Le Maroc, ou plutôt son roi, s’est fixé un objectif ambitieux : « 10 millions de touristes en 2010. » C’était le 11 janvier 2001, lors des Assises nationales du tourisme de Marrakech. Avant, donc, les attentats du 11 septembre et bien avant la guerre annoncée d’Irak. Malgré un climat international peu favorable, les Marocains n’ont pas révisé leurs ambitions à la baisse. Et Adil Douiri, le jeune ministre du Tourisme du gouvernement de Driss Jettou, est bien décidé à tenir le pari. Il l’a réaffirmé dans la capitale française, la semaine dernière, à l’occasion d’un colloque (1) organisé par le Cercle d’amitié franco-marocain et la chambre de commerce et d’industrie de Paris. But affiché de cette manifestation, à laquelle participaient également le ministre marocain de l’Equipement et des Transports, Karim Ghellab, et Abderrazak el-Mossadeq, ministre délégué auprès du Premier ministre : faire mieux connaître aux investisseurs français les atouts du Maroc, notamment dans les domaines des infrastructures et du tourisme.
Le tourisme est, déjà, la deuxième source de devises du royaume chérifien, immédiatement derrière les rapatriements de capitaux des Marocains résidant à l’étranger. Le pays reçoit actuellement 4,5 millions de touristes par an, dont 2,3 millions d’étrangers (les autres sont des Marocains qui reviennent chez eux pour leurs vacances), qui dépensent chacun, en moyenne, 800 euros - une somme relativement élevée. Adil Douiri ambitionne de multiplier le nombre de lits par 3 en dix ans, pour le faire passer de 80 000 à 240 000, et de tripler également le nombre de places d’avion. Si l’on sait qu’à chaque lit créé correspond en moyenne un emploi direct et six ou sept emplois indirects, on comprend l’enjeu que cela représente pour un pays où le chômage des jeunes est un mal endémique. Selon Adil Douiri, quelque 500 000 emplois pourraient être créés d’ici à 2010.
Diversifier l’offre
Pour y parvenir, les autorités marocaines ont décidé de réorienter leur politique touristique. En diversifiant une offre jusqu’ici très élitiste et, surtout, en développant le tourisme balnéaire, alors que le Maroc « vendait » surtout le charme de ses villes - Marrakech en particulier, destination préférée du million de Français qui se rendent chaque année dans le royaume - et de ses paysages. Le pays ne dispose, actuellement, que d’une grande station balnéaire, celle d’Agadir. Il en aura bientôt six autres, une fois réalisé - à l’horizon 2010 - l’ambitieux programme baptisé « plan Azur ». Cinq d’entre elles verront le jour, les unes après les autres, le long de la côte atlantique, de Larache à Plage blanche, près de Guelmim, aux confins du Sahara, en passant par Mogador (Essaouira), Taghazout et El-Haouzia. La sixième sera créée sur la côte méditerranéenne à Saïdia, près d’Oujda. L’Etat fournira l’eau, l’électricité, les routes. Le reste sera concédé à des investisseurs privés, tenus toutefois de respecter un cahier des charges. Les Marocains espèrent ainsi élargir leur clientèle, notamment aux Européens du Nord, friands de séjours balnéaires.
Les investisseurs - notamment français - devraient suivre. En dépit de ses lourdeurs administratives - qu’une politique de centres régionaux d’investissements tente de corriger - et d’une justice commerciale encore incertaine, le Maroc reste à leurs yeux une bonne destination. La chaîne hôtelière Accor y a, par exemple, ouvert une vingtaine d’hôtels en cinq ans (entre 1997 et 2002) et conserve encore dans ses cartons une dizaine de projets. Et tous les grands noms du tourisme français y sont présents. Le royaume chérifien est considéré, par les investisseurs étrangers comme par les touristes, comme un pays sûr. Ce n’est pas le moindre de ses atouts. Il a certes souffert des attentats du 11 septembre 2001, mais bien moins que d’autres. Si l’effet a été perceptible en ce qui concerne la clientèle allemande ou espagnole, le nombre de visiteurs français est, lui, resté stable. Une fidélité qu’Adil Douiri met sur le compte d’une « proximité culturelle » dont il se félicite.
(1) Investir au Maroc : croissance et stabilité.
Source : http://www.lexpress.presse.fr