Maroc : les ravages du mariage sur reconnaissance de dette

21 juillet 2022 - 14h20 - Maroc - Ecrit par : G.A

Une forme de mariage peu médiatisée est en train de prendre de l’ampleur dans certaines régions du Maroc, selon une émission diffusée sur la chaîne Al Aoula. Il s’agit du mariage sur reconnaissance des dettes.

Ce type d’union qui reste à tout de point vue une autre façon déguisée de promouvoir le mariage des mineures a fait l’objet d’un débat dans l’émission 45 minutes de la chaîne Al Aoula. Aussi surprenante que cela puisse paraître, il s’agit d’un mariage contracté suite à une reconnaissance de dettes signée entre le père de la future épouse et le futur mari. Cette forme de mariage n’est pas encore très connue, mais il est fréquent dans le milieu rural. « Environ 12 000 mariages de mineures sont encore recensés chaque année au Maroc, parmi lesquels un nombre difficile à recenser de mariages par contrat », révèle à Medias24, Yassine Omari, le présentateur de l’émission.

À lire : Les mariages de mineures toujours aussi nombreux au Maroc

Selon la militante Hafida Chahra, coordonnatrice de l’association des jeunes avocats de Khémisset, également présente dans l’émission, « le montant du mariage par contrat de reconnaissance de dette n’est pas standard. En cas de divorce, le mari doit rembourser au père de la mariée, le montant de cette dette ». Très répandu dans les zones d’Oulmès et Tiddas, le phénomène s’expliquerait par des raisons d’ordre social, selon les intervenants. « Ils ont réussi à faire croire aux mineures qu’une fille doit se marier avant d’atteindre les 18 ou 20 ans ».

À lire :Plus de 100.000 mineures sont mariées au Maroc, parfois dès 12 ans

Des témoignages recueillis sous couvert d’anonymat de femmes ayant accepté le mariage par reconnaissance de dettes sont légion. « Nous vivons modestement quand mon père a décidé que je vais me marier. Notre situation l’y a certainement poussé », confie l’une des victimes. Elles sont nombreuses à vivre en silence ce drame, par peur du scandale et des maltraitances. Selon leurs témoignages, elles sont victimes de maltraitances physiques, morales ou tout simplement abandonnées quelque temps après le mariage. « Mon père a décidé que je devais me marier avec un homme du village après avoir signé un contrat de 40 000 dirhams. Mais quelques mois après, mon mari m’a abandonnée pour émigrer vers l’Italie », confie une des victimes.

À lire : Le mariage des mineures : une violence physique et sexuelle

Bien que ce type de mariage n’ait aucune valeur juridique, il échappe à tout contrôle et continue de faire le malheur de nombreuses jeunes filles. Mais fort heureusement,« les autorités ont pris le problème au sérieux et cherchent déjà les voies et moyens pour mettre un terme au mariage des mineures » qui est une violation flagrante des droits des enfants.

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Droits et Justice - Famille - Mariage forcé - Jeunesse

Aller plus loin

Les mariages de mineures toujours aussi nombreux au Maroc

Le mariage des mineures prend de l’ampleur au Maroc. Au vu de l’augmentation des demandes d’autorisation pour ces unions dans les tribunaux, le procureur général du Roi près la...

Plus de 100.000 mineures sont mariées au Maroc, parfois dès 12 ans

Dévoilés mardi en conférence de presse, les premiers résultats du recensement de la population qui s’est déroulé du 1er au 20 septembre 2014 donnent quelques informations sur le...

Au Maroc, le Covid-19 aggrave le phénomène des mariages d’enfants

Luis Mora, représentant du Fonds des Nations unies pour la population (FNUAP) au Maroc affirme que la pandémie de Covid-19 a donné lieu à de nombreux mariages d’enfants...

Le mariage des mineures : une violence physique et sexuelle

La mise en place d’un cadre légal de répression est plus que jamais nécessaire pour mettre fin au phénomène du mariage des mineures qui prend de l’ampleur au Maroc. C’est la...

Ces articles devraient vous intéresser :

Vers une révolution des droits des femmes au Maroc ?

Le gouvernement marocain s’apprête à modifier le Code de la famille ou Moudawana pour promouvoir une égalité entre l’homme et la femme et davantage garantir les droits des femmes et des enfants.

Affaire "Hamza Mon Bébé" : Dounia Batma présente de nouvelles preuves

La chanteuse marocaine Dounia Batma confie avoir présenté de nouveaux documents à la justice susceptibles de changer le verdict en sa faveur.

Un député marocain poursuivi pour débauche

Le député Yassine Radi, membre du parti de l’Union constitutionnelle (UC), son ami homme d’affaires, deux jeunes femmes et un gardien comparaissent devant la Chambre criminelle du tribunal de Rabat.

Prison : le Maroc explore les « jour-amendes »

L’introduction du système de jour-amende dans le cadre des peines alternatives pourrait devenir une réalité au Maroc. Une loi devrait être bientôt votée dans ce sens.

Une famille marocaine au tribunal de Beauvais pour un mariage blanc

Une famille marocaine est jugée devant le tribunal de Beauvais pour association de malfaiteurs dans le but d’organiser un mariage blanc. Le verdict est attendu le 12 janvier 2023.

Concours d’avocat : profond désaccord au sein de la profession

La polémique liée au concours d’accès à la profession d’avocat a fini par diviser le corps des avocats, dont certains défendent le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, et son département contre tout « favoritisme » tandis que d’autres appellent à...

Un agriculteur espagnol attaque la famille royale marocaine

Le Tribunal de l’Union européenne a entendu mardi les arguments de l’entreprise Eurosemillas, spécialisée dans la production de semences sélectionnées, qui demande l’annulation de la protection communautaire des obtentions végétales pour la variété...

La justice confirme l’amende de 2,5 milliards de dirhams contre Maroc Telecom

Le recours de Maroc Telecomcontre la liquidation de l’astreinte imposée par l’agence nationale de régulation des télécommunications (ANRT), a été rejeté par la cour d’appel de Rabat.

Maroc : révocation en vue des députés poursuivis par la justice

Les députés poursuivis par la justice pour détournement ou dilapidation de fonds au Maroc pourraient être déchus de leurs mandats. La Chambre des représentants s’apprête à voter des amendements dans ce sens.

Maroc : un ministre veut des toilettes pour femmes dans les tribunaux

Le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, s’est indigné face à l’absence de toilettes pour les femmes dans les tribunaux, ce qui selon lui constitue un « véritable problème » pour les détenues.