En tout cas, on apprend de source parlementaire que pour éviter un été chaud et désamorcer le risque de grève qui commençait à pointer, décision a été prise d’ajourner l’examen de ce texte. En effet, les mouvements de grève du printemps 2007 sont encore dans toutes les mémoire, et ni le gouvernement ni les parlementaires ne voudraient les voir se répéter.
Ces derniers temps, la commission « Intérieur et infrastructures » a d’ailleurs reçu de nombreuses protestations de syndicats de diverses professions affirmant qu’ils n’ont été en aucune manière consultés par le ministère de l’équipement et du transport dans le cadre du dialogue entrepris entre ce dernier et les professionnels.
En fait, il y a de réelles difficultés pour mener ce dialogue avec les professionnels étant donné la multitude des professions concernées par le projet de code, et aussi en raison de l’atomisation de leurs représentations syndicales et corporatistes qu’on ne peut plus compter.
Pourtant, comme déjà précisé, dans l’examen du texte, on en est juste aux préliminaires, c’est-à-dire encore loin des dispositions sur lesquelles il existe de grandes divergences entre les professionnels et le ministère, particulièrement les chapitres relatifs aux amendes, aux peines privatives de liberté et au permis à points, sur lesquels les professionnels restent crispés.
Les professionnels restent sceptiques
Le ministre du transport, Karim Ghellab, en est conscient et, après les mouvements de grève précédemment observés, il apprécie mieux la force de frappe des routiers. C’est pour cette raison qu’il a annoncé la réduction des montants des amendes dites « transactionnelles forfaitaires progressives, perçues par l’agent de contrôle, en fonction du comportement », c’est-à-dire du type d’infraction.
Si, pour l’amende correspondant aux infractions dites de gravité faible, le montant de 400 DH sera retenu, en revanche, pour celles dites de gravité moyenne ou importante, les amendes seront respectivement ramenées de 750 à 600 DH et de 1500 à 900 DH seulement. De même, le ministre est disposé à passer l’éponge sur toutes les dispositions relatives aux peines d’emprisonnement et garder les choses en l’état, c’est-à-dire suivant le texte en vigueur.
Autre concession : la distinction entre chauffeurs privés et chauffeurs professionnels devrait être abandonnée, sachant que, dans le texte de base, ces derniers sont soumis à un doublement de l’amende. Ces innovations devraient donc être introduites à la prochaine session parlementaire sous forme d’amendements.
Malgré un projet de texte très adouci par rapport à la mouture initiale, certains observateurs sont sceptiques quant à l’adoption à terme d’un tel projet dont les enjeux sont énormes.
En effet, si le ministre du transport et de l’équipement, à juste titre d’ailleurs, fait de ce projet de code de la route le cadre central de la lutte contre l’insécurité routière et mène en parallèle plusieurs réformes sectorielles (permis, auto-écoles, visites techniques, renouvellement du parc, contrôle routier, etc.), il est normal qu’il se heurte à des difficultés, car nombre de paramètres ne dépendent pas de son département.
D’aucuns se demandent s’il n’a pas péché par excès de naïveté. Exemple : les corporations les plus virulentes contre le projet de code de la route sont celles des taxis, des camionneurs et des autocaristes. Or, si la libéralisation du transport de marchandises a eu des résultats mitigés, celles du transport de voyageurs et des taxis semblent presque impossibles car ces deux transport reposent sur le système d’octroi d’agréments qui échappe aux compétences du ministère.
Comment peut-on réformer un système dont on ne contrôle pas tous les mécanismes ? La question reste posée. Une chose est sûre, l’adoption d’une nouveau code de la route est une nécessité, ne serait-ce que pour pallier les défaillances et oublis de l’actuel texte, et permettre aux nouvelles technologies (permis et carte grise électroniques) de trouver leur pleine application dans la célérité de traitement des infractions.
Entre autres exemples, l’instauration du permis à puce permet d’inscrire l’infraction sur la mémoire de la licence de conduite et le conducteur dispose d’un délai pour payer, au lieu de se voir retirer le permis sur place. Autre cas, celui des radars automatiques installés mais pas encore activés. Le nouveau code rendrait légales ces procédures, soulagerait les conducteurs des désagréments d’un retrait de permis pour manque de liquide et éviterait les tracas de recouvrement à travers la justice.
Source : La vie éco - Mohamed Moujahid