Comment l’ONE se prépare à la pression de l’été

10 juin 2008 - 22h06 - Economie - Ecrit par : L.A

Les responsables de l’Office national de l’électricité (ONE) doivent remercier le ciel pour sa clémence : le temps frais et même les quelques précipitations enregistrées ces dernières semaines ont atténué la pression sur la demande qui commence généralement, à cette période de l’année, à évoluer à la hausse.

L’utilisation (de plus en plus répandue) d’appareils de ventilation est différée de quelques semaines, tandis que les agriculteurs ont recours moins fréquemment au pompage pour arroser leurs cultures.

La situation est donc gérable, pour le moment, et elle est en effet gérée convenablement si l’on exclut l’incident technique qui s’est produit dans une chaudière à la centrale de Jorf, il y a environ un mois, et qui a eu pour conséquence des coupures d’électricité chez les agriculteurs du Souss.

Mais il ne faut pas se leurrer : bientôt, avec l’arrivée des grandes chaleurs, la courbe de consommation va repartir à la hausse. Compte tenu du niveau de l’offre, inférieur même aux prévisions de consommation modérées établies en 1999 et qui tablaient sur une croissance de la demande de 6% (on sait que celle-ci est depuis 2003 de 8-9%), l’ONE se prépare à gérer cette période avec le plus grand soin. Et donc, éventuellement - car il faut envisager tous les scénarios - avec le moins de perturbations possibles. C’est ainsi que l’office a demandé aux distributeurs d’être prêts pour, en cas de nécessité, procéder à des coupures.

« L’ONE nous a même demandé de mettre au point des plans de délestage, afin que, le moment venu, l’impact soit le moins préjudiciable possible », explique un responsable dans une société de distribution. Plus clairement, il s’agira, en cas de nécessité, de couper par paliers, en fonction de l’importance de la zone concernée, afin de soulager le réseau et donc d’éviter un black-out total.

Lui-même également distributeur dans certaines villes (comme Agadir et Oujda), dans les zones périphériques des villes, donc les zones industrielles, et, bien sûr, en milieu rural, l’ONE a lui aussi son propre plan de gestion pour cette période critique qui correspond en gros aux mois de juillet et août au cours desquels la courbe de charge atteint des pics qui, d’année en année, s’exacerbent.

Par exemple, entre le pic de l’été 2006 et celui de l’été 2007, la hausse a été de 476 MW, ce qui correspond à une progression de la demande de 8,9%.

L’éolien ne fonctionne pas en pointe et l’hydraulique est aléatoire
C’est pourquoi l’office a déjà saisi les industriels, gros consommateurs d’électricité, pour leur demander de faire coïncider, dans la mesure du possible, les travaux de maintenance de leurs équipements, donc l’arrêt de leur fonctionnement, avec cette période sensible de juillet/août.

Mais, apparemment, il n’y a pas eu de répondant, chacun excipant de ses contraintes, notamment des impératifs de satisfaction des besoins du marché, comme c’est le cas pour les cimentiers, notamment.

Du coup, si l’ONE se trouve en manque de « jus », comme disent les électriciens, il le prendra forcément ici pour le fournir là, selon un arbitrage qui tiendra compte évidemment de certains paramètres, d’ailleurs en vigueur partout dans le monde.

Par exemple, il coupera une usine ou une exploitation agricole afin de préserver l’essentiel, c’est-à-dire les villes, donc les services publics et les ménages.

Bien sûr, ce sont là des situations extrêmes, mais qui peuvent se produire. Certes, l’instauration de GMT + 1 depuis le 1er juin 2008 aura certainement un impact positif. Les simulations réalisées par l’ONE montrent que cette mesure peut en effet générer un écrêtement de la courbe de charge de 100 à 150 MW. Mais le problème de fond demeure posé : l’offre est insuffisante par rapport à la demande. Le Maroc dispose de 5300 MW.

En réalité, il ne faut compter vraiment que sur les 3 469 MW que représente le parc de production thermique (les centrales à charbon, au fioul, au gaz naturel et les turbines à gaz, quoique celles-ci restent très onéreuses).

Les 1262 MW que représentent les installations hydrauliques sont certainement les bienvenus, sauf qu’ils sont aléatoires : non seulement les barrages servent aussi à l’irrigation, mais en cas de sécheresse, la contribution de cette source d’énergie s’amenuise encore plus.

