Une troisième session de négociation qui a consisté essentiellement à mettre en forme et à mettre en cohérence tout ce qui a été négocié et engrangé par la partie marocaine dans les deux derniers rounds. L’idée étant d’en faire un rapport conjoint qui sera présenté officiellement aux ministres des Affaires étrangères lors du Conseil d’association Maroc/UE du 13 octobre à Luxembourg.
Certes, il n’y a pas accord sur toute la shopping list marocaine présentée le 16 mai dernier mais, souligne-t-on au sein de la délégation marocaine, « la plus grosse partie de nos demandes a été retenue par la partie européenne, notamment le renforcement du dialogue politique et institutionnel. Ce qui est le plus important aux yeux de l’équipe de Youssef Amrani, c’est qu’il y a une volonté de part et d’autre de multiplier les canaux de dialogue et cela à tous les niveaux. A commencer par un dialogue politique renforcé qui devrait par exemple rendre possible la participation de ministres marocains dans des réunions ministérielles européennes ad hoc (ce qui a déjà été possible lors de la récente réunion informelle des ministres européens des Transports à La Rochelle qui a accueilli une équipe ministérielle marocaine). La possibilité aussi pour nos excellences de se concerter avec leurs homologues européens au niveau des Nations-Unies ou encore de voir des experts marocains assister plus régulièrement à des réunions des différents groupes techniques du Conseil des ministres de l’UE. Sans compter la possibilité d’organiser tous les ans un Sommet Maroc/UE pour raffermir et approfondir les liens politiques entre les deux parties.
Pour ce qui est de la coopération économique, la partie marocaine a pu élargir le débat au niveau des grands chantiers économiques entrepris par le Maroc, notamment en ce qui concerne les infrastructures, l’énergie, les transports (aérien, terrestre, maritime et ferroviaire). Toutes les pistes ont été exploitées pour permettre au Maroc de renforcer sa position de pays de transit entre l’Afrique du Nord et l’Europe dans les domaines de l’énergie et des interconnexions (gaz et électricité). Les deux partenaires ont également décidé d’œuvrer plus résolument vers un accord de libre-échange approfondi et global (qui irait donc également dans le non-tarifaire). Pour pouvoir intégrer progressivement le marché intérieur européen, le Maroc devra reprendre à son compte nombre de normes et de standards européens et la partie européenne a proposé de l’accompagner en lui assurant une assistance technique appropriée.
Pour ce qui est de la participation du Maroc aux divers programmes et agences communautaires, il reste encore aux deux parties à conclure un accord-cadre pour permettre aux différents départements sectoriels marocains de pointer ceux et celles qui les intéressent ou plus exactement ceux et celles pour lesquels le Maroc est éligible. Car tous les programmes et agences européennes ne sont pas ouverts aux pays tiers à moins qu’ils ne soient candidats à l’adhésion. Si le Maroc pourra participer par exemple à l’Agence européenne de sécurité aérienne ou à « Eurojust » (lutte contre le crime organisé) ou encore au programme « Douanes 2013 », il ne pourra pas en revanche participer à l’Agence européenne des médicaments, au Fonds européen de développement régional (qui distribue pas mal d’argent pour les régions en retard de développement) et encore moins à l’Agence européenne des Droits fondamentaux (lutte contre les violations des droits de l’homme). Les deux parties doivent encore trouver un accord visant à établir la liste des agences et programmes communautaires prioritaires pour le Maroc. Il leur reste aussi à fixer les mesures d’accompagnement financier communautaire qui devraient aider le Maroc -mais au cas par cas- à obtenir son ticket d’entrée dans tel ou tel agence et programme communautaire. Un ticket d’entrée qui atteint parfois des sommes non négligeables.
Concernant les négociations des accords en cours, les deux parties ont affirmé leur volonté d’achever dans les prochains mois celles concernant l’agriculture et le règlement des différends commerciaux. Pour la libéralisation des services, les négociations bilatérales, entamées au début de 2008, devraient entrer dans les détails d’ici la fin de 2008.
Pour ce qui est de l’Accord sur les réadmissions, les débats sur ce point ont permis à la délégation marocaine de réaffirmer sa volonté de conclure un accord qui doit refléter nécessairement les intérêts des deux partenaires. Elle a expliqué qu’il s’agit là d’un sujet « très complexe et sensible » dans la mesure où il touche à la fois les domaines humain, politique, sécuritaire et du développement économique. La partie marocaine s’est évertuée à montrer tous les enjeux et défis pour le Maroc de conclure un tel accord qui implique non seulement des ressortissants marocains ou européens mais également des ressortissants de pays tiers.
Réfléchir à l’après-2013
Pour ce qui est de la coopération financière, la partie européenne a expliqué que le budget européen pour la période 2007-2013 est déjà fixé et que les marges de manœuvre sont extrêmement ténues pour pouvoir accéder aux demandes marocaines d’augmenter substantiellement les engagements financiers européens. Elle n’a pas souhaité trop s’avancer dans ce domaine en mettant en avant les incertitudes qui planeraient sur la période de l’après-2013. De son côté, le Maroc a plaidé pour un regain d’imagination de la part de l’UE pour « concrétiser les ambitions affichées dans le futur partenariat avancé Maroc/UE. Rabat a demandé également de réfléchir dès à présent à l’après-2013.
Mécanisme de suivi
Les deux parties vont maintenant procéder à la rédaction du rapport conjoint qui sera présenté le 13 octobre à Luxembourg lors du Conseil d’association Maroc/UE. Une fois que ce document aura été entériné par le Conseil des ministres des Affaires étrangères de l’UE, il sera procédé à la mise en œuvre des actions, projets et programmes de coopération retenus par les deux parties mais aussi par les autres institutions et organisations dans leurs domaines respectifs (Parlement européen/Chambre marocaine des représentants, Comité économique et social européen/Partie marocaine, etc.). La création d’un mécanisme de suivi conjoint des actions entreprises dans le cadre de la feuille de route du statut avancé est également envisagée. Un rapport d’étape conjoint serait dressé tous les ans pour évaluer le chemin parcouru et proposer d’éventuels ajustements.
Source : L’Economiste - Aziz Ben Marzouq