Mariages mixtes : Les tracas avant de se dire « oui »

28 février 2007 - 12h59 - Maroc - Ecrit par : L.A

Nadia la Marocaine et Christian le Français veulent se dire « oui ». Les mariages mixtes, il y en a de plus en plus. Et sous tous les cieux. La France passe pour être la « championne européenne » du « mixage matrimonial ». En 1999, 30.000 mariages mixtes- entre français et étrangers- y étaient célébrés. Soit un mariage sur dix.

Les proportions seraient encore plus grandes aujourd’hui. Sans compter les unions entre fils ou fille d’immigrés des deuxième et troisième générations et Français dits « de souche », puisque l’état civil ne mentionne que la nationalité des époux au moment du mariage, les origines ethniques ou religieuses n’apparaissant pas dans les statistiques. Près d’un tiers des étrangers naturalisés français (soit 22 000) ont acquis la nationalité française par le mariage. En l’espace de vingt ans, la proportion des mariages mixtes a doublé. Mondialisation oblige, les populations se mélangent aussi et le Maroc s’inscrit dans la tendance. Les mariages entre Marocains et étrangers seraient donc plus nombreux. Aucune statistique n’existe cependant, les actes de mariages n’étant pas centralisés.

Pour « accélérer » les formalités, Nadia et Christian se rendent au Consulat français de Casablanca. Ils y apprennent, à leur grand malheur, que le consulat n’a pas le droit de célébrer un mariage entre un de ses ressortissants et un ressortissant marocain. Ils devront donc d’abord passer devant les adouls, c’est-à-dire célébrer le mariage selon les formes locales. Pour ce faire, Christian devra d’abord « devenir musulman » avant de remplir toutes les autres formalités de mariage.

La moudawana n’a pas touché à cet aspect du mariage. A très forte connotation religieuse, voire exclusivement religieux, le mariage entre un étranger et une Marocaine (donc musulmane) n’a subi aucune modification. Le sacro-saint principe d’égalité entre sexes, base du nouveau texte, a été occulté dans ce cas de figure. « C’est non pas l’union qui a intéressé le législateur mais la filiation », explique un juriste. Un enfant de musulman naît musulman et hérite automatiquement de son père. A l’ambassade de France à Rabat,on est on ne peut plus clair.

« Le consulat français peut procéder ultérieurement à la transcription du mariage célébré selon les formes locales, mais il ne peut jamais procéder lui-même au mariage lorsque l’un des époux est ressortissant de l’Etat de résidence ». Un Marocain ou une Marocaine souhaitant se marier avec un Français ne peuvent donc le faire au consulat avant d’avoir préalablement contracté un acte adoulaire. « Cette règle est à la fois liée au droit français notamment l’article 170 du code civil qui détermine la capacité des consuls et au droit marocain ».

Le code de la famille marocain promulgué en février 2004 ne prévoit de modification qu’en ce qui concerne les mariages contractés à l’étranger. Ce changement figurait comme une des grandes avancées du texte et la réponse à l’une des plus importantes revendications de la communauté marocaine établie à l’étranger. Le code de la famille prévoit en effet toute une partie consacrée à cette population. Les mariages civils contractés à l’étranger peuvent être transcrits au consulat marocain et donc être « reconnus » par les autorités marocaines. Cette disposition est importante. Mais attention ! Le consulat n’est pas une mairie. « Le consulat n’est pas une mairie, notamment parce qu’il n’est pas sur le territoire français mais sur le territoire marocain », explique-t-on à l’ambassade. C’est la raison pour laquelle les Français ne peuvent y contracter des unions avec des ressortissants marocains. « Les articles 14 et suivants du code de la famille marocain concernent exclusivement la validité des mariages contractés par les MRE dans leur pays de résidence, et non pas le mariage des Marocains résidant au Maroc devant un consul étranger ». Avant de faire accepter à l’autre ses différences religieuses, culturelles ou culinaires, il faudra d’abord lui faire accepter toutes les tracasseries juridiques et administratives. Ce qui n’est déjà pas une mince affaire.

L’Economiste - Amale Daoud

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Racisme - Famille - Mariage

Ces articles devraient vous intéresser :

Violences policières : la France sermonnée par l’ONU

Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, l’organe affilié aux Nations unies, exprimé sa « profonde préoccupation » concernant les pratiques des forces de police en France vis-à-vis des minorités. Cette inquiétude fait suite au décès...

Le mariage qui a sauvé un village

La célébration d’un mariage a sauvé tous les habitants d’un village marocain lors du tremblement de terre meurtrier du 8 septembre, qui a détruit leurs maisons.

Maroc : le mariage fastueux de la fille d’un haut dirigeant soulève des polémiques