Quant aux 114 MW fournis par l’éolien, ils ne servent pas à grand-chose en période de pointe. Heureusement qu’il y a l’interconnexion (600 MW) qui permet de faire la soudure. Mais même avec celle-ci (qui n’est d’ailleurs pas construite dans ce seul objectif), c’est tout juste si la demande en pointe est satisfaite.

Autrement dit, dans les moments critiques, toutes les installations fonctionnent à flux tendu, il n’y a pas de marge de réserve. Qu’un petit pépin survienne, et c’est le noir ! C’est évidemment une situation intenable pour les gestionnaires du réseau qui sont en permanence sur les nerfs.

C’est pourquoi la construction de centrales électriques s’impose plus que jamais. Beaucoup d’observateurs ne comprennent pas que le projet de Safi traîne en longueur, alors que la reconstitution de la marge ne peut se réaliser sans de nouvelles centrales.

Les pouvoirs publics sont ainsi interpellés, puisque c’est à eux qu’il revient d’arbitrer entre des projets touristiques et la réalisation d’unités de production d’électricité.

Source : La vie éco - Salah Agueniou

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Energie - Office National de l’Electricité - Consommation

Ces articles devraient vous intéresser :

"Lbouffa" : La cocaïne des pauvres qui inquiète le Maroc

Une nouvelle drogue appelée « Lbouffa » ou « cocaïne des pauvres », détruit les jeunes marocains en silence. Inquiétés par sa propagation rapide, les parents et acteurs de la société civile alertent sur les effets néfastes de cette drogue sur la santé...

Maroc : du changement dans le paiement des factures d’eau et d’électricité

Le gouvernement d’Aziz Akhannouch poursuit le chantier de modernisation des services publics. Le paiement des frais d’eau et d’électricité aura des nouveautés à partir du 1ᵉʳ janvier 2024.

GNL : Le Maroc se dote d’un terminal flottant à Nador West Med

Le Maroc s’apprêterait à lancer un appel d’offres pour la construction d’un terminal flottant de gaz naturel liquéfié (GNL) au port de Nador West Med.

Maroc : quand le thermomètre monte, la consommation électrique s’envole

La consommation électrique au Maroc a atteint un niveau record, s’établissant à 7 310 mégawatts, selon le ministère de la Transition énergétique et du développement durable.

Ramadan 2025 au Maroc : quelle disponibilité pour les dattes ?

Les producteurs et commerçants de dattes au Maroc rassurent les consommateurs quant à la disponibilité et à des prix abordables de ce produit sur le marché pendant le mois sacré de Ramadan.

Ramadan 2025 au Maroc : alerte sur une explosion des prix

À l’approche du mois sacré du Ramadan, la Fédération marocaine des droits des consommateurs s’inquiète de la stabilité du marché intérieur et appelle à des mesures urgentes pour protéger le pouvoir d’achat des citoyens, notamment les plus modestes.

Le Maroc se met à la taxe carbone

Des experts livrent leurs réflexions sur l’impact que la mise en place de la taxe carbone pourrait avoir sur l’économie marocaine ainsi que l’industrie marocaine.

Au Maroc, un « tsunami d’intoxications alimentaires » alarme les associations

Au Maroc, la multiplication des cas d’intoxication alimentaire suscite l’inquiétude des associations de défense des droits des consommateurs qui appellent les autorités compétentes à renforcer les contrôles dans les restaurants et établissements de...

Maroc : fin des frais « injustifiés » pour les factures en ligne

Le Conseil de la concurrence a lancé un avertissement : des frais de service ajoutés sur les paiements en ligne dans plusieurs secteurs économiques n’ont pas de justification. Ces coûts supplémentaires, selon le Conseil, freinent la digitalisation de...

Bouteille de gaz au Maroc : nouvelle flambée des prix ?

Le Maroc se prépare à une nouvelle flambée des prix du gaz butane. Dès le 1ᵉʳ janvier prochain, le prix des bonbonnes de gaz de 12 kg pourrait grimper de 10 dirhams, passant ainsi de 50 à 60 dirhams. Cette augmentation s’inscrit dans un plan de...