Procès de la secte dite des "sataniques" : Verdict aujourd’hui

4 mars 2003 - 06h40 - Maroc - Ecrit par :

Le jugement des quatorze jeunes, accusés d’appartenir à une secte dite des "adorateurs de Satan", a été reporté pour la deuxième fois au lundi 3 mars au TPI de Casa-Anfa. Le verdict devra être prononcé dans l’après-midi.

La deuxième audience qui a eu lieu vendredi a été marquée par l’intervention de 14 avocats et a duré pratiquement huit heures et demie, de 16 heures à minuit passé. Encore une fois, le juge a refusé la mise en liberté provisoire des prévenus. Le temps s’est donc péniblement égrené à la salle 4 du tribunal où familles et amis des mis en cause sont venus en force. Sur les visages des prévenus, on pouvait lire la fatigue des journées passées en détention préventive et le sentiment de dégoût mêlé d’angoisse de se retrouver au box des accusés. L’intervention du parquet a duré plus d’une heure et demie. Le procureur général a invoqué “la menace à la stabilité de la société musulmane, le vide spirituel qui pousse à l’idolâtrie, la pratique de rites condamnables, le dénigrement des religions de l’Etat et de la famille, la débauche sexuelle, etc.” Alors que le parquet énumère les accusations, les chuchotements se multiplient dans la salle. L’ambiance devient de plus en plus lourde. Le procureur général se réfère
notamment aux articles 129 et 220 de la procédure pénale pour demander l’inculpation des prévenus. 17h40. Des avocats interrompent le parquet lui demandant d’être plus concis. Le procureur général explique que "les croyances des prévenus n’intéressent le parquet que dans la mesure où elles influencent les autres… surtout les collégiens". Le parquet appuie son intervention de plusieurs versets du Coran. Le jeune avocat d’un prévenu, qui a carrément arraché la paroleà ses confrères, s’est dit surpris qu’une telle affaire puisse être aussi "démesurément gonflée". "Mon client est un musulman pratiquant. J’ai des témoins qui l’accompagnaient lors des prières nocturnes pendant le Ramadan dernier", tonnait-il. Et de souligner que le prévenu "n’a de tort que d’aimer le hard rock et de jouer à la guitare". Se référent au PV de la BNPJ, il a attiré l’attention de la Cour sur le fait que nul part dans le procès-verbal, il n’y a eu mention d’atteinte à l’islam. Pratiquement toutes les plaidoiries avaient noté, preuves à l’appui, que les concerts de musique hard rock organisés par les prévenus se tenaient dans des facultés et des hôtels, que les affiches avaient été maintes fois collées au boulevard Mohammed V et que les jeunes artistes avaient reçu des encouragements et trophées des doyens de quelques facultés et ils ont même été reçus à la télé. Chose qui a amené la défense à écarter tout caractère discret et subversif des activités, somme toute artistiques, des mis en cause. La défense s’est beaucoup appuyée sur l’absence du flagrant délit dans l’affaire. "Les objets réquisitionnés, tee-shirts, piercings, affiches, guitares, sculptures… n’accablent en rien des jeunes dont les choix vestimentaires riment normalement avec le genre de musique qu’ils aiment et pratiquent", souligne un avocat. Et ce dernier d’ajouter que la justice n’aurait jamais dû se laisser impressionner par une "tempête dans un verre d’eau" qui a porté préjudice à l’image du pays. Plusieurs représentants d’associations et d’ONG, dont l’Association marocaine des droits de l’homme, ont assisté à cette séance marathonienne. Ils ont distribué des communiqués où ils soutiennent les 14 prévenus. Les familles de ces derniers ont apprécié cette solidarité qui les aide à tenir le coup face à un procès angoissant et interminable. S’adressant au juge alors qu’il commence à faire tard, les prévenus ont insisté sur leur appartenance à l’islam. Dans la salle, les regards émus des familles et amis des prévenus semblent vouloir confirmer ce propos. En ajournant le verdict, la Cour attise le suspense, et la mésaventure des 14 prévenus et leurs familles s’en trouve prolongée de deux longues journées. "Une éternité", commente le père d’un prévenu.


"L’uniformité crée l’ennui"

Ils sont déjà là, au McDo du boulevard Mohammed V. Ils sortent à peine d’un cours d’une école de commerce privée. L’accueil est sympathique et d’entrée de jeu, la discussion s’enchaîne. Hatim et Lamia connaissent de près les quatorze jeunes, accusés de satanisme. Tous les deux aiment la musique de leurs copins et s’habillent de la même manière. Ils ont vécu les mêmes expériences, cru aux mêmes idéaux et partagé des moments inoubliables. L’affaire les a rendus un peu mélancoliques. Ils se disent atterrés de voir leurs potes d’hier, embourbés dans une hideuse affaire qui désormais défraye la chronique. "Nous vivons dans la psychose. Ce qui nous arrive me fait peur et nos parents sont très inquiets", reconnaît Hatim. Cet étudiant en deuxième année informatique de gestion porte des boucles d’oreille, se coiffe et se taille la barbe différemment. Quand on lui demande pourquoi, sans s’énerver il répond que c’est pour se distinguer de la masse ou encore "ne pas tomber dans le conformisme". "Sans pour autant être mauvais", précise-t-il. Lamia étaye les propos de son ami par une expression de Voltaire : "l’uniformité crée l’ennui". "La hard rock music est basée sur des mélodies complexes pas toujours accessibles à des gens qui n’ont pas l’habitude", continue Lamia. Hatim se demande si les autorités ne doivent pas plutôt dresser un portrait robot du Marocain type pour qu’il puisse se retrouver.

source : www.leconomiste.com

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Musique - Procès - Liberté d’expression - Nayda - Jeunesse

Ces articles devraient vous intéresser :

Latifa Raafat se confie sur sa relation avec le roi Hassan II

Latifa Raafat figure parmi les chanteurs préférés de feu Hassan II. La chanteuse marocaine se confie sur sa relation avec le père du roi Mohammed VI.

Les jeunes Marocains se désintéressent du mariage

Alors que le Maroc devrait connaître une diminution de sa population active et une augmentation du taux de vieillissement, les jeunes montrent de plus en plus un désintérêt pour le mariage et la procréation en raison de la cherté de la vie. Le projet...

Un fan d’Ahlam provoque sa colère en insultant le Maroc

L’artiste émiratie Ahlam a exprimé sa colère contre l’un de ses fans qui a utilisé sa photo sur son compte de la plateforme “X” pour insulter le Maroc et la chanteuse Asmaa Lamnawar.

Le festival Mawazine met Angham et Ahlam dans l’embarras

Un incident a marqué l’ouverture du festival Mawazine à Rabat. La chanteuse égyptienne Angham a été victime d’une confusion de noms lors d’une interview avec une journaliste, qui l’a appelée par le nom de la chanteuse émiratie Ahlam.

Najat Aatabou, Abdelaziz Stati et Zina Daoudia à la tête du jury d’Annajm Chaabi

La chanteuse Najat Aatabou se lance dans un nouveau projet et endosse le rôle de jurée pour une émission de télévision inédite au Maroc. Elle sera accompagnée de plusieurs autres artistes.

Douzi : un adieu à la scène musicale ?

À 39 ans, le chanteur marocain Abdelhafid Douzi pourrait rapidement tirer un trait sur sa carrière musicale. Il a par ailleurs annoncé qu’il se retirait du jury de l’émission « Star Light », dédiée à la découverte de talents musicaux.

Divorce de la chanteuse marocaine Chaimae Abdelaziz

La chanteuse marocaine Chaimae Abdelaziz a annoncé son divorce. C’est sur son compte Instagram que la jeune femme a choisi de partager cette nouvelle personnelle avec ses fans.

Maroc : coup de gueule des chanteurs

Bon nombre de chanteurs marocains ont exprimé leur colère contre l’exclusion et la marginalisation dont ils se disent victimes. Concerts et festivals sont organisés cet été sans qu’ils soient invités.

Booder se confie sur ses problèmes de santé

Invité sur l’émission Une heure avec… diffusée sur RFM, l’humoriste franco-marocain Booder a fait d’étonnantes révélations sur son enfance. Il a été très malade lorsqu’il était jeune.

Interdire ou réguler TikTok ? Le Maroc cherche la solution

Menacé d’interdiction aux États-Unis et en Europe, TikTok est de plus en plus décrié dans le monde. Au Maroc, des voix continuent d’appeler à l’interdiction de l’application chinoise. Mais plutôt que de l’interdire, des experts appellent à encadrer son...