Evident. Opérationnelle dans six mois, l’entreprise de matériel industriel en composite fabriquera des boîtiers pour les câbles électriques d’Airbus au Maroc. Pour ce président d’une grosse PME bordelaise, le choix semblait évident. « A la demande de notre client, Labinal, [principal fournisseur d’Airbus en câble électriques, ndlr], nous avions repris, il y a trois ans, l’activité d’une petite entreprise du sud-ouest de la France qui fabriquait ces boîtiers. Aujourd’hui, Labinal, qui produit une grande partie de ses câbles au Maroc, nous a demandé de nous rapprocher de son site de production, analyse Jean-Paul Remezy. Si nous ne venons pas, d’autres le feront et nous perdrons un marché. »
Depuis quatre ans, des PME françaises, pour une grande partie sous-traitantes d’Airbus et de ses grands équipementiers, il s’en implante en moyenne une dizaine par année. Installé dans le pôle industriel aéronautique à une quinzaine de kilomètres de Casablanca, Thomas Corbel, fabriquant de pièces pour les moteurs d’avion A320 et A340, ne s’en étonne pas. « Une pièce qui sort de nos ateliers est 30 % moins cher que si nous l’avions fabriqué en France. » Avec une main-d’œuvre 3 à 4 fois moins cher, et une proximité géographique limitant les frais logistiques, les sous-traitants aéronautiques ont ici de quoi faire face à la pression sur les coûts.
Mais pas seulement. Allégement des procédures fiscales et exonération d’impôt pendant une durée de cinq ans ou mobilisation du foncier, le gouvernement marocain s’emploie, depuis 2004, à faire du royaume une plateforme de production aéronautique low-cost. Résultat : quasi inexistant en 2000, le secteur compte aujourd’hui 60 entreprises, 6 000 salariés et affiche un taux de croissance à 2 chiffres. « La forte pression sur les coûts, la bonne santé des carnets de commande nous a plutôt réussies », avoue Thomas Corbel dont le chiffre d’affaires réalisé avec Airbus a augmenté de 30 % cette année .
« En réseau ». Mais à terme, la parité du dirham indexée à un panier de devises où prédomine l’euro ne risque-t-elle pas de compromettre cette success story ? « Il faut ouvrir l’œil mais il est encore trop tôt pour avoir des inquiétudes », explique ce dirigeant d’entreprise. « La force du secteur aéronautique marocain est de s’être développé en réseau où clients et fournisseurs se retrouvent côte à côte. Difficile de transférer tout cela en zone dollar ! » Et avec l’implantation régulière de PME françaises, le réseau se renforce un peu plus chaque année.
Libération.fr - Nadia Hachimi Alaoui