Le jury populaire pour le meurtrier de Mohamed Achrak ? La chambre du conseil d’Anvers devrait décider ce lundi de l’internement de Constant Van Linden ou de son renvoi aux assises.
Rétroactes.
Vif émoi à la mi-novembre 2002 lorsque Dyab Abou Jahjah, chef de file de l’« Arab European League » (AEL), annonce que celle-ci formera des patrouilles destinées à surveiller l’activité de la police de la métropole flamande, qu’il dit raciste. Si cette déclaration se fait au grand dam des partis démocratiques, elle fait aussi de l’AEL un allié objectif du Vlaams Blok, car ils jouent tous deux l’agitation et la provocation.
C’est dans ce climat déjà en soi détestable que, plus terrible, le 26 novembre dans la banlieue anversoise de Borgerhout, était intervenu un singulier meurtre (ou un assassinat ? qui caractérise le second).
Constant Van Linden avait tiré plusieurs balles sur Mohamed Achrak, un professeur de religion islamique âgé de 27 ans. Le jeune homme, sans histoires, était simplement venu rendre visite à de la famille habitant le même immeuble que Van Linden, 66 ans.
Sans délai, les esprits s’étaient embrasés car Van Linden apparaissait à beaucoup comme un xénophobe endurci, même si le parquet avait tempéré en indiquant qu’il avait certes des antécédents judiciaires, mais aussi d’autres, psychiatriques.
C’est ainsi que des manifestations axées sur le thème du racisme avaient fait florès, dépassant la seule communauté marocaine et la ligue de Dyab Abou Jahjah en tête. Les incidents avaient été nombreux. C’est d’ailleurs à leur suite que le bouillant Anversois avait été interpellé dès le 28 novembre et placé le lendemain sous mandat d’arrêt sous les inculpations de rébellion en bande avec préméditation, entrave méchante à la circulation, déprédation de véhicules ainsi que coups volontaires à agent de la force publique.
Intervention politique
S’il avait rapidement été libéré par la chambre du conseil, sans appel du parquet, l’affaire avait manifestement une connotation politique puisqu’on avait appris que le ministre de la Justice, Marc Verwilghen, était intervenu.
Toujours est-il que dans les rues, la tension était retombée d’un coup. Son apparition était-elle été fondée ? Si Constant Van Linden était sain d’esprit au moment d’agir, donc s’il avait tué par effet d’un racisme véritable (il avait déjà tenu des propos de ce type), les manifestations agressives, même à condamner, auraient eu un pied dans la raison. En revanche, si comme le rapport psychiatrique du sexagénaire (mis en exergue par son avocat Me Kris Luyckx) l’indique, il a agi en fonction de tendances paranoïdes et schizophrènes, la mort de M.Achrak resterait aussi injuste, mais les échauffourées soutenues par l’AEL n’auraient eu d’autre fondement que l’exagération, au mieux, l’a priori, au pire.
Éléments d’appréciation : d’un côté, le Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme s’est constitué partie civile contre Constant Van Linden. De l’autre, nos confrères de la « Gazet van Antwerpen » écrivaient, le 29 novembre dernier, que Van Linden « harcelait la rédaction depuis des mois avec des lettres complètement folles et des histoires à tenir debout, des documents témoignant d’une incroyable démence ». Pour ces journalistes flamands, il paraissait quasi exclu que le meurtre ait été commis en raison de considérations racistes. Mais la décision de la chambre du conseil permettra de mieux tout mesurer.
La Libre Belgique, Belgique