Cette année, l’opération Marhaba 2023 dédiée à l’accueil des Marocains résidant à l’étranger coïncide avec l’Aïd Al Adha, donnant encore plus de sens aux retrouvailles. En tout, quelques 3 millions de MRE devraient rentrer au Maroc cet été.
Que ramènent les MRE dans leurs bagages, une fois les vacances terminées ? La question mérite d’être posée à un moment où tout le monde parle de consommer local pour développer le tourisme national. Dans la réalité, nous sommes loin du compte.
« Touche pas à mon MRE », ce slogan qui s’apparente au slogan national « Touche pas à mon pays », après les attentats du 16 mai dernier, pourrait être mal vu en cette période où tout le pays, en première place les autorités locales, est à pied d’œuvre pour accueillir ses dignes ambassadeurs. Car il est devenu coutumier de dire que les vacances d’été égalent des entrées de devises, de mariages à la marquise etc. Bref des retrouvailles annuelles qui embellissent le quotidien de chaque famille durant l’été. Mais comment rester sans réagir ou, du moins, insensible à un phénomène de genre nouveau alors que ces « Pachas outre-mer » font de l’export des produits qu’ils sont censés ramener au pays comme des équipements hitgh tech ou encore des portables dernier cri, souvent entrés frauduleusement sur le territoire national. Les exemples n’en finissent pas et tout le monde, surtout les commerçants des quartiers périphériques, s’accordent à dire comment faire pour que nos MRE participent au développement de l’artisanat marocain. Sur l’avenue Félix Houphouet Boigny, les bazaristes sont sans équivoque. « La plupart de nos clients sont les touristes étrangers. Qu’ils soient d’Europe, d’Asie ou d’Amérique. Ils viennent faire des achats », tonne ce commerçant. Son voisin d’à côté renchérit : « Il ne faut pas s’attendre à autre chose, les gens qui achètent ici ne sont pas des Marocains car ils estiment que nos produits sont chers et donc ils préfèrent aller voir ailleurs ». Sur la route de Bouknadel, entre Salé et Kénitra, des voitures immatriculées à l’étranger, se succèdent à longueur de journée. Aucune ne s’arrête. Ce dimanche, une seule voiture file doucement dans le lot avant de freiner pour voir les produits potiers exposés tout au long de la route. Dans son accent, mélangé d’anglais et de français, le propriétaire de la camionnette fait un signe du doigt pour demander le prix d’un vase. Après quelques minutes de conversation, le marché est conclu. C’est la première opération de notre artisan en ce début de matinée. « Ce n’est pas fréquent que les gens s’arrêtent ici. Mais il nous arrive parfois de faire de très bonnes affaires avec les touristes surtout en groupe », explique le potier. Au marché Souika de Rabat, les discussions vont bon train entre deux amis. Ahmed, un revendeur connu de la place, prépare un joli paquet pour un client pas comme les autres. C’est un MRE, qui s’apprête à regagner son pays d’accueil. Dans le colis, on retrouve un portable dernière génération, une montre Rolex et une paire de lunettes anti solaire signée YSL. « Il m’a fait cette commande avant qu’il n’arrive au pays. Il m’a téléphoné. Et depuis 15 jours, j’essaie de lui trouver les articles qu’il désire. Avec lui, je gagne un peu plus qu’avec les nationaux. » Même constat dans un autre magasin où un autre MRE serait venu s’équiper en accessoires de TPS et de vidéo. S’il faut même prendre ce dernier cas au conditionnel, il conforte l’idée selon laquelle nos compatriotes ne seraient pas de bons clients pour les produits artisanaux. Nous avons essayé de demander à un économiste de la place qui nous a laissé entendre que tout ce qui brille n’est pas or. Autrement dit, ce n’est pas parce que quelqu’un réside à l’étranger qu’il est forcément riche. Certes, il peut tirer son épingle du jeu mais en comparant le coût de la vie, il lui est plus facile de s’équiper dans son pays d’origine que dans son pays d’accueil. Un avis qui est entièrement partagé par Mohamed Larbi, un résident marocain à Paris. Il est étudiant mais cela ne l’empêche pas de commenter la situation. « Il ne faut pas voir en cette situation un esprit mercantile ou anti patriotique. C’est une question d’opportunité. Et l’opportunité n’est pas propre à un seul pays. Il faut toujours profiter des occasions quand elles nous sont bénéfiques ». Si ces cas ne sont pas légion, ils interpellent cependant sur la place qu’occupent les MRE dans le secteur de l’artisanat au Maroc.
La Nouvelle Tribune
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