Exode des cadres musulmans : le cri d’alarme du recteur de la Grande Mosquée de Paris

25 avril 2024 - 09h00 - France - Ecrit par : S.A

Chems-eddine Hafiz, recteur de la grande mosquée de Paris, déplore « l’exode silencieux des cadres musulmans de France » provoquée par les « marques de haine et de discrimination. »

« Récemment, dans une édition du quotidien Le Monde parue la semaine dernière, de nombreux témoignages de musulmans ayant choisi de quitter la France ont été recueillis, optant pour un retour aux terres natales de leurs parents voire grands-parents, ou pour s’établir dans des nations anglo-saxonnes ou du Golfe, face à un climat de plus en plus hostile. Une réalité déjà mise en lumière le 13 février 2022 par le New York Times, sans susciter de prise de conscience notable », écrit Chems-eddine Hafiz dans un billet intitulé « ’Quel gâchis ! » Émigration musulmane : le cri d’alarme d’une France en perte de diversité’ », publié sur le site de la Grande mosquée de Paris mardi. Cette émigration musulmane ne date pas d’aujourd’hui. « Depuis plusieurs années, les départs se comptent par milliers, une tendance qui s’est nettement accentuée depuis 2015. Le reportage de l’émission ’Les Pieds sur Terre’ sur France Culture du 22 mars 2022 éclaire de manière saisissante cet état d’esprit grandissant parmi les musulmans de France tentés par l’exil », fait-il savoir.

À lire :La Grande mosquée de Paris fustige les propos de Gabriel Attal

Après avoir analysé les témoignages, le responsable dégage les causes de cette émigration musulmane. Il évoque notamment « la violence subie par les musulmans de France, qu’ils soient pratiquants ou de culture », devenue alarmante. « Comme le souligne l’article du New York Times, il y a eu une augmentation de 52 % des actes antimusulmans en 2020 par rapport à l’année précédente. De plus, une enquête de 2017 révélait que les jeunes hommes perçus comme Arabes ou Noirs étaient vingt fois plus susceptibles d’être soumis à un contrôle d’identité par les forces de l’ordre », indique le recteur. Autre cause, cette stigmatisation « est exacerbée par un climat politique et médiatique défavorable », pointe-t-il, notant que « depuis de nombreuses années, les musulmans sont la cible de violentes attaques, non seulement de l’extrême droite, mais également de formations politiques se réclamant de l’idéal républicain. » La discrimination sur le marché du travail est l’autre cause identifiée par le recteur, car elle « demeure un obstacle majeur pour les musulmans de France ». À titre illustratif, il cite le rapport gouvernemental publié récemment, lequel indique que « les candidats avec des noms arabes ont 32 % moins de chances d’être contactés pour un entretien d’embauche », et que « de nombreux musulmans qualifiés rencontrent des difficultés à trouver un emploi en raison des préjugés et des stéréotypes. »

À lire :Antisémitisme : la Grande Mosquée de Paris rectifie les propos d’un imam

Cette émigration musulmane ne sera pas sans conséquence pour la France. S’il conçoit parfaitement « que chaque individu aspire à une vie où il se sent en sécurité et respecté, quelle que soit sa foi ou ses convictions », Hafiz estime toutefois que « ce départ vers des horizons plus cléments de nos concitoyens musulmans est une perte immense pour la France en termes de talents, de compétences et de contributions ». Il ajoutera : « Les musulmans sont indubitablement un maillon essentiel de notre société, ayant enrichi, qu’on le reconnaisse ou non, notre histoire, notre culture et notre économie. » Et d’interroger : « Posons-nous collectivement la question essentielle : quelle société souhaitons-nous léguer à nos enfants ? Une société multiculturelle, solidaire et unie, où l’amour et l’intérêt pour la patrie priment, surtout dans un monde marqué par de multiples dangers géopolitiques et des incertitudes économiques préoccupantes ? Ou bien allons-nous opter pour une société déchirée par des stigmatisations mutuelles, où les divisions croissantes risquent de marginaliser les citoyens les plus vulnérables, mettant ainsi en péril l’avenir de notre grande nation ? »

À lire :La Grande mosquée de Paris s’inquiète de la montée de l’islamophobie en France

Fort de ces préoccupations, le recteur de la Grande mosquée de Paris appelle les autorités et les citoyens français à jouer leur partition pour un « avenir harmonieux et inclusif ». « Il est crucial que les autorités et les citoyens français rassemblent leurs efforts pour combattre ce fléau. Il est temps de choisir la voie de l’unité et de la solidarité pour construire ensemble un environnement et un avenir plus harmonieux et inclusifs, pour tous les membres de notre société, y compris nos concitoyens musulmans », conclut-il.

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : France - Paris - Religion - Islam

Aller plus loin

La Grande mosquée de Paris fustige les propos de Gabriel Attal

Le recteur de la Grande mosquée de Paris Chems-eddine Hafiz a réagi aux propos du Premier ministre Gabriel Attal sur « l’entrisme islamiste ».

Mosquée de Paris : Chems-Eddine Hafiz s’oppose aux revendications marocaines

Dans un entretien, Chems-Eddine Hafiz, recteur de la Grande Mosquée de Paris (GMP), réagit aux « tentatives marocaines » de prendre en main la gestion de l’institution, qui...

La mosquée Assounnah d’Amiens incendiée, les Musulmans sous le choc

Stupeur et consternation à la mosquée Assounnah d’Amiens sud ce mardi 29 octobre. Arrivés pour la prière matinale, les fidèles ont découvert la façade arrière de l’édifice...

L’appel urgent de la grande mosquée de Paris aux musulmans de France

Au lendemain de la dissolution par le président de la République française Emmanuel Macron de l’Assemblée nationale, Chems-Eddine Hafiz, recteur de la Grande Mosquée de Paris, a...

Ces articles devraient vous intéresser :

Maroc : la date de l’Aïd Al Fitr connue

Considérant que le jeûne de Ramadan durera 29 jours cette année selon les calculs astronomiques, l’Aïd Al Fitr 2024 sera célébrée au Maroc le mercredi 10 avril.

Voici le montant de la Zakat al fitr cette année en France

Le Conseil Français du Culte Musulman (CFCM) a fixé le montant de référence de la Zakat al-Fitr pour l’année 2025 à 9 euros par personne. Cette aumône, obligatoire pour chaque foyer musulman, doit être versée avant la fin du mois de Ramadan.

En Espagne, l’appel du roi Mohammed VI divise

À Melilla et Ceuta, l’appel du roi Mohammed VI, commandeur des croyants, à ne pas sacrifier de moutons pendant l’Aïd Al-Adha cette année, reçoit un écho favorable mais certaines voix se font entendre.

Officiel : voici la date de l’Aïd Al Mawlid Annabaoui au Maroc

La date de l’Aïd Al Mawlid Annabaoui au Maroc est désormais connue. Elle vient d’être dévoilée par le ministère des Habous et des Affaires islamiques.

Les Marocains fêteront-ils l’Aid Al-Adha cette année ?

Abderrahmane Mejdoubi, président de l’Association nationale des éleveurs d’ovins et de caprins (ANOC), dément les rumeurs selon lesquelles le cheptel national en ovins et caprins serait « très en deçà » de la demande pour l’Aïd Al-Adha 2025.

L’Aïd al-Adha annulé au Maroc : réponse ferme d’un érudit marocain

Face aux critiques des observateurs extérieurs opposés à l’annulation l’Aïd al-Adha au Maroc, Cheikh Mustapha Benhamza, membre du Conseil supérieur des oulémas du royaume, apporte des éclaircissements.

Ramadan et grossesse : jeûner ou pas, la question se pose

Faut-il jeûner pendant le Ramadan quand on est enceinte ? Cette question taraude l’esprit de nombreuses femmes enceintes à l’approche du mois sacré. Témoignages et éclairages pour mieux appréhender cette question à la fois religieuse et médicale.

Maroc : « Marée » de déchets après les iftars sur les plages

Les associations de défense de l’environnement dénoncent le non-respect des règles environnementales par certaines familles qui laissent d’importantes quantités de déchets sur les plages après y avoir rompu le jeûne pendant le mois de Ramadan.

Voici la date de l’Aïd El Fitr au Maroc

Débuté le 12 mars au Maroc, le ramadan, l’un des cinq piliers de l’islam, se profile pour de millions de Marocains. Quand aura lieu l’Aïd El Fitr cette année ?

Zakat Al Fitr : voici le montant à payer en France

Le Conseil Français du culte Musulman (CFCM) vient d’annoncer la date du début du ramadan en France, qui commence le 10 mars 2024. Il vient également de donner le montant de la Zakat Al Fitr que devront payer les musulmans en France.