Le deuil impossible de Leïla, un an après la mort de sa fille (vidéo)

11 septembre 2024 - 19h00 - France - Ecrit par : S.A

Un an après la mort de Socayna, sa fille aînée, une étudiante de 24 ans tuée le 10 septembre 2023 par une balle perdue qui a traversé le mur de sa chambre dans le quartier Saint-Thys à Marseille, Leïla a du mal à faire le deuil. Depuis l’arrestation et la mise en examen pour assassinat d’un mineur de 16 ans soupçonné d’être le tireur de la rafale ayant tué la jeune femme sur un point de deal, plus rien. Elle dénonce « le silence assourdissant des autorités » et réclame justice.

Profondément touchée par la mort de Socayna, Leïla, 62 ans, traverse une épreuve difficile. « Je suis une morte-vivante, je survis uniquement pour mon autre fille (Sabrina, 15 ans), confie-t-elle au Parisien. La maison est vide, terriblement vide. Sans arrêt, je crois que Socayna va frapper à la porte et s’asseoir avec nous dans la cuisine. Elle était tout pour moi. C’était ma fille, ma sœur, ma confidente, mon assistante. Nous échangions et discutions beaucoup. Quand je rentrais du travail, le soir, elle me parlait des livres qu’elle lisait. Elle était très instruite, elle m’a appris beaucoup de choses. Je suis allée à Rome, en Arabie saoudite, pour savoir s’il y a quelque chose après la mort, comprendre si c’est notre destin. C’est tellement injuste. »

La jeune étudiante de 24 ans avait été tuée la nuit du 10 septembre 2023 par une balle de 7,62 de kalachnikov tirée depuis un scooter monté par deux hommes vêtus de noir alors qu’elle se trouvait dans sa chambre dans une cité marseillaise. Sa mère revient sur cette nuit bouleversante. « C’était un dimanche, vers 22h45. J’étais au lit avec ma deuxième fille, Sabrina, car nous n’avions que deux chambres. On a entendu des détonations. On a regardé par la fenêtre, mais nous n’avons rien vu à part de la fumée. J’ai demandé à ma fille de fermer les fenêtres. Sabrina est allée chercher un chargeur de téléphone dans la chambre de sa sœur. Elle a toqué à la porte. Mais Socayna ne répondait pas. Elle a fini par pousser la porte. Et j’ai entendu ses cris : Maman, maman, ça coule de partout, de partout ! J’ai accouru, Socayna avait un trou dans la joue. Je l’ai prise dans mes bras, je savais qu’elle allait mourir », raconte Leïla.

À lire :Kénitra endeuillée après la mort terrible d’un enfant

Sa fille Sabrina tente tant bien que mal de faire le deuil. La mort de sa sœur ainée reste une épreuve difficile pour elle et sa mère. « Elle est suivie par un psychologue. Elle ne dit pas grand-chose, elle a pris du poids. Je sais que je ne suis pas assez là pour elle, pour ses études. Mais Socayna est tout le temps dans ma tête, je la cherche. Je ne sais pas comment je vais pouvoir continuer. Avant, je travaillais, j’étais vivante. Même les cachets de la psychiatre ne me font rien. Il n’y a pas de remède pour moi. Je me réveille la nuit, dévorée de questions. Avec Sabrina, nous n’avons pas trop de dialogue. Je n’ai plus de sentiment. Je n’arrive même pas à m’approcher d’elle, à la prendre dans mes bras. Ça me fait mal. Mon cerveau est saturé, je n’ai plus de place. Nous sommes parties ensemble au Maroc en vacances, loin d’ici. J’avais commencé à lui parler. Toute la place est prise par Socayna. Je me cache de Sabrina pour pleurer. La seule chose que j’attends, c’est que les meurtriers soient jugés, condamnés, punis. Mais c’est tellement long », ajoute la sexagénaire.

À lire :Émoi en Belgique après la mort de la petite Sidra Atmane, 4 ans

En février dernier, un mineur de 16 ans soupçonné d’être le tireur de la rafale ayant tué Socayna sur un point de deal a été interpellé et mis en examen pour assassinat. Le mis en cause et ses proches étaient « très largement impliqués dans le trafic de stupéfiants », faisait savoir le procureur de la République. La jeune étudiante serait une victime collatérale d’un règlement de compte entre trafiquants. Ça agace Leïla que la justice présente le tireur comme un mineur. « Ça m’énerve quand j’entends parler de ce terme : “mineur”. C’est un criminel, un meurtrier, point final. Un mineur, normalement, il est à l’école, pas dans la cité avec une kalachnikov. Il a fait un choix. C’est la faute des parents aussi, qui laissent leurs enfants traîner dans la rue. C’est aussi leur responsabilité », dénonce-t-elle. Depuis l’assassinat de la jeune femme, « rien n’a changé », selon la mère de la victime. Écœurant. « Rien n’a changé. Il y a toujours des meurtres, des victimes innocentes, des victimes collatérales partout en France. Beaucoup d’élus sont venus me voir. Mais qu’ont-ils fait depuis ? Ma fille est partie gratuitement. Ces derniers jours, je n’ai pas reçu un coup de fil. C’est le silence total, si ce n’est quelques associations qui me contactent. L’État, la ville ont oublié Socayna. En fait, elle n’était qu’un numéro, sa mort a fait l’actualité, et puis plus rien, c’est comme si on nous avait demandé de passer à autre chose. Mais c’est impossible », poursuit-elle.

