Des journées de travail de neuf heures "sans pause, où on mange en cachette", des salades "qu’on coupe sans gants de protection", des semaines avec "sept jours de travail", du harcèlement, un contrat rompu à cause d’une grossesse. Les abus sont légion.
Une nouvelle audience a eu lieu, mardi, trois ans après les dénonciations. Le système dit de détachement développé dans les années 90 est "une relation triangulaire entre un salarié, une société d’intérim et une société utilisatrice (les exploitations)", a rappelé le juge départiteur, Philippe Bruey. Un système autorisé par l’Union européenne (UE), et dont sont victimes les cinq ex-travailleuses agricoles. La société d’intérim espagnole, Laboral Terra-aujourd’hui en liquidation judiciaire- les avaient employées dans des exploitations agricoles et sociétés d’emballages du Sud-Est de la France.
Pour Yann Prevost, l’avocat de deux des ex-salariées, Yasmina Tellal et Karima, "ce système est un nid de manquements à la dignité des travailleurs quand il n’est pas contrôlé". Il accuse Laboral Terra d’avoir violé les règles de l’UE sur le détachement, ses clientes étant soumises au droit espagnol. "Il n’y a pas de détachement. Les contrats ont été signés en France avec des salariés qui étaient en France", pour des missions à répétition, sans rentrer en Espagne et les salariés auraient dû bénéficier de CDI de droit français, explique-t-il.
C’est pourquoi ces ex-salariées marocaines réclament à Laboral Terra des dizaines de milliers d’euros de rappels sur salaires, d’indemnités et de dommage et intérêt notamment pour "prêt illicite de main d’œuvre", rapporte AFP. De même, elles demandent une condamnation en solidarité pour une dizaine de sociétés agricoles françaises. "Ce contrat, il favorise le dumping social, mais il est légal. (…)Ce qui se passe entre Laboral Terra et les salariés, ce n’est pas le problème des sociétés utilisatrices", a réagi Jean-Pierre Tertian, l’avocat d’une entreprise d’emballage agricole.