L’écart entre les deux reste visiblement énorme. La scolarisation des filles rencontre de multiples contraintes et non des moindres. C’est que généralement, les ruraux restent réticents quant à la scolarisation de leurs filles de sorte que le plus grand obstacle demeure lié aux mentalités. D’autant plus que pour eux, l’école est une notion étrangère à leurs coutumes et traditions. Il s’agit donc d’un fléau qui confine les filles dans l’ignorance et la soumission. Il participe également à retarder l’évolution, réduire le champ d’égalité des chances et à mettre en place une citoyenneté féminine marocaine passive. Ce qui constitue un handicap pour l’intégration de la femme dans la société. Au milieu rural, la conception qu’on se fait de la femme n’est pas du reste sans contribution à l’existence de cette réalité amère. Il semble très clair que, d’après maints témoignages que la femme, vivant dans la campagne, n’a qu’une seule et ultime fonction dans la vie : donner naissance à des enfants et assurer leur éducation.
Assurer la scolarisation des jeunes filles, surtout en milieu rural, est une problématique qui nécessite l’engagement de la société civile ainsi que la multiplicité des initiatives mises en oeuvres par les divers organismes. En matière d’éducation, il serait au préalable de répondre aux besoins des filles qui ne bénéficient pas des mêmes chances que les garçons. Pour cela, une campagne d’aide à la scolarisation des jeunes filles en milieu rural est à mettre à l’actif du Comité de soutien à la scolarisation des jeunes filles rurales (CSSF). Implantée dans les campagnes, cette organisation leur favorise l’accès à l’enseignement. Les fillettes vivant dans des villages sont de fait entièrement isolées.
A une cinquantaine, et parfois à une centaine de kilomètres se situe l’établissement le plus proche. Une raison suffisante pour que le CSSF se mobilise et fédère ses efforts dans le but de construire des internats pour héberger les jeunes filles à proximité des établissements scolaires. Ce projet ne peut que favoriser l’émancipation et la liberté des filles au Maroc. Depuis, les jeunes filles deviennent de plus en plus nombreuses à demander une bourse pour réussir tout en déployant une énergie formidable. Et afin de permettre à un maximum de filles des campagnes de poursuivre leur scolarité, l’organisation Ni Putes Ni Soumises (NPNS) a décidé de parrainer les différents centres du CSSF et collecter des dons et des aides au profit de ces filles. « Il ne faut que 1000 euros pour permettre à une fillette d’aller à l’école pendant trois ans », affirme une membre de NPNS.
Indubitablement, c’est un exemple probant dans ce domaine, mais qui n’est pas le seul à retenir. Afin de lutter contre l’abandon scolaire et de déperdition des filles enregistrées au niveau des collèges, le projet AREF de l’USAID octroie des bourses à des jeunes filles en milieu rural sous forme de subventions à des ONG. C’est ainsi qu’en 2005-2006, 80 filles ont bénéficié de l’hébergement dans quatre foyers : Tighassaine province de Kénitra, Beni-Tajjit (Figuig), Beni-Battou (Khouribga), Tinjdad (Errachidia). Ces foyers sont conçus pour la poursuite de leur scolarité.
Ainsi, AREF et ses associations partenaires accordent une importance à la mise en place d’un environnement favorisant l’épanouissement personnel des filles, en faisant appel à diverses stratégies d’appui et renforçant leur autonomie et leur capacité d’organisation dans leurs travaux scolaires.Dans le cadre de la politique de proximité, de décentralisation et de déconcentration du département de l’Education et de la Formation, le ministère de tutelle a réalisé des acquis très importants à travers la création des Académies régionales et l’adoption de la Charte nationale de l’éducation et de la formation. Les résultats s’avèrent très positifs et l’AREF Oued-Addahaab-Lagouira en est un exemple parfait. En fait, en 2006-2007, en milieu rural, le nombre d’enfants scolarisés a atteint 136 dont 63 filles soit une augmentation de 16%.
De même, on retient que parmi les 1672 élèves inscrits, les filles totalisent 774. D’autre part, pour sensibiliser le public à la nécessité de scolariser les filles, les médias peuvent jouer un rôle très significatif en diffusant des spots à la radio, et à la télévision. Il s’agit surtout de faire connaître le travail des différentes écoles et celui des organismes associatifs et tirer les leçons des expériences similaires réalisées dans d’autres pays au niveau de la promotion de la scolarisation des filles rurales. A ce niveau, une telle réaction positive sera susceptible de porter des messages sur l’importance de l’éducation des filles.
Libération - Ayoub Akil