Un médecin à la retraite au cœur d’une affaire d’avortements clandestins à Agadir
Un ancien médecin de 65 ans, retraité, a été arrêté lundi après-midi à Agadir, pour son implication présumée dans des actes d’avortement illégaux.
Alors que la cour d’appel de Paris l’a définitivement condamné à deux ans de prison avec sursis pour « exercice illégal de la médecine » et « usurpation du titre de médecin », un pseudo-naturopathe, soupçonné d’avoir entraîné la mort de plusieurs malades en phase terminale, offre ses services au Maroc.
Les Marocains doivent jouer la carte de la vigilance. Miguel Barthéléry, l’un des naturopathes français les plus controversés, définitivement condamné le 1ᵉʳ juin dernier par la cour d’appel de Paris à deux ans de prison avec sursis pour « exercice illégal de la médecine » et « usurpation du titre de médecin », poursuit ses consultations, offre ses services au Maroc, en compagnie de la très controversée Irène Grosjean, 92 ans, considérée comme la référence du « manger cru » en France, révèle une enquête menée par franceinfo. Le pseudo-thérapeute organise des stages en ligne, mais aussi des stages en présentiel de 5 à 6 jours à Guemassa, « à 45 minutes de Marrakech », est-il annoncé sur le site SantéNaturopathie.com, qui se charge des réservations. Celui qui se présente comme un spécialiste des maladies cellulaires, dont le cancer, un « docteur en médecine moléculaire », et compterait des centaines de patients, enseigne les bonnes pratiques du crudivorisme ou le tantrisme.
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Miguel Barthéléry promet « un stage pour changer de vie », « un stage pour apprendre à vivre vraiment vivant », qui sera assuré pendant six jours en compagnie d’Irène Grosjean et de Hervé Bonillo-Darnis. Il faut débourser 570 euros pour assister à ce stage, « ouvert à toutes et tous », dont le prix n’inclut ni les repas ni l’hébergement, facturés 170 euros par jour et par personne, par l’établissement nommé Les jardins de la santé, présenté sur son site Internet comme « un lieu dédié à la santé naturelle en pleine zone désertique », « imaginé et réalisé par un par un médecin suisse, le Dr Cyril Gacond ». Une adresse présentée régulièrement comme une référence par Irène Grosjean.
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L’un des journalistes de franceinfo qui s’est fait passer pour un patient a soumis le contenu de consultations au professeur Marie-Laure Joly Guillou, médecin microbiologiste des hôpitaux. « Cet homme ne présente pas un vocabulaire cohérent et scientifique de chercheur, explique-t-elle. Son discours sur les PSA est terrifiant. Le traitement lui-même est une aberration associant des purges à base d’huile de ricin et d’autres de régime dit “vegan” associant uniquement des fruits, des légumes non cuits de préférence, tout cela pour ’nettoyer le corps’, terme qui revient sans arrêt dans son discours. Inutile de dire que ce régime aboutit à la dénutrition et à l’affaiblissement du système immunitaire et de l’organisme. » Elle ajoutera : « J’ai des doutes sur ses connaissances scientifiques et son diplôme, vu son discours. Il va à l’inverse des valeurs des naturopathes qui travaillent effectivement avec des centres anti-cancéreux, mais sûrement pas avec les mêmes méthodes. Il met en danger la vie de ces patients en jouant sur le mot naturopathe. Il manipule ses patients et se met en situation de non-responsabilité vis-à-vis de son patient. »
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Octave Franck, le père de Catherine Franck, une patiente belge de Miguel Barthéléry, décédée en 2018 à l’âge de 39 ans d’un cancer du col de l’utérus déplore : « Si ce personnage continue bien ses activités depuis la France, ce n’est pas normal. Mais en France comme en Belgique, la justice est impuissante face à ces gens-là. Et il y a tellement de dossiers à traiter. Tout le monde ici, nous les parents, son frère, ses cousins, ses cousines, tout le monde a essayé de la faire changer d’avis, mais rien n’y faisait. Elle était convaincue de la réussite. Jusqu’au dernier jour, elle était convaincue qu’elle allait s’en sortir. Elle avait maigri. Elle ne pesait plus rien. C’était incroyable la souffrance qu’elle a endurée pendant six mois. C’est incompréhensible. » Camila, la femme de Charles B., un patient de Miguel Barthéléry décédé en décembre 2018 à l’âge de 41 ans d’un cancer d’un testicule, pointe, elle, l’emprise du pseudothérapeute sur ses patients. Elle a du mal à comprendre comment son compagnon qu’elle décrit comme un homme « vraiment brillant » s’est fait avoir.
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« Ça montre que ça peut arriver à tout le monde. C’est simplement qu’il y a une emprise tellement grande de ces gens-là, qu’il est impossible de convaincre les victimes »., dit-elle. Après le décès de son mari, Camila a porté plainte. « Je ne suis pas sûre que la justice ait bien conscience de la dangerosité de ces gens-là. Avec Irène Grosjean, ils tiennent une plateforme incroyable avec une patientèle énorme, des vidéos, etc. Ils continuent d’atteindre beaucoup de monde. Le discours de Miguel Barthéléry, c’est d’invalider ce que ressent la victime. À chaque nouveau symptôme, à chaque douleur, à chaque souffrance supplémentaire, il dit : ’C’est normal ! C’est ton corps qui se nettoie ! C’est ton corps qui essaie de trouver des moyens de te guérir’, etc. Il continue son emprise. Ça va de plus en plus loin et toutes les personnes qui sont autour, même les plus proches, ne peuvent rien faire. Pendant très longtemps je m’en suis voulue, je me disais : mais comment, moi, je n’ai pas réussi à le convaincre ? J’étais la personne en laquelle il avait le plus confiance. Mais quoi que je fasse, la colère, les pleurs, les explications, des preuves scientifiques, ce n’était pas possible. J’ai tout essayé. »
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