À lire :Le deuil persistant de Booder pour son ami Wahid Bouzidi

Leïla réclame justice pour sa fille. En attendant, elle organise une marche blanche ce samedi 14 septembre dans le quartier de la Joliette à Marseille, pour rendre hommage à Socayna, rapporte La Provence.

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Droits et Justice - Drogues - Homicide - Décès - Vidéos - Trafic - Arrestation - MRE

Aller plus loin

L’influenceuse Soraya Sahli jugée pour la mort de sa fille

Accusée d’avoir tué Lydia, sa petite fille de deux mois, dans une chambre d’hôtel à Saint-Gilles le 19 février 2019, l’influenceuse Soraya Sahli, 31 ans, a comparu mercredi...

Ayoub, 16 ans : l’impossible deuil après le séisme au Maroc

Ayoub, 16 ans, est l’un des survivants du puissant et dévastateur séisme qui a touché une partie du Maroc dans la nuit du 8 septembre. Il a perdu cinq membres de sa famille dans...

Émoi en Belgique après la mort de la petite Sidra Atmane, 4 ans

Sidra Atmane, 4 ans, élève dans l’école Sint-Martinusschool à Burcht, s’est grièvement blessée vendredi dernier pendant le cours de gymnastique. Transportée à l’hôpital dans un...

Kénitra endeuillée après la mort terrible d’un enfant

Un tragique accident a endeuillé la ville de Kénitra. Un enfant de 11 ans a perdu la vie après être tombé dans un canal d’égout ouvert, durant des travaux de maintenance...

Ces articles devraient vous intéresser :

Mariages mixtes : percée inquiétante du chiisme chez des MRE

Un phénomène particulier se manifeste au sein de la communauté marocaine de Belgique : une augmentation des mariages entre des femmes marocaines et des hommes irakiens chiites, célébrés selon le rite de la Fatiha.

Maroc : un afflux de touristes et de MRE sans précédent

Quelque 1,3 million de touristes ont visité le Maroc en avril 2024, ce qui représente une hausse record de 17 % par rapport à la même période de 2023.

L’Europe veut bloquer les transferts des MRE

L’Union européenne veut mettre fin au transfert de fonds des Marocains résidant en Europe vers leur pays d’origine via les banques marocaines présentes sur le continent.

Maroc : mères célibataires, condamnées avant même d’accoucher

Au Maroc, les mères célibataires continuent d’être victimes de préjugés et de discriminations. Pour preuve, la loi marocaine n’autorise pas ces femmes à demander des tests ADN pour établir la paternité de leur enfant.

Bientôt une plateforme pour aider les MRE à investir au Maroc

Karim Zidane, ministre délégué chargé de l’investissement, de la convergence et de l’évaluation des politiques publiques, encourage les Marocains résidant à l’étranger (MRE) à davantage investir au Maroc, soulignant la nécessité pour le royaume...

MRE : Voiture de location au Maroc ? Évitez les galères à la douane !

Pour les MRE, opter pour une voiture de location peut s’avérer une solution commode pour se déplacer durant un séjour au Maroc. Cette alternative offre une certaine souplesse, mais elle implique de se familiariser avec les formalités d’importation...

L’affaire "Escobar du désert" : les dessous du détournement d’une villa

L’affaire « Escobar du désert » continue de livrer ses secrets. L’enquête en cours a révélé que Saïd Naciri, président du club sportif Wydad, et Abdenbi Bioui, président de la région de l’Oriental, en détention pour leurs liens présumés avec le...

L’aide au logement connait un succès auprès des MRE

Depuis son ouverture le 2 janvier, le site d’assistance pour l’aide au logement connaît un succès croissant, notamment auprès des Marocains résidant à l’étranger.

L’inclusion des MRE à l’aide au logement passe mal

Les Marocains résidant à l’étranger (MRE) peuvent bénéficier de l’aide directe au logement au même titre que les Marocains résidant au Maroc, ce qui n’est pas du goût de bon nombre d’internautes. Certains d’entre eux n’hésitent pas à appeler à...

Des Marocains réduits à l’esclavage dans le Lot-et-Garonne

Vingt travailleurs marocains ont été exploités dans des conditions indignes par une agricultrice du Lot-et-Garonne. Attirés par la promesse d’un contrat de travail et d’une vie meilleure, ils ont déboursé 10 000 euros chacun pour rejoindre la France.