Fitch Ratings, agence américaine de notation, a confirmé la note de défaut de l’émetteur à long terme du Maroc en devises étrangères (IDR) à ‘BB+’ avec perspectives stables.
Si l’état de la balance des paiements est au vert, c’est en grande partie grâce à l’apport des MRE. A fin juin, les transferts des Marocains résidant à l’étranger se chiffrent à 17,8 milliards de DH et représentent plus de 25% de la valeur des exportations domestiques. Rapportés au PIB, leur poids est passé de 5% en moyenne avant 2000 à 9% actuellement. Leur rôle est déterminant à l’heure où les exportations chutent et le cours du pétrole s’envole.
A eux seuls, les transferts de fonds des MRE compensent le déficit commercial et permettent de dégager des excédents de devises ! D’ailleurs, ces excédents viennent s’ajouter aux recettes de privatisations drainées auprès d’investisseurs étrangers pour alimenter le matelas en devises du pays. Aujourd’hui, le total des réserves caracole à 132 milliards de DH et couvre plus de 10 mois d’importations. Le phénomène n’est pas propre au Maroc. La plupart des pays en développement bénéficient depuis le début de la décennie d’une forte expansion de ces transferts. Cependant, si ces fonds constituent une source de devises appréciable, leurs effets économiques demeurent mal connus et donc insuffisamment optimisés. Pourtant, l’enjeu est de taille car par leur volume, ils renforcent la position extérieure du pays et pèsent sur la liquidité du système bancaire domestique, tout en influençant les politiques monétaires et de change. Les banques sont conscientes de l’importance stratégique de la cible. A fin 2004, elle détenait 34% des dépôts à vue, soit plus de 44,5 milliards de DH. Quant à l’épargne drainée auprès des MRE, elle contribue pour près de 40% dans le total des dépôts à terme.
« Parmi les facteurs stimulant les transferts, la dépréciation de la monnaie du pays d’origine et les possibilités d’y acquérir des biens immobiliers notamment », explique Jacques Bougha-Hagbe, du département Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA) dans une étude consacrée aux déterminants des flux de transferts et leur évolution prévisible à long terme. A travers l’évolution des flux durant les 10 dernières années, l’expert effectue deux constats. D’une part, quand le PIB réel diminue, les envois de fonds augmentent. Il en est de même quand les salaires des travailleurs immigrés des pays d’accueil s’améliorent. « L’on peut en déduire que les MRE font preuve d’altruisme en ayant une volonté affirmée d’aider et de partager ». Cette tendance est-elle durable avec le départ en retraite des premières générations et la montée des jeunes ? L’expert relève aussi que les transferts augmentent au rythme des activités de construction. Aussi, l’acquisition de logement constitue-t-elle encore la priorité chez une large frange de cette population. « En revanche, ces capitaux ne se prêtent pas encore suffisamment à la diversification ».
Pour l’heure, rien n’indique, selon l’expert du FMI que ces transferts connaîtront un brusque ralentissement ou un retournement de tendance. Ces derniers continueront à jouer un rôle vital au niveau des réserves. Mais pour pérenniser ces transferts, il faut mettre en place une stratégie pour attirer les compétences des jeunes générations hautement qualifiées et plus enclines à réaliser des investissements productifs. Pour cela, il est vivement recommandé d’accélérer la réforme économique et diversifier l’allocation de ces flux. Sur ces registres, et contrairement aux pays comparables, le Maroc accuse du retard.
Comment maximiser ces transferts ?
• Réduire les frais de transaction, supprimer les obstacles à l’entrée et lancer une campagne d’information sur les techniques de transfert de fonds.
• Appliquer des politiques macroéconomiques et de change adéquates. L’instabilité des politiques macroéconomiques et la surévaluation de la monnaie des pays bénéficiaires peuvent aussi décourager les envois de fonds.
• Amener les banques et les institutions de la microfinance à s’impliquer davantage dans le marché du transfert des fonds.
• Etre vigilant mais sans tomber dans l’excès : minimiser les risques de blanchiment et de financement du terrorisme en mettant à niveau la réglementation qui s’applique aux prestataires de services. Cependant, il faut en réduire l’impact négatif sur le coût des envois de fonds et les incitations mises en place.
Mouna KABLY - L’Economiste
Ces articles devraient vous intéresser :