Le Maroc a changé sa position sur les résolutions de l’ONU concernant la Russie. Alors qu’il n’avait pas participé le 2 mars 2022 au vote des sanctions contre ce pays qui avait attaqué l’Ukraine, il a voté jeudi, avec 140 autres pays, en faveur du retrait russe du territoire ukrainien. Le ministère marocain des Affaires étrangères avait déclaré suivre « avec inquiétude » l’évolution de cette « situation » qu’il qualifiait « d’escalade militaire ». Le 24 mars, le royaume n’a pas non plus voté une résolution demandant à la Russie de cesser les attaques, rappelle EFE.
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La réaction de l’Ukraine ne s’est pas fait attendre. Le président Volodimir Zelensky a rappelé le 2 avril son ambassadeur à Rabat, ce qui a amené le Maroc à voter en octobre en faveur d’une résolution condamnant l’annexion russe de quatre régions ukrainiennes. Ce même mois, l’Ukraine a nommé un nouvel ambassadeur à Rabat, qui n’a pas encore présenté ses lettres de créance. Le président du gouvernement espagnol, Pedro Sanchez, ou le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, ont condamné l’invasion russe en Ukraine lors de leurs récents déplacements à Rabat, au moment où leurs homologues marocains ont préféré ne pas se prononcer sur le sujet.
Pour l’historien Bernabé López, cette position changeante du Maroc est due au soutien de la Russie en sa faveur dans le conflit au Sahara. « La Russie a toujours été un soutien au Maroc. C’est pourquoi il ne veut pas se fâcher avec elle », explique López, qui rappelle que Moscou a le droit de veto au Conseil de sécurité de l’ONU. Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a échangé en février avec l’ambassadeur du Maroc à Moscou, après une tournée dans la région nord-africaine qui n’a pas inclus le Maroc. Le Sahara était au cœur de leurs discussions, ont indiqué des sources locales marocaines.
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« Le Maroc utilise la crise ukrainienne pour faire pression sur les puissances occidentales afin qu’elles adoptent une position plus claire sur le Sahara et soutiennent son initiative d’autonomie », estime pour sa part, Saïd Saddiki, analyste à l’Institut marocain d’analyse politique (MIPA), ajoutant que le Maroc « devra revoir sa position » si la crise perdure. Dans un tel contexte, il serait « difficile » pour le Maroc de maintenir cette neutralité et de continuer à « jouer à un jeu d’équilibre », précise Lopez. Et à Saddiki de conclure que le Maroc « veut rester au milieu ; il ne veut pas fâcher les Russes ni l’Ukraine. C’est difficile, mais il l’a fait jusqu’à présent ».