Les réactions se multiplient. L’Europe désire contrôler et établir des mesures et des lois pour mieux gérer les flux migratoires. L’Afrique, elle, accuse l’Europe de mettre des freins pour décourager l’immigration présentée souvent comme la conséquence de la pauvreté et de la mauvaise gestion et comme la seule issue pour s’en sortir. « Ce qui n’est pas le cas de tous les pays du continent africain », affirme Menouar Alem, l’ambassadeur du Maroc auprès de l’Union européenne et d’ajouter que le « Maroc est le seul pays avec la Syrie qui a une mission spécifique représentée auprès de l’UE. La mission se charge également des relations avec l’OTAN ».
En effet, lors de sa visite officielle en France, Sa Majesté le Roi Mohammed VI avait lancé un appel où il a demandé le renforcement des relations entre le Maroc et l’UE au-delà de l’accord d’association et un peu moins que l’adhésion. Il y a eu une réponse positive de la part des Etats membres de l’UE et de la France surtout qui a appuyé cette requête. « Nous avons dès lors entrepris la mise en place d’une architecture de travail qui s’est beaucoup inspirée de ce que les pays en voie d’adhésion à l’UE, notamment les dix derniers membres, avaient utilisé pour leur accession à l’UE. Nous avons mis en place huit comités sectoriels, le dernier en date est un sous-comité en charge des droits de l´Homme qui a tenu sa première réunion il y a quelques mois. Nous avons donc couvert le spectre le plus large des relations avec l’Europe. La relation a connu une amplitude très forte dans le cadre de l’accord d’association que nous avons ratifié en 1995 », affirme M. Alem.
Cette impression de rapport plutôt particulier liant le Maroc et l’Union européenne, fut confirmée par d’autres interlocuteurs notamment Bernard Brunet, Desk officer Maroc et Jean-Pierre Bou, chargé d’une mission auprès de l’unité B 2 immigration et asile. Pour M. Brunet, le Maroc a franchi de grands pas démocratiques et ne cesse de mettre tout en oeuvre pour développer son économie. « L’Union européenne travaille beaucoup avec le Maroc pour que le pays soit doté de toutes les infrastructures nécessaires à son développement économique et social. Il est un modèle à suivre », dit-il.
Même constat de Jean-Pierre Bou qui pense que seules émigrent les personnes qui vivent dans le besoin et que si chaque pays africain s’active à se développer et profiter de ses richesses naturelles et humaines, beaucoup de vies seront sauvées.
Donc, le premier constat est que le Maroc donne un bon exemple en matière de développement et de bon voisinage. Ce rapport permet de mettre au point des stratégies pour stopper l’immigration clandestine. Or, le Maroc n’est pas seulement un pays de flux mais aussi de transit. Les Subsahariens y viennent dans l’espoir de trouver des passeurs pour traverser vers l’Europe, l’Eldorado tant rêvé.
Le deuxième constat est que le dossier de l’immigration est soumis à la bonne volonté de chaque pays membre. Les uns ont besoin de cette main-d’oeuvre pas trop chère, capable de faire des travaux que l’autochtone dénigre. Les autres voient en ces flux une menace pour l’équilibre et la sécurité du pays. Ces divergences poussent à se demander s’il y a une vraie stratégie d’émigration au sein de l’Union européenne, face à une Europe qui vieillit et qui a besoin de main-d’oeuvre, une Afrique de plus en plus pauvre, jeune et demandeuse d’emplois.
Une nouveauté. Aujourd’hui, on parle de la migration circulaire. Une idée à l’état embryonnaire certes mais qui, selon de nombreuses personnes, peut profiter et aux pays d’accueil et aux pays émetteurs. Elle se définirait comme la solution pour faciliter la mobilité du migrant vers les autres pays mais surtout vers son pays d’origine afin de pouvoir partager ses compétences et en faire bénéficier d’autres citoyens. Mais encore faut-il établir des conditions préalables à ce nouveau concept de la migration. Comment la Commission européenne compte-t-elle donner corps à cette nouvelle approche sachant que le sujet de la migration reste encore très partagé et souvent sujet de discorde entre les pays membres de l’Europe ?
Deux conférences qui ont lieu à Bruxelles permettent de sonder les opinions arabes, africaines et européennes sur ce sujet. Conclusion : le développement reste la vraie solution à la question migratoire.
Libération