
Cannabis et cocaïne : un trafic depuis le Maroc jugé à Châteauroux
Plusieurs individus accusés dans une affaire de trafic de drogues qui serait dirigé du Maroc ont été condamnés jusqu’à deux ans de prison en France.
De premier pays producteur et exportateur de cannabis au monde devant l’Afghanistan à pays de transit de la cocaïne, pays d’origine d’une part importante des mafias de la drogue, le Maroc est devenu, au fil du temps, une base de repli pour les trafiquants. En cause, « une partie de l’élite politique et administrative marocaine (qui) est impliquée dans le trafic de drogues ».
« Si le cannabis marocain arrive si aisément en France, c’est dans une vaste mesure parce que Paris et Rabat ont des intérêts géopolitiques communs, dont la préservation se fait au détriment de la lutte contre le trafic », analyse Fabrice Rizzoli, politologue et spécialiste de la grande criminalité, dans son article « La France au cœur des trafics de drogue : un regard géopolitique ». Il pointe du doigt l’élite politique et administrative marocaine : « […] D’une part, une partie de l’élite politique et administrative marocaine est impliquée dans le trafic de drogue à travers des schémas de corruption ; mais, d’autre part, le Maroc est un allié important de la France dans la lutte contre le djihadisme en Afrique du Nord et dans la lutte contre l’immigration clandestine. C’est pourquoi […] le trafic de cannabis perdure ».
En décembre 2023, le Malien El Hadj Ahmed Ben Ibrahim, célèbre trafiquant de drogues, connu sous le nom « d’Escobar du désert », a fait tomber Saïd Naciri, président du club de Wydad, ainsi qu’Abdenbi Bioui, président de la région de l’Oriental. Ces deux personnalités marocaines sont poursuivies pour leur implication dans l’exportation de cannabis. D’origine marocaine par sa mère, le Malien, lui, est connu pour avoir fait venir de la cocaïne en Afrique de l’Ouest. Il est incarcéré à la prison locale d’Ain Sebaâ.
À lire : « L’Escobar du désert » fait tomber Saïd Naciri et Abdenbi Bioui
Selon Florian Manet, ancien directeur de la section de recherches de la gendarmerie maritime française, les trafics de cannabis et de cocaïne au Maroc perdurent également sous l’effet de leur « maritimisation ». La drogue est dissimulée dans les containers. « Quand vous avez un porte-conteneurs de 20 000 EVP (unités de 6 mètres de long, Ndlr), comment parvenir à contrôler en peu de temps, une telle masse ? Si un magistrat décide de maintenir au port l’un de ces navires, le temps d’une inspection, qui paiera les compensations financières colossales ? », interroge le spécialiste de la grande criminalité, Rizzoli.
Les « marchandises » passent par le port de Tanger Med, situé dans le détroit de Gibraltar, et connu pour accueillir des flux de marchandises en provenance de toutes les régions du monde qui éclatent en flux secondaires difficilement traçables. Plus de 10 millions de conteneurs EVP sont passés par Tanger Med en 2024 (18,8 % de plus qu’en 2023), ce qui fait de lui le premier de Méditerranée, devant Algésiras (Espagne). Malheureusement, les trafics de drogue et de cocaïne ne sont pas près de s’arrêter. « L’intention de construire un nouveau port, dans l’esprit de Tanger Med, sur la côte Atlantique à Dakhla pourrait démultiplier le problème et accroître encore la place du Maroc dans le trafic de drogue mondial », constate Manet.
Aller plus loin
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