Des dizaines de milliers de propriétaires de résidences secondaires au Maroc ont reçu des notifications fiscales de la Trésorerie générale du Royaume, réclamant le paiement d’arriérés de taxe d’habitation et de taxe de propreté.
Une petite bombe à retardement menace directement les promoteurs qui ont conclu des conventions d’investissement avec l’Etat et qui, pour diverses raisons objectives, ont obtenu la prorogation du délai de réalisation de leur projet par la Commission interministérielle. Pour rappel, à partir de 200 millions de dirhams, le promoteur peut obtenir un régime fiscal dérogatoire à travers une convention avec l’Etat.
La plupart des aménageurs des stations du plan Azur, et dans le tourisme en général, sont aujourd’hui dans ce schéma, la majorité ayant sollicité et obtenu une rallonge du délai de réalisation de leur programme. Pour l’instant, tous disent ne pas être concernés. Le réveil pourrait être pourtant douloureux. La législation qui traite du régime conventionnel est on ne peut plus claire : « L’investissement doit être réalisé dans les trente-six mois à compter du début de l’activité », une notion que nombre d’experts ramènent à la date du premier acte d’approvisionnement. L’interprétation de cette clause ne fait toujours pas l’unanimité d’ailleurs.
Mais là n’est pas le problème, fait remarquer un spécialiste des questions fiscales. Tous les opérateurs qui se sont vu accorder des délais supplémentaires par décision de la Commission interministérielle pourraient se retrouver dans le futur coincés par un conflit sur la hiérarchie des textes. Le fait que le gouvernement ait décidé de leur proroger le délai de réalisation de leur projet ne signifie pas juridiquement que l’investisseur est en mesure de prétendre aux avantages concédés dans la convention. En principe, un texte de loi ne peut être modifié que par un autre texte législatif. Par conséquent, les services fiscaux ou douaniers peuvent, à tout moment, considérer qu’au-delà de trois ans, un promoteur, malgré la dérogation sur le dépassement des délais de réalisation, a perdu le bénéfice des incitations prévues par le régime conventionnel sur les investissements.
La bagarre d’experts ne fait que commencer. Il y a de fortes chances que le problème soit posé demain jeudi à Casablanca au cours de la rencontre annuelle entre l’Ordre des experts-comptables et les équipes de la Direction générale des impôts. Il faut espérer que les responsables du fisc apportent une première clarification sur cette question.
Cette confrontation des textes n’est pas sans rappeler la situation des écoles privées qui, pendant des années, étaient perdues entre une circulaire du Premier ministre ordonnant la suspension du recouvrement de l’impôt, et la volonté de l’administration fiscale d’appliquer la loi.
Par ailleurs, une minuscule disposition de la loi de Finances 2008, qui porte sur l’exonération de la TVA sur les biens d’équipement acquis dans le cadre du régime conventionnel, pourrait être au centre d’une nouvelle controverse. Cette exonération fait en effet partie du paquet d’avantages concédés aux opérations d’investissement à partir de 200 millions de dirhams. Avant le 1er janvier 2008, l’exemption de la taxe sur la valeur ajoutée des biens d’équipement était sans limitation dans le temps pour les opérations relevant du régime dérogatoire des conventions. Par souci d’harmonisation -c’est ainsi que la mesure est présentée- le législateur a décidé de limiter cet avantage à 36 mois. Cela pourrait créer un biais concurrentiel entre ceux qui ont conclu avant 2008 et les autres. Avec ou sans convention, cette exonération est plafonnée à 24 mois.
Extraits des avantages
Les entreprises qui s’engagent à réaliser un investissement supérieur ou égal à 200 millions de dirhams peuvent bénéficier, dans le cadre de convention à conclure avec le gouvernement, de l’exonération du droit d’importation et de la taxe sur la valeur ajoutée, applicables aux biens d’équipement, matériels et outillages nécessaires à la réalisation de leur projet et importés directement par ces entreprises ou pour leur compte.
Source : L’Economiste - Abashi Shamamba
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