La société marocaine est responsable de l’ampleur que prend le harcèlement sexuel (vidéo)

19 septembre 2021 - 21h00 - Maroc - Ecrit par : G.A

La vidéo montrant le harcèlement sexuel dont a été victime une jeune fille à Tanger et qui a été largement diffusée sur les réseaux sociaux, remet sur le tapis la question sur les ravages du phénomène et les raisons pour lesquelles la rue devient de plus en plus le lieu de manifestation de ce fléau.

Le principal suspect dans cette affaire de harcèlement sexuel en pleine rue est un mineur qui n’a que 17 ans. Interrogé par SNRT News, Mohssine Benzakour, psycho-sociologue, a expliqué que le phénomène prend de l’ampleur depuis quelque temps parce que chaque acteur identifie la rue comme son territoire et fait en sorte d’y imposer sa loi et sa volonté. Pour lui les violences contre la femme, malgré les nombreuses sensibilisations, n’ont pas connu une baisse en tant que tel. Et le phénomène puise sa force dans les rapports que les gens entretiennent entre eux.

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«  Au Maroc, on a toujours ce problème de concevoir le rapport à l’autre par la force ou la violence. C’est toujours une question d’autorité. Ce qui se passe aujourd’hui ce sont les filles qui incitent au harcèlement sexuel parce qu’elles ne s’habillent pas comme moi je le conçois. Au nom des libertés individuelles, certains en viennent aux dérives que nous observons. Dans ce cas de figure, il y aura toujours quelqu’un pour porter la responsabilité des actes que nous dénonçons et une victime pour justifier nos torts  ».

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À la question de savoir si le problème est lié au processus de socialisation à l’école, le psycho-sociologue souligne que l’école marocaine n’a pas encore compris par quel bout tenir la chose, et comment développer chez les jeunes, le rapport à l’autre, ou encore qu’est-ce que le lieu public, comment se porter lorsqu’on se retrouve en public. « Aujourd’hui, avec les programmes scolaires, on ne retrouve rien sur le civisme. Qu’appelle-t-on un bon citoyen ? Rien de tout ceci ne transparaît dans les programmes scolaires et c’est un pan très important de la formation de nos enfants en tant que relève de demain que nous ratons. Et c’est dommage ».

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Le médecin prend l’incident de Tanger comme un signal fort envoyé aux autorités pour qu’elles essayent de revoir les différentes notions inculquées aux jeunes. Le comble est que ce qui s’est passé à Tanger est l’œuvre d’un mineur. « Le plus triste, il a pris son geste pour un acte héroïque, d’où la publication sur les réseaux sociaux. Mais ce n’est pas pour autant qu’il faille accuser les réseaux sociaux des dérives que nous observons. Nous sommes comptables de ce qui se passe. On a longtemps accusé la télé, l’ordinateur. Aujourd’hui, le bouc émissaire parfait c’est internet. Non, c’est une question de citoyenneté, de responsabilité et d’éducation. C’est aussi simple que cela ».

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Pour le spécialiste, les réseaux sociaux ont certes amplifié le phénomène, mais ils ont le mérite de renvoyer à la société marocaine ce qu’elle refuse de voir depuis de nombreuses années. « On ne peut accuser les réseaux sociaux lorsque nos enfants reflètent l’éducation que nous leur avons inculquée » ; a-t-il ajouté.

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Même si les parents ont leur part de responsabilité, l’école n’est pas épargnée. Pour Mohssine Benzakour, comme il est question de harcèlement sexuel, il serait temps que le cours sur l’éducation sexuelle devienne une réalité. « Mais plus important, il faut instaurer le civisme. Faire comprendre aux jeunes ce que doit être le rapport avec l’autre. On ne peut laisser les jeunes grandir avec les idées selon lesquelles il faut exclure certains de la société à cause de leur différence. Les enfants ne doivent pas grandir en se disant que la femme est un être faible, et qu’on peut avoir tout ce qu’on veut d’elle par la force ou la violence. C’est une question d’éducation et on doit s’y mettre », a-t-il précisé.

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