Depuis l’éclatement du scandale de corruption connu sous le nom de « Qatargate », les difficultés pour renvoyer les Marocains déboutés de leur demande d’asile vers leur pays d’origine se sont accrues.
A la grande satisfaction et même à la grande surprise de la partie marocaine, le partenaire européen a fait montre d’une écoute très positive sur la requête marocaine d’un dialogue politique renforcé entre le Maroc et l’UE, notamment au niveau institutionnel. En dehors des cadres classiques et formels de contact qui existent déjà (consultations politiques avec le Conseil des ministres, dialogue avec la Troïka européenne, etc..), il serait désormais possible que ministres et hauts fonctionnaires marocains puissent venir à Bruxelles discuter avec leurs homologues européens et donner leurs points de vue en fonction des agendas et de l’actualité.
L’initiative pourrait être prise par la présidence tournante de l’UE en marge d’une réunion ministérielle européenne qui porterait sur un thème d’intérêt commun au Maroc et à l’Europe. On peut par exemple imaginer un Aziz Akhennouch venir à Bruxelles expliquer les différents volets de son plan Vert aux ministres européens de l’agriculture, en marge d’une réunion autour du thème de « La Politique Agricole Commune et les échanges avec les pays tiers ». Ou encore un Chakib Benmoussa détailler aux ministres de l’Intérieur des 27 les attentes et les visions du Maroc sur un thème qui porterait par exemple sur la problématique de « L’immigration et le co-développement ».
Toujours en matière institutionnelle, la partie européenne a fait des « recommandations aux autres entités institutionnelles avec lesquelles le Maroc mériterait de développer une coopération plus renforcée (Parlement européen, Conseil économique et social de l’UE, Comité des régions de l’UE, Conseil de l’Europe, entre autres).
Sur le plan de la coopération en matière de sécurité, la partie européenne a également marqué son accord de principe pour que le Maroc puisse participer davantage et d’une manière plus structurée aux opérations de maintien de la paix de l’UE sur différents théâtres du monde. L’idée serait de négocier un accord-cadre PESD (Politique européenne de sécurité et de défense) avec le Maroc, accord qui fixerait les paramètres de participation de notre pays aux différentes opérations européennes à travers le monde et qui lui éviterait, à chaque fois, de renégocier les détails de sa participation à telle ou telle opération.
En matière de coopération économique, les deux parties ont convenu d’accélérer le rapprochement réglementaire et législatif entre le Maroc et l’UE en invitant tous les sous-comités créés au sein du Conseil d’association Maroc/UE à assurer un suivi plus régulier et plus dynamique des programmes de travail. Ceci afin de permettre au Maroc d’intégrer progressivement et systématiquement dans sa législation les différentes dispositions de l’acquis communautaire (ensemble des règlements et autres directives communautaires accumulées jusqu’à aujourd’hui). La coopération économique sectorielle sera également renforcée dans différents domaines tels que les transports, l’environnement, l’emploi, l’énergie, etc.).
Les détails des objectifs et des modalités de ce renforcement seront déterminés lors du 3e round de négociation en septembre prochain. L’idée étant de favoriser au maximum l’intégration du Maroc aux différents réseaux européens (réseaux Energie, Transports, Entreprises européennes, etc.) et de l’impliquer plus fortement dans les différentes politiques sectorielles de l’UE.
Pour ce qui est de la demande marocaine de faciliter l’obtention des visas et la délivrance des permis de travail en ce qui concerne l’immigration en général, la Commission européenne qui négocie au nom des 27, s’est montrée assez prudente sur les mécanismes à mettre en œuvre dans ces matières qui relèvent plus de la sphère des Etats membres de l’UE. Elle a une nouvelle fois mis en avant la pré-condition à remplir par le Maroc, à savoir la conclusion d’un accord sur la réadmission de ses nationaux en situation irrégulière en Europe, avant tout dialogue approfondi sur la question migratoire. Comme on le sait, la négociation d’un accord sur la réadmission est toujours en cours et bute toujours sur la question des clandestins non nationaux qui transitent par le Maroc pour se rendre en Europe. Le Maroc n’accepte de reprendre que les nationaux alors que l’UE voudrait le contraire.
En revanche, la partie européenne a réservé une réponse plutôt positive aux demandes marocaines de faciliter les déplacements de catégories spécifiques de personnes marocaines (étudiants, chercheurs, hommes d’affaires) souhaitant se rendre en Europe pour différentes raisons. Jusqu’à présent, il n’existe qu’un cadre unique de gestion des visas. La Commission a indiqué qu’elle allait s’efforcer de trouver une formule adéquate pour rendre plus fluides les mouvements de ces catégories spécifiques de citoyens marocains tout en s’assurant qu’il n’y ait pas d’immigration clandestine derrière ces facilités.
Les deux parties ont convenu qu’en ce qui concerne la demande du Maroc de participer aux travaux des différentes agences et programmes communautaires, il fallait d’abord se mettre d’accord sur une première liste commune prioritaire. L’idée étant de lister dans un premier temps quelques agences et programmes communautaires prioritaires, lesquels devront faire l’objet d’un accord spécifique d’ici la rentrée. Chaque représentant d’un département marocain (agriculture, finances, transports, etc.) a indiqué à la partie européenne les agences et les programmes communautaires éligibles dans lesquels il est intéressé et dans lesquels il souhaiterait participer. D’une manière générale, le Maroc souhaite prendre part dans les agences et les programmes qui permettraient à ses opérateurs de s’intégrer le plus possible dans le marché intérieur européen et de coopérer très étroitement avec l’UE dans des domaines spécifiques en adéquation avec les réformes et les priorités du pays (plans Azur, Emergence,, Vert, etc.).
Conseil d’association en octobre prochain
La délégation marocaine, conduite par Youssef Amrani, directeur général des Relations bilatérales au ministère des Affaires étrangères, a une nouvelle fois insisté sur le caractère évolutif du statut avancé qu’elle réclame en considérant que les négociations en cours devraient pouvoir aboutir à une « feuille de route », élaborée conjointement avec la partie européenne, et qui, à terme, devrait tracer les grandes lignes d’un nouveau cadre contractuel entre les deux partenaires. Le 3e et dernier round de négociation, sur le statut avancé pour le Maroc, devrait se tenir à la mi-septembre 2008, toujours à Bruxelles. Les résultats de l’ensemble des négociations feront l’objet d’un document conjoint qui devrait être officiellement adopté lors du Conseil d’association Maroc/UE en octobre prochain.
Accès aux programmes des agences
La partie européenne propose au Maroc la participation dans des agences et programmes communautaires qui répondraient plus à ses propres intérêts (Agence européenne de sécurité aérienne, Douanes 2013, programmes de transport intermodal Marco Polo et Cesar, Eurojust, programme Innovation et Compétitivité, etc.).
Comme on le sait, la participation aux travaux d’une agence ou d’un programme communautaire réclame une participation financière à l’instar de ce qui se passe avec les Etats membres de l’UE. Bonne nouvelle pour le Maroc : la Commission européenne a donné son accord pour appuyer financièrement la participation marocaine à l’un ou l’autre des programmes et agences retenus. Les deux parties ont décidé de se revoir d’ici la rentrée pour fixer la liste des agences et des programmes auxquels le Maroc pourrait participer ainsi que les modalités d’appui financier. Un accord définitif sur ce chapitre devrait intervenir au plus tard au mois d’octobre, juste avant la tenue du Conseil d’association Maroc/UE.
TelQuel - Aziz Ben Marzouq
(1) Des troupes marocaines participent activement depuis 2005 à l’opération militaire européenne de gestion de crise Althea, en Bosnie-Herzégovine.
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