Sara Bellali
Elle est un pur produit de l’école marocaine et une passionnée de la microbiologie. A 28 ans, Sara a su attirer l’attention du Pr Didier Raoult, par son travail et son intelligence. Ce dernier n’a eu d’autre choix que de l’inviter à rejoindre son équipe scientifique. Dans une interview accordée à lactu24, la jeune casablancaise raconte son parcours et la façon dont elle est arrivée, de l’école publique marocaine, à se hisser sur le toit du monde, dans la spécialité qui est la sienne.
Sara Bellali raconte avoir fait toutes ses études dans les écoles publiques du quartier. "Je n’étais pas la première de la classe, mais je dirais que j’étais parmi les premiers". Avec un baccalauréat scientifique en poche, elle s’inscrit pour faire des études en biologie à la Faculté des sciences de Ben Msik. C’est après avoir obtenu un master international en sciences de la santé et du développement, piloté par l’Université Aix-Marseille, qu’elle a intégré l’équipe du Pr Raoult grâce à son stage du Master M2 en France. "Je suis tombée amoureuse de la microbiologie grâce à ce savant. J’ai vraiment profité de chaque instant de mon séjour de six mois à côté de lui. Il a cru en moi, et cela m’a poussé à donner le maximum", rapporte lactu24.
Elle raconte avoir battu le record du nombre de bactéries analysées par semaine. "3000 colonies bactériennes isolées en une semaine". C’est ainsi que le Pr Raoult lui a proposé de faire une thèse avec lui. "J’ai passé 4 ans en thèse sous sa direction, et là, je suis toujours à ses côtés", déclare-t-elle fièrement. Pour cette jeune Marocaine, intégrer l’équipe d’un professeur de renommée mondiale, représente une réelle opportunité et lui permet d’apporter sa pierre à l’édifice en tant que chercheur. "Faire partie de cette équipe internationale, me permet en tant que marocaine, de représenter mon pays de la meilleure des manières. Il faut savoir que le Maroc est représenté ici par une communauté d’étudiants chercheurs travaillant sur les maladies infectieuses. Certains sont partis vers de nouveaux horizons. Et d’autres font partie d’autres équipes à l’IHU", a -t-elle précisé.
À la question qui lui a été posée de décrire le Pr Raoult, elle peint "un grand infectiologue, très intelligent", qui ne connait pas de "limites quand il s’agit de découvertes". "Il a un caractère spécial, dur au travail mais très gentil". En ce qui concerne l’expérience qu’elle fait depuis quelques semaines grâce à la pandémie du siècle, elle raconte que l’équipe de microscopie a réussi à imager la première photo du covid-19 en France. "C’était vraiment beau de voir le virus qui bouleverse le monde entier. Il est tellement petit, on parle de nanomètre", dit-elle avant de souligner que l’équipe a réussi également à imager le cycle de vie du virus dans la cellule. "C’est vraiment fascinant de voir ce qui se passe dans le corps humain. Cela nous donne une idée sur le mécanisme d’action du virus ; je suis tombée amoureuse encore une fois de mon domaine", souligne-t-elle.
Appelée à se prononcer sur les critiques qu’essuie son mentor, Sara Bellali répond que les critiques dans le milieu scientifique sont monnaie courante, et que le "Pr Raoult ne prête pas attention aux critiques. Il n’a pas le temps pour cela ; il répond avec les résultats scientifiques". Pour elle, le fait que la chloroquine soit utilisée aujourd’hui par de nombreux pays comme protocole de traitement pour contrer le virus, est la preuve suffisante que le scientifique était dans le vrai et que les critiques n’avaient pas leur raison d’être.
Le Maroc dont est originaire la microbiologiste, est félicité par plusieurs pays et organisations internationales pour les mesures prises à temps en vue de limiter la propagation du virus. Pour Sara, le Maroc peut se féliciter d’avoir eu le flair de l’anticipation en procédant très tôt à la "fermeture des frontières, la suspension des vols commerciaux, l’application du protocole (azithromicine et hydroxychloroquine), la production en quantité suffisante de masques et la déclaration de l’état d’urgence sanitaire". "Je pense qu’on s’en est très bien sorti par rapport aux pays riches qui, eux-mêmes, souffrent de manques de tests et de masques. Je pense que le Maroc va sortir de cette crise avec moins de séquelles", ajoute-t-elle.
Elle espère néanmoins qu’après cette crise, le Maroc redonnera "vie à la recherche scientifique avec les moyens qui l’accompagnent pour permettre la réalisation de grandes choses". Cette scientifique chevronnée, même après le coronavirus, pense "continuer dans le développement de la recherche scientifique, qui est un monde très vaste, fascinant et qui demande beaucoup d’efforts".
À la question de savoir si le voile qui orne sa tête n’a pas été un frein contre son ascension dans l’équipe du Pr Raoult, elle répond que "la science n’a pas de religion". L’essentiel, c’est beaucoup plus la contribution de chacun à faire avancer les choses pour un monde juste et serein, débarrassé du coronavirus ou tout autre maladie.