Une cinquantaine d’individus ont été arrêtés mercredi au Maroc lors d’une importante opération visant des membres présumés de groupes djihadistes.
Vivre le rêve américain en prison ? C’est possible. Depuis octobre 2005, Noureddine Malki, accusé "d’usage de fausse identité" et de "détention de documents stratégiques", croupit en prison aux Etats-Unis. Sa famille tente de faire libérer cet ancien traducteur de l’armée américaine.
Début des années 1990. Un jeune marocain, la trentaine, débarque aux Etats-Unis. Plein du rêve américain, Noureddine Malki travaille quelques années au noir pour un journal gratuit, puis comme chauffeur de taxi, un des célèbres yellow-cabs new-yorkais. En 1993, c’est dans une épicerie qu’il gagne sa vie. Il s’est associé à une connaissance pour ouvrir la boutique qui est dorénavant son gagne-pain.
A l’époque, une vague massive de régularisations de ressortissants libanais qui avaient fui leur pays en guerre, pousse certains avocats à proposer des services bien étranges à leurs clients clandestins : les aider à régulariser leur situation en leur conseillant de se dire Libanais, et leur fournir de faux papiers attestant de cette nationalité.
Irrégulière régularisation
C’est ce qui va arriver à Noureddine Malki. "Il a fait une grosse erreur, il le reconnaît", plaide sa soeur Sonia, son aînée qui vit en France. Ce mensonge offre de nouvelles possibilités à Noureddine qui désormais en situation régulière, va chercher un vrai travail. En 2004, en plein guerre d’Irak, il est candidat à un poste de traducteur pour l’armée américaine et rapidement embauché. "Mon frère parle arabe, français et anglais. Il est parti du Maroc avec une maîtrise d’anglais. Il a rapidement trouvé du travail comme interprète pendant cette guerre", explique sa soeur.
Le nouvel interprète travaille en Irak pour l’armée américaine sous sa nouvelle identité libanaise, Nour El Maliki. Il voit plusieurs de ses collègues tomber durant cette guerre, aussi, le jour où il est grièvement blessé, il décide d’avouer son mensonge...au cas où lui aussi mourrait. Car, explique Sonia Malki, "s’il était mort là-bas, sous son identité d’emprunt, nous ne l’aurions jamais su". Cet aveu lui coûtera cher. Son appartement est perquisitionné par le FBI (Federal Bureau of Investigation) qui trouve dans l’ordinateur de Noureddine Malki des "documents stratégiques". Incarcéré à la prison de Brooklyn, accusé "d’usage de fausse identité" et de "détention de documents stratégiques", dont le Bureau pense qu’il voulait les utiliser à des fins d’espionnage, il est déchu de sa nationalité américaine, et délesté du diplôme en informatique qu’il avait décroché dans une université américaine.
Prison et isolement
Octobre 2005. Durant les 6 premiers mois de son incarcération, les proches de Noureddine ne savent pas où il se trouve. Seul un événement met la puce à l’oreille de sa famille :"des policiers sont allés chez mon père à Casablanca pour prendre le livret de famille, qu’ils lui ont rendu une semaine après", se rappelle Sonia.
Ces premiers mois sont terribles. "Il était en isolement, réveillé toutes les 3 heures, continuellement exposé à la lumière. Quand je suis allée le voir, il était jaune. Il avait une blessure sur son crâne rasé", accuse la grande soeur. "Il a même été transféré au 9ème étage de la prison, celui des criminels dangereux", s’insurge-telle. Selon elle, même le juge qui a présidé le procès de Noureddine aurait reconnu n’avoir aucune preuve des intentions de mauvaise utilisation par le traducteur des documents qu’il possédait.
Revendications
Pourtant, il s’en est pris pour 10 ans. Aujourd’hui, Noureddine se trouve dans une prison de l’Illinois, "une deuxième Guantanamo dont on ne parle pas", dénonce Sonia. Une prison réservée quasi exclusivement aux personnes "accusées ou inculpées de terrorisme", s’inquiète sa famille.
Sonia interpelle maintenant l’Etat marocain : "le Maroc doit aider ses sujets ! D’anciens prisonniers de Guantanamo on été libérés, mais mon frère est toujours en prison !"
Décidée à aller jusqu’au bout, Sonia se fait la porte-parole des revendications de son frère. Tout d’abord, il ne veut pas être extradé vers le Maroc, car il y est revenu quelques fois sous sa fausse identité, et craint la réaction des autorités. Ensuite, il souhaite qu’on lui permette de vivre dans la légalité aux Etats-Unis - à défaut de lui redonner la nationalité américaine – une fois qu’il aura été libéré.
Pour se faire entendre, Sonia Malki se rendra très bientôt en Normandie, dans le nord de la France, pour la commémoration du débarquement américain qui a marqué la fin de la 2ème Guerre Mondiale. Le tout nouveau président américain y sera. Toute la famille Malki, qui a tenté de le voir à samedi à Strasbourg, (est de la France), lors de son récent passage, est bien décidée à attirer son attention ce jour-là.
Source : Au Fait Maroc - Laïla Ziraoui
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