L’investissement privé est en chute libre au Maroc. C’est du moins ce que révèle la banque mondiale dans son nouveau rapport de suivi de l’économie marocaine.
Les experts de la Cnuced ont passé au crible le dispositif de promotion de l’investissement étranger. Il s’agit en fait d’une étude critique et sans concession de la politique d’investissement du Maroc. Le rapport final de ce travail, qui aura duré plus d’un an, sera présenté au gouvernement marocain au mois de juin prochain à Genève.
Le constat général qui s’en dégage est le manque de constance dans les performances malgré une amélioration incontestable de l’attractivité du pays auprès des investisseurs internationaux. « La volatilité qui caractérise les flux d’investissements directs témoigne de l’absence d’une stratégie proactive de promotion des investissements », relève le rapport de la Cnuced. Ce pilotage à vue est donc l’une de nos grandes faiblesses.
Le Maroc est néanmoins l’un des tout premiers destinataires des investissements directs étrangers sur le continent. En dix ans, les flux moyens des IDE sont passés de 500 millions de dollars à 3 milliards à fin 2005. Les réformes ont porté leurs fruits, mais il faut aller beaucoup plus loin, semblent dire les experts, en faisant en sorte que les changements soient plus visibles et concrets sur le terrain. Visibles dans le règlement des litiges commerciaux, le fonctionnement de la justice commerciale sur lequel les experts insistent particulièrement, l’accès au foncier et la lisibilité de la législation et de la doctrine fiscales.
Le moins que l’on puisse dire est que les conclusions vont faire beaucoup de bruit. L’équipe des rédacteurs du rapport a rompu avec la traditionnelle langue de bois en appelant un chat un chat. Le traitement de la corruption qui gangrène une partie de l’appareil judiciaire et dont se plaignent les opérateurs est à ce propos une évolution dans l’attitude des organismes internationaux. Est épinglée aussi la guéguerre entre la direction des investissements et les CRI, la compétition entre les deux entités rompt la chaîne de services auprès des investisseurs. Il n’est pas rare qu’un promoteur découvre avec stupéfaction qu’une partie du contenu de la convention signée à Rabat est presque impraticable au niveau local.
D’où l’idée que préconise l’étude, à savoir la création d’une agence dédiée à la promotion des investissements, un peu sur le schéma tunisien ou portugais. Pour l’instant, ce n’est pas le chemin pris par le gouvernement. La direction des investissements a été placée au ministère de l’Industrie et du Commerce afin de mieux relayer la politique industrielle et le plan Emergence notamment.
Où sont passées les réformes ?
A tous les niveaux, le constat des insuffisances du système judiciaire est partagé par les autorités, relèvent les experts de la Cnuced. Pourtant, c’est de loin le point qui salit la vitrine marocaine auprès des investisseurs internationaux. « La justice marocaine ne reflète pas encore une image positive aux yeux des investisseurs », souligne la Cnuced. Elle est même considérée par ces derniers comme l’obstacle le plus important aux IED. Que sont donc devenues les « réformes » qui se sont enchaînées ces dernières années ?
L’Economiste - A. S.
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