf, par exemple, a connu un succès fulgurant dès qu’il est sorti de l’île d’Hawaï.

L’experte met cependant en garde contre certains pièges, dans lesquels les destinations touristiques émergentes risquent de tomber. « Il ne faut pas oublier que le touriste vient d’abord dans un univers ». Le golfeur, par exemple, peut très bien jouer au golf près de chez lui. Pourquoi se déplacerait-il jusqu’au Maroc ? De plus, elle rappelle que la famille qui l’accompagne a aussi besoin d’occuper son temps. « La valeur ajoutée de la couleur locale prend ici tout son sens », indique-t-elle. « C’est bien la preuve que ce sont d’abord les villes qui marchent, et pas les terrains de golf », a lancé un participant au Forum, en déplorant que les golfs de Ben Slimane et Casablanca soient vides et ceux de Marrakech, surbookés. « Pourquoi un Européen viendrait-il au Maroc, alors qu’il est entre 100 et 150 euros plus cher que la Turquie ou la Tunisie ? », questionne-t-elle.

Miser sur les spécificités locales est un excellent moyen de se protéger, et de ne pas tomber dans l’effet mode. « L’identité est le meilleur garant du durable », renchérit Patrick Simon, propriétaire de Dar Infiane, dans la province de Tata. « Offrir un produit hors-sol vulnérabilise et expose la destination à n’importe quel caprice du marché ». Mieux miser sur l’exclusivité. Pour Simon, « l’implication des populations locales est, à ce niveau, incontournable ».

Il semblerait d’ailleurs que les instances publiques aient déjà bien appris leur leçon. Depuis quelques mois, à l’ONMT, le marketing de la destination Maroc s’effectue sur la base des spécificités de chacune des régions. Au ministère du Tourisme et de l’Artisanat, la direction des aménagements et des investissements a constitué une équipe « Produits de niche », chargée de développer et de soutenir les initiatives du tourisme sportif. La tâche est cependant difficile, car on ne dispose, pour le moment, d’aucune cartographie de l’offre au Maroc. « Aucun recensement n’a été effectué à ce jour », déplore Anas Damghi, chef de projet pour le tourisme sportif, au département de tutelle. Impossible de connaître donc le nombre d’opérateurs qui offrent ce type de produits, ni l’importance de leur clientèle. « Nous ne savons même pas combien de sentiers pédestres aménagés compte le pays ». Ce serait là un excellent point à inscrire à l’agenda des ministres du Tourisme et de l’Artisanat et de la Jeunesse et des Sports. Surtout que ces derniers ont accueilli avec enthousiasme la proposition des organisateurs du Forum, de signer un contrat de convergence.

L’Economiste - Marie-Hélène Giguère

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Tourisme - Office national marocain du tourisme (ONMT) - Promotion

Ces articles devraient vous intéresser :

Maroc : l’Oriental, un nouveau rival pour Marrakech et Agadir

Le potentiel touristique de la région de l’Oriental est particulièrement fort. Journalistes, influenceurs et agents de voyage marocains et étrangers ont pu le découvrir lors d’un roadshow organisé par le Conseil régional du tourisme (CRT) avec le...

Maroc : ruée vers la location de voitures

Grâce à l’embellie du tourisme marocain, le secteur de location de voitures a connu une forte croissance en 2024.

Maroc : les plages à éviter cet été

Le ministère de la Transition énergétique et du développement durable a récemment publié la liste des plages classées non conformes à la baignade pour la saison estivale qui s’annonce. En tout, 22 plages dont celle de Salé, très fréquentée par les...

Le Maroc vise le Top 10 des destinations touristiques mondiales

L’Office National Marocain du Tourisme (ONMT) compte mettre un accent particulier sur sa stratégie de communication et promotion, avec l’ambition d’attirer près de 4 millions de voyageurs supplémentaires. Cette annonce fait suite au bilan qualifié...

Maroc : un lac en péril

Le problème de l’assèchement du lac Tamda dans la province d’Azilal préoccupe le député Saïd Atghlast qui a adressé une question écrite à la ministre du Tourisme, de l’artisanat, de l’économie sociale et solidaire à ce sujet.

Booking dicte sa loi aux hôtels marocains

La plateforme de réservation en ligne, Booking.com continue de dicter sa loi aux hôteliers marocains, ainsi qu’aux agences de voyages, provoquant d’énormes pertes économiques.

Tourisme au Maroc : une saison estivale en demi-teinte

À l’heure où les Marocains résidant à l’étranger (MRE) retournent dans leurs pays d’accueil, les familles marocaines rejoignent leurs villes de résidence, pour préparer la rentrée scolaire de leurs enfants, les professionnels du tourisme font le bilan...

La stratégie du Maroc pour booster le tourisme interne

L’embellie du tourisme se confirme pour le Maroc. Fatim-Zahra Ammor, ministre du Tourisme, de l’artisanat et de l’économie sociale et solidaire, expose sa stratégie pour maintenir voire accroître cette tendance.

Tourisme au Maroc en 2024 : un été historique, des perspectives XXL

Avec les 2,6 millions de touristes arrivés en juillet, les perspectives pour le tourisme marocain sont prometteuses et autorisent à réviser les objectifs fixés dans la feuille de route pour le secteur, estime Zoubir Bouhoute, expert en tourisme.

Le Maroc opte pour le tourisme rural

Fatim-Zahra Ammor, la ministre du Tourisme, de l’artisanat, de l’économie sociale et solidaire, a annoncé le lancement de nouvelles liaisons aériennes pour desservir les zones enclavées du royaume. Objectif, développer le tourisme rural.