Une étudiante voilée a été victime de propos racistes de la part d’une intervenante du jury lors d’une soutenance de fin d’année à l’Université Paris-Dauphine.
Qui achète des livres ? Étant donné le prix d’un ouvrage, il n’est pas étonnant que beaucoup rechignent à faire cette dépense. Surtout si l’on considère le taux d’analphabétisme.
Les libraires et les éditeurs s’échignent à tirer le commerce du livre vers le haut. D’une manière générale, c’est surtout les éditions marocaines qui souffrent. Petits moyens, petit tirage, petite clientèle. Sur les étalages, au milieu du tabac, de la confiserie, des cassettes vidéo et autres, le livre parvient malgré tout à faire son chemin et à attirer le regard. À condition, qu’il soit vacant.
Par Taieb CHADI
Rachid est bibliophile. Un quadragénaire à crâne rasé et à petites lunettes cerclées. C’est un collectionneur de tout document édité. Il ne passe pas une semaine sans faire un saut chez ses librairies et bouquinistes préférés. Ce samedi, il défile encore entre les rayons étroits du Carrefour des Livres. Sa mallette noire sous le bras, Rachid s’arrête dans un coin pour feuilleter un livre. Manifestement un nouvel arrivage. Un récent roman marocain d’expression française. L’auteur, Rachid le connaît très bien. Il a déjà lu toutes ses uvres et il n’a pas envie de rater le dernier. Il passe à la caisse pour verser 120 Dh. Le prix d’un roman de 155 pages.
Des lecteurs assidus et des acheteurs réguliers comme Rachid, il en existe combien au Maroc ? Le dernier recensement national en date n’en a pas fait le compte. Seule la gent des libraires peut se permettre de définir, sans compter, leurs clients. Lieux d’attraction qui cristallisent plusieurs types d’amateurs. Qui sont-ils ? À quel rang socio-culurel appartiennent-ils ? Que lisent-ils ?
L’antre de la culture
Véritables comptoirs de commercialisation des livres, les librairies peuvent aussi être vues comme lieux d’échanges culturels. Cette double vocation nous rapporte à une typologie de ces boutiques, qui peuvent être classées en trois catégories.
Les librairies de quartiers, dites aussi de proximité. Elles limitent leur marchandise aux livres et aux fournitures scolaires. Le plus important de leur chiffre d’affaires se fait lors de la rentrée scolaire. Aux mois de septembre et d’octobre, leur comptoir de ventes est submergé par une foule de grandes et de petites silhouettes. Vociférant les titres des livres scolaires, parascolaires et de référence. Des HB/n° 2 et des cahiers à spirale de 96 pages figurent aussi dans les listes des fournitures scolaires branchées. La clientèle de ces librairies embrassent toutes les catégories socioprofessionnelles. Ces dernières, toutes classes confondues, effectuent des achats de nécessité. Mais, une fois la rentrée passée, ces librairies rentrent dans une période de morosité pendant dix mois de l’année. 85 % d’entre elles ont été obligées de déposer leur bilan. Les rescapées doivent leur survie à d’autres activités para-libraires. Elles louent des cassettes vidéos ou vendent, dès le mois d’avril, des glaces à 1 et 2 Dh.
Les librairies professionnelles appartiennent ou sont gérées pour la plupart par des étrangers. Elles se trouvent généralement dans les quartiers des grandes villes impériales où vivent des communautés européennes. Elles offrent un large éventail de livres. Depuis "La trilogie" de Sophocle jusqu’au dernier guide touristique de la Suisse allemande. La traduction française de "Les Mille et une nuits" de Naguib Mahfouz est aussi disponible. Rien ne manque, et le client peut toujours passer commande et être livré dans les trois semaines qui suivent. 95 % des documents de ces librairies sont de langue française. La place du livre arabe en langue arabe est très réduite. " Mes clients sont architectes, pharmaciens ou cadres supérieurs . Leurs lectures sont variées. Ils achètent autant les livres techniques que ceux de science fiction", explique la propriétaire de l’une de ces librairies. Ce type de lecteurs peut débourser mensuellement la somme de 1 500 dh pour l’acquisition des bouquins dont la jaquette leur plaît. Cette situation peut expliquer la bonne santé de ces librairies qui ont développé d’autres types d’activités pour s’adjuger une notoriété sur le marché et drainer un public féru de culture mondaine. Les signatures des recueils ou autres romans est l’occasion de recevoir un écrivain reconnu. C’est par ce biais qu’elles effectuent la plus grande part de leurs actions commerciales sous l’étiquette de l’animation et du rayonnement culturels.
La plus grande chaîne de vente des livres est constituée par les bureaux de tabac et les kiosques éparpillés aux quatre coins du pays. Dans ces petits espaces, les livres côtoient les paquets de cigarettes, les journaux et revues et autres tablettes de chocolat. Souvent ces points de vente présentent des livres de poche, des petits dictionnaires ou des guides pour apprendre à cuisiner marocain. Les clients matinaux ou du samedi matin y vont pour acheter des cigarettes et des journaux. Mais il arrive qu’ils craquent pour le titre incitatif d’un beau livre fleurte avec la confiserie. La majorité de ces points de vente où le commerce des livres prospère se trouve dans des quartiers à fort pouvoir d’achat. Quant aux autres ils logent dans les gares routières ou ferroviaires. " Bizarrement les meilleurs bouquins que j’ai lus, je les ai achetés dans des kiosques de gares. A chaque fois que je suis en voyage, je me fie à mon instinct de passant pour m’approprier le titre d’un livre étalé sur une vitrine bien étoffée. C’est une littérature dite de ’gare’ mais qui a son lectorat et ses acheteurs. Et moi j’en fais partie>, révèle Aziz, délégué commercial de profession.
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