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Au Maroc, la mendicité s’est propagée sur les réseaux sociaux notamment Facebook pendant le ramadan. Le phénomène interroge.
Mères seules, enfants malades, familles démunies, associations de bienfaisance… Nombreux sont les profils qui demande l’aumône pendant le ramadan à travers des publications sur les réseaux sociaux. Certains demandent la « Zakat », des paniers alimentaires ou prétendent être des ONG œuvrant pour les plus démunis dans des zones reculées, tandis que d’autres ont de gros yeux : ils lancent des appels pour financer des « Omras » ou pour collecter de fortes sommes d’argent pour financer des opérations chirurgicales ou des traitements coûteux.
La mendicité en ligne prend ainsi de l’ampleur pendant le ramadan. Le phénomène interroge. Fouad Yakoubi, psychologue social et secrétaire général de l’Organisation nationale de soutien et d’autonomisation psychosociale, estime que l’émotion et l’empathie sont exploitées de manière subtile et redoutablement efficace, notamment à travers l’utilisation d’images poignantes qui touchent directement l’inconscient. « Les visuels sont choisis avec soin, ce qui déclenche une réponse émotionnelle immédiate, liée à l’empathie humaine, où la souffrance d’autrui réveille un besoin instinctif d’aider. […] L’impact visuel agit directement sur l’inconscient, coupant court à toute réflexion rationnelle et alimentant une impulsion d’action immédiate », explique-t-il.
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Yakoubi assure que l’essor de la mendicité en ligne pendant le mois du Ramadan résulte d’une combinaison de facteurs sociaux (la générosité, une valeur centrale), économiques (l’inflation galopante et les conséquences de la pandémie de Covid-19) et technologiques (l’omniprésence des réseaux sociaux). Ces éléments rendent cette forme de sollicitation plus accessible, visible et souvent plus efficace que les méthodes traditionnelles directes, précise-t-il. Comment venir à bout de ce phénomène ? L’expert préconise la sensibilisation de la population aux dangers de la mendicité en ligne, notamment à travers des campagnes de sensibilisation. « Il faut aussi penser à encourager les dons uniquement via des plateformes sécurisées et reconnues et d’inciter à vérifier la véracité des demandes d’aide », suggère-t-il.
Pour Yakoubi, il s’avère nécessaire de durcir les lois pour faire face à ce phénomène et protéger les citoyens. Le Ramadan devrait être l’occasion de renforcer les liens de solidarité véritable, pas de favoriser les impostures, insiste-t-il.
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Le phénomène prend de l’ampleur alors qu’il est puni par le Code pénal marocain. « La mendicité est un phénomène ancien. Avec l’avènement des réseaux sociaux et leur capacité à toucher un nombre significatif de personnes en un temps record, le phénomène de la mendicité dite électronique cause des dommages plus importants et touche une population plus exposée à ces dérives, facilement manipulable. La législation marocaine criminalise la mendicité classique », fait savoir Mehdi Fodda, avocat au barreau de Casablanca dans un entretien avec Le Matin.
Selon les articles 326-333 du Code pénal marocain, la mendicité est punie de 3 mois à 3 ans si le mendiant utilise une arme ou d’autres moyens propres à commettre des crimes ou délits. Pour Fodda, il est nécessaire de revoir la législation en raison de l’évolution des réseaux sociaux et de l’ampleur grandissante du phénomène. « Les réseaux sociaux et l’avènement de l’IA donnent au phénomène de la mendicité en ligne une longueur d’avance sur l’évolution du droit et de son adaptation à la réalité. Nonobstant le dispositif actuel au Maroc, il est important de mettre à jour la législation pour qu’elle soit en phase avec les exigences du monde des réseaux sociaux et du digital, afin de limiter les impacts néfastes de ces pratiques », assure-t-il.
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L’homme de droit suggère en outre de mettre en place des services spécialisés ainsi que des moyens techniques et humains pour traquer, suivre et réprimer les délinquants. Il exhorte les citoyens qui détectent des agissements suspects, à signaler les pages ou les annonceurs afin de limiter la propagation de ces pratiques illégales.
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