L’affaire Rachid M’Barki du nom de l’ex-présentateur franco-marocain du journal de la nuit de BFMTV, mis en examen pour « corruption passive » et « abus de confiance » n’a pas fini de livrer tous ses secrets.
Encore une mesure contre la corruption. Ce mal insidieux qui ronge notre société. Il s’agit de la mise en place d’une instance de prévention. Celle-ci, annoncée il y a près de 6 mois, sera lancée dans les semaines à venir, selon les propos du ministre chargé de la Modernisation des secteurs publics, Mohamed Abbou. Cette instance, dépendante de la Primature, aura pour mission de superviser et d’assurer le suivi de la mise en oeuvre des politiques de prévention de la corruption. Elle assurera aussi la diffusion d’informations dans le domaine. Elle aura en outre la possibilité de proposer au gouvernement des orientations en matière de politique de prévention ou des mesures de sensibilisation de l’opinion publique.
D’après le ministre, la nouvelle instance représentera le Maroc durant la prochaine conférence des Nations unies en janvier 2008, destinée à dresser le bilan de la lutte contre la corruption, dans les différents pays signataires de la convention de 2003.
Le Maroc fait partie des pays où la corruption est très répandue. Chiffre à l’appui, sur les 180 pays classés par Transparency International (TI) en 2007, le Royaume occupe la 72e place. Alors qu’il occupait la 45e place en 1999. Pourquoi une telle dégringolade dans le classement, malgré tous les efforts de communication sur ce fléau, ainsi que l’ensemble des mesures qui ont été mises en place ?
D’après Azeddine Akesbi, secrétaire général de Transparency Maroc, ceci est notamment dû au manque d’actions concrètes sur le terrain. Selon lui, « on se lance dans les discours, mais finalement on donne le temps au temps ». Alors que des actions rapides doivent être engagées. « La corruption a un impact négatif sur la confiance des investisseurs ainsi que celle de toute la société », estime-t-il. Par exemple, la convention des Nations unies contre la corruption signée en 2003 n’a été reconnue par le Maroc qu’en 2007. De son côté, l’instance contre la prévention tarde à être mise en place, d’autant plus « qu’elle ne dispose ni d’autonomie ni de moyens adéquats à son fonctionnement », relève Akesbi.
En 2006, le Maroc occupait la 79e place du classement. Pour certains, les places gagnées en 2007 représentent un signe d’amélioration, mais pour d’autres ce n’est qu’un leurre. « Le classement du Maroc s’est amélioré en 2007 parce que de nouveaux pays, pires que le nôtre, ont été ajoutés. De 160 pays classés, TI est passée à 180 », déclare Akesbi. « La note du Royaume est quant à elle passée de 3,2 à 3,5. Une amélioration de 0,3 point est marginale. Nous sommes toujours dans la zone rouge de la corruption », ajoute-t-il. Une enquête menée par le baromètre de la corruption de TI en 2006 a révélé que 60% des ménages marocains reconnaissent avoir eu recours à la corruption. L’enquête a aussi révélé que 4 domaines sont particulièrement touchés par le phénomène. A savoir la justice, la santé, la police et les services publics. Que des domaines, dont le respect est essentiel au sein d’une société ! Les exemples ne manquent pas. Les innocents doivent souvent payer pour garantir leur acquittement, même si toutes les preuves sont de leur côté.
Les malades doivent aussi payer pour être bien traités, ou même avoir droit à des médicaments « gratuits ». Et pour un service public le citoyen doit souvent mettre la main à la poche pour être servi « normalement ». Sans parler des pots-de-vin nécessaires pour remporter un appel d’offres public. Les contrôles d’identité abusifs sont également à déplorer. Nombreux sont les policiers qui procèdent à des contrôles à tort et à travers, dans le but de tomber sur des « sources de revenus ». Tout le monde se souvient de la vidéo amateur sur Youtube, qui a révélé au grand jour les trafics de certains barrages de police.
Pléthore de textes
Nombreuses sont les mesures qui ont été prises pour venir à bout de la corruption. Mais les résultats tardent à se concrétiser. En 2006, un plan d’action gouvernemental de lutte contre la corruption a été présenté au gouvernement. Plusieurs textes de lois ont par ailleurs été adoptés. Dont ceux relatifs à la concession et la gestion déléguée des services publics, au blanchiment d’argent ou à la carte d’identité électronique, qui tiendra lieu d’extrait d’acte de naissance, d’attestation de résidence, de certificat de vie et d’attestation de nationalité. D’autres sont en cours d’adoption, comme celui sur la déclaration du patrimoine, ou celui modifiant et complétant la fonction publique.
Classement
Dans le classement de Transparency International, le Danemark est le mieux classé, avec une note de 9,4 suivi de la Finlande. La France occupe la 19e place, suivie des Etats-Unis. Le Qatar et les Emirats arabes unis sont les pays arabes les mieux classés. Ils occupent successivement la 32e et la 34e place. La Tunisie est classée 61e, l’Algérie 99e, l’Egypte 105e. La Somalie est le pays le plus corrompu.
L’Economiste - Ahlam Nazih
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