L’objectif est d’arriver à un accord euro-méditerranéen dans le domaine du transport aérien. C’est une première. Le seul pays ayant bénéficié de cet avantage de taille reste les Etats-Unis. Le mandat a été donné en 2003 et les négociations sont toujours en cours. Cependant, avec le Maroc, elles ne devront pas dépasser quelques mois. Bruxelles considère que “les négociations arrivent à un moment où le Maroc boucle avec succès son ambitieux programme de réforme des transports, sous le principe d’une libéralisation cadrée”. Cet accord est appelé à devenir le modèle à suivre pour les relations avec les pays du bassin méditerranéen dans le domaine aérien, lit-on dans un communiqué de la Commission européenne. Selon ce même document, “la commission a aujourd’hui un mandat d’engager des négociations visant la conclusion d’un ambitieux accord aérien entre l’Union et le Maroc, avec l’assistance d’un comité spécial des Etats membres”. Celles-ci toucheront plusieurs domaines tels que la libéralisation du trafic aérien entre l’Union et le Maroc, des éléments de sécurité, sûreté, contrôle du trafic aérien… L’accord devra également inclure le volet de la coopération technique pour garantir la mise à niveau des structures et des institutions marocaines impliquées dans l’aviation civile.
En tout cas, la décision a été prise lors du Conseil des ministres du 10 décembre et les négociations devront démarrer en janvier prochain. Pour Karim Ghellab, ministre de l’Equipement et du Transport, sur le plan politique, cette décision est un événement important. Le Maroc a été actif depuis quelques mois au niveau de la Commission européenne pour l’inciter à activer sa demande de l’intégrer dans l’Open Sky européen. Avec cet aval du Conseil et dans la logique du statut avancé, le Maroc est traité au même titre que les pays des Balkans, futurs membres de l’UE. Les spécificités marocaines mises en avant dans ce secteur libéralisé depuis février dernier ont fait mouche. Le slogan européen le “tout sauf les institutions” se confirme.
Dans cette affaire, l’objectif du Maroc pour faire partie intégrante du ciel européen, sur les plans commercial et sécuritaire, sera atteint. Il s’agira de supprimer les accords bilatéraux avec les différents pays pour les remplacer par un seul, qui liant Rabat à l’ensemble des 25 européens. En d’autres termes, cette nouvelle génération d’accord vise à obtenir l’ouverture réciproque des marchés et l’élimination des entraves économiques aux échanges et aux investissements. En pratique, le marché marocain sera ouvert à toutes compagnies aériennes européennes. Ainsi, la clause de nationalité sera supprimée. Celle-ci exigeait qu’une compagnie aérienne d’un pays européen ne pouvait assurer la desserte d’une autre capitale vers le Maroc. Avec cet accord euro-méditerranéen, une compagnie anglaise par exemple peut assurer la desserte de Rome-Agadir. Résultat : permettre à d’autres compagnies d’accéder au marché maroco-italien. Pour Ghellab, le but est d’ouvrir un gigantesque marché pour que toutes les compagnies aériennes européennes puissent desservir le Maroc avec facilité. Celui-ci rappelle que cet accord se mettra en œuvre dans le cadre de l’Open Sky.
La RAM pourra-t-elle résister face à la concurrence des compagnies européennes sans laisser des plumes ? Le ministre est confiant. Pour convaincre, il rappelle qu’une douzaine de compagnies ont commencé à opérer dans le ciel marocain depuis février dernier, date de l’engagement du Maroc dans la libéralisation du transport aérien. Il s’agit de Corsair, Air Horizon, Air Berlin… “La RAM s’inscrit dans cette logique de libéralisation. Elle a créé son low-cost et se bat avec ces compagnies à armes égales”, dit le ministre. En outre, son résultat net est positif malgré l’augmentation du prix du pétrole. Aucune inquiétude donc à l’horizon.
Cependant, le grand gagnant de cette opération est incontestablement le tourisme. L’accord global aura des retombées sur ce secteur. Il sera essentiel pour atteindre les objectifs de la vision 2010, affirme le ministre. En effet, pour pouvoir drainer 10 millions de touristes par an, il est impératif de tripler les capacités. Il faudra donc 1.800 fréquences hebdomadaires au lieu de 600 actuellement. Visiblement, l’ouverture du marché euro-méditerranéen est vitale pour atteindre le cap des 10 millions de touristes.
Mohamed CHAOUI - L’Economiste