Les rumeurs et les campagnes de dénigrement visant les villes du Nord du Maroc sur les réseaux sociaux, portent préjudice à l’activité touristique dans cette région prisée par les touristes pendant la saison estivale.
Quels enjeux pour le tourisme national dans un contexte de crise financière ? A l’international, la conjoncture a été des plus critiques sur les 9 premiers mois de l’année. D’ailleurs, l’Organisation mondiale du tourisme (OMT) prévoit un ralentissement de la croissance du tourisme mondial, de l’ordre de 4,1% contre 7% pour les trois dernières années.
« Du coup, il serait naïf de croire que le tourisme national échappera aux aléas de la conjoncture internationale », prévient Mohamed Boussaïd, ministre de tutelle. C’était lors d’un débat organisé par la Chambre française du commerce et de l’industrie de Casablanca (CFCIM), jeudi dernier.
Selon le ministre, les premiers effets seront ressentis dès l’année prochaine : « 2009 s’annonce très difficile », dit-il. Et bien évidemment, les objectifs de la Vision 2010 n’échapperont pas aux « dommages collatéraux » de cette crise. L’ambition des 10 millions de touristes sera revue à la baisse. « Nous aurons autour de 9,3 millions de touristes à cette échéance », annonce Boussaïd.
En revanche, en termes de recettes, et c’est le plus important-, les objectifs seront au rendez-vous, rassure le ministre. Elles dépasseront de loin les prévisions. Au ministère, l’on table sur 527 milliards de DH contre les 480 milliards prévus initialement. Ce qui ne devrait pas gêner l’engagement du Maroc à consacrer 1% de la recette à la promotion, conformément à la norme internationale.
Par ailleurs, Boussaïd relativise son optimisme. En effet, des contraintes apparaissent. En premier, il fait référence au manque de diversification encore focalisée sur les marchés émetteurs classiques (France, Italie, Espagne, Allemagne, Belgique, Royaume-Uni, Pays-Bas). A eux seuls, ces 7 marchés représentent 80% des flux touristiques. Or, ce sont ces marchés-là qui sont touchés de plein fouet par la baisse du pouvoir d’achat, dont la conséquence immédiate se répercute sur le budget loisirs et voyages. Il n’empêche que Boussaïd persiste à investir dans ces marchés. D’ailleurs, la nouvelle campagne de promotion, lancée aujourd’hui lundi, cible particulièrement ces marchés-là.
Autres boulets, et non des moindres, les retards pris dans la politique de l’environnement touristique en général. « L’on n’a pas prêté suffisamment attention à la gouvernance locale », fustige Boussaïd. Il fait notamment allusion aux retards pris dans la requalification urbaine, problèmes de mobilité, qualité de l’hébergement, classement des établissements hôteliers, qualité de service...
Pour pallier la situation actuelle, toute une restructuration des métiers du tourisme est dans le pipe. D’ailleurs, la loi de Finances 2009 accorde un budget supplémentaire dédié à la formation et la mise à niveau des 17 écoles et institut de Tanger, sous tutelle. En outre, une nouvelle loi sur les guides, une étude sur le transport, une autre sur les agences de voyages ainsi que sur la qualité de l’hébergement... sont programmées.
Autant de chantiers à prendre en compte dans la Vison 2020, laquelle sera davantage qualitative. L’enjeu étant de rehausser les standards et focaliser l’approche autour de la notion du territoire. In fine, capter une demande régionale et mondiale en mutation. Le challenge est de faire du tourisme un vecteur de développement régional, en investissant davantage dans la « marque Maroc ».
La nouvelle donne économique mondiale appelle à plus de réalisme dans les ambitions. C’est le cas justement des nuitées, de la capacité litière et du poids économique dans le PIB. Seules 20 millions de nuitées seront réalisables à l’horizon 2010 contre les 50 millions prévues. Des 230.000 nouveaux lits annoncés, l’on n’aura finalement que quelque 200.000. Le ministre impute cette révision à la baisse à des « décalages et aux retards pris dans la vision du plan Azur ». Les retards pris dans certains chantiers des stations balnéaires y sont pour beaucoup. Le gap formation RH/demande y est aussi pour quelque chose.
« Mais le secteur peut rebondir. Les ressorts sont là », rassure Boussaïd pour qui « les fondamentaux sont solides ». Il en veut pour preuve la recette annuelle/touriste qui n’a jamais baissé depuis 2001. L’on est passé de 592 dollars à 990. Ce qui, selon le ministre, renseigne sur la qualité de l’offre Maroc. Par ailleurs, le volume des investissements est passé de 320 millions de dollars en 2002 à 1,29 milliard en 2007. Le besoin de voyager ne s’estompera jamais, estiment les professionnels. Les 900 millions de touristes enregistrés dans le monde en 2007 ne seront pas réduits à zéro. C’est plutôt le rythme des voyages qui pourrait baisser ou stagner, prédisent les experts.
A noter que de 2001 à 2007, la contribution directe au PIB dans les principaux marchés concurrents confère au Maroc un rang respectable.
Si dans le monde, cette contribution a été de 4,8% sur la même période, celle-ci a atteint 9,7% au Maroc (elle serait de seulement 3,3% par an sans la Vision 2010). Elle a été de 15,5 en Egypte, 12,2 en Turquie et de 4,3% en Tunisie.
Compte satellite !
La priorité des priorités aujourd’hui est de reconsidérer le système actuel des statistiques. L’enjeu est d’en finir avec le décrochage et le manque de corrélation entre arrivées/nuitées. Le nouvel outil « Compte satellite du tourisme » permettra d’approcher le secteur par la demande. Ailleurs, ce sont plutôt des enquêtes par échantillon qui font office de baromètre. Au Maroc, l’on se réfère encore au comptage des déclarations des fiches de police des frontières. Les professionnels peinent à s’accorder sur les statistiques qui pèchent par de grosses déperditions.
Source : L’Economiste - Amin Rboub & Bachir Thiam
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