Sur le volet retraite, Barki a été clair : l’enjeu premier est d’assurer la pérennité des régimes. Le constat n’est pas nouveau : les premiers déficits sont attendus dans 7 à 8 ans et la dette implicite dépasse le PIB !
Les scénarios de la réforme sont connus et feront l’objet d’une ultime étude. La commission nationale sur les retraites devra donc jouer aux équilibristes : des taux de cotisation plus importants, un âge de départ à la retraite plus avancé et des systèmes moins généreux. Autrement dit, la réforme ne peut être que paramétrique. Elle devra tenir compte de la capacité de cotisation des salariés, des charges des entreprises et de l’Etat et du revenu de remplacement à servir.
L’âge de départ à la retraite sera certainement décalé de quelques années, l’espérance de vie étant de 74 ans contre 68 ans auparavant. Les simulations de la DAPS ont montré qu’un départ à la retraite à 65 ans permettaient aux régimes de retraite de gagner 4 années.« Techniquement la mesure est solide, elle a un effet secondaire sur l’emploi mais c’est l’économie qui crée de l’emploi », précise le directeur des assurances et de la prévoyance sociale. Il affirme aussi qu’il faut évoluer vers une caisse unique pour plus de solidarité, d’équité et pour faire jouer la loi du grand nombre.
L’extension de la retraite figure aussi parmi les priorités. Actuellement seul le quart de la population est couvert, soit 1,7 million de personnes dans le secteur public contre 1,5 million pour le privé. Il reste donc 7,4 millions de personnes à couvrir. A elle seule, la CNSS devra s’attaquer à la couverture d’un million de personnes : 330.000 salariés dans l’agriculture, un secteur qui « méconnaît » la couverture sociale et 670.000 dans les autres activités.
Chez les indépendants, 3,5 millions de personnes devraient être couvertes. « Elles peuvent disposer d’un revenu leur permettant d’intégrer un système contributif. De plus, cette population pourrait dégager 11,5 milliards de dirhams », soutient Barki.
Pour le reste, soit 2,9 millions de personnes, des mécanismes de financement devraient être mis en place. « Il faut les intégrer en fonction des possibilités que l’Etat mettra en place dans le cadre de filets sociaux », estime Barki.
Autre dossier sur lequel s’est attardé le directeur des assurances, la couverture médicale. L’AMO assure déjà 30% de la population. Pour les indépendants, le gouvernement a mis en place tout un package, de quoi couvrir également 30% de la population. Quant au Ramed, il vise 8,5 millions de personnes. Ce dernier « produit » devrait être bientôt lancé. Il a été retardé par les élections. « Nous sommes au stade de la mise en place d’une procédure d’identification des ménages éligibles », révéle Barki. Celle-ci sera assurée par des commissions régionales, un moyen d’éviter les dérapages et le « monopole » des moqaddems. Et le tout sera chapeauté par une commission nationale. Une participation de 100 dirhams par an et par famille sera exigée des catégories disposant d’un certain « revenu » à déterminer selon un certain nombre de critères : le revenu déclaré par le ménage sera corrigé en fonction de certains « signes » tels que la possession d’un poste télé, d’un frigo ou encore la note d’électricité.
Par rapport à la couverture médicale, l’enjeu reste la viabilisation et la pérennisation du système. L’amélioration du panier de soins n’étant pas envisageable. « Elle le serait difficilement », commente le directeur des assurances.
La pérennité du système passera nécessairement par la révision du taux de contribution surtout que la croissance des coûts des prestations est supérieure à celle des revenus. Le recours au prélèvement fiscal est déconseillé. « En cas de prélèvement fiscal, on ne maîtrise rien et il existe des risques de dérapage », concède le directeur de la DAPS.
33% du PIB de réserves
• Les cotisations des différents régimes de couverture médicale au système de santé est de 11 milliards de dirhams : 2,6 milliards de dirhams pour le Ramed (une partie sera à la charge des familles et le reste sera financé par l’Etat et les collectivités locales) , 2,8 milliards de dirhams pour la couverture privée, 1,2 milliard de dirhams pour le public et 4,5 milliards de dirhams pour les indépendants. Quant aux dépenses en soins de santé, elles représentent 5% du PIB, soit 22 milliards de dirhams. Elles sont financées à hauteur de 50% par l’assurance maladie.
• Le ratio de dépendance (le nombre de personnes de plus de 60 ans par rapport à la population active) actuellement de 15% passera à 20% en 2020 et à 25% en 2030. Les cotisations retraite représentent 5% du PIB alors que les prestations sont à 4,5%. Quant aux réserves constituées, elles représentent 33% du PIB.
• Le taux de cotisation d’équilibre à la Caisse marocaine de retraite (CMR) est de 31%, contre de 20% du salaire brut actuellement. Au niveau de la CNSS, le taux d’équilibre est de 22% du salaire brut. Le taux de cotisation en vigueur est de 11,89%.
L’Economiste - K. M.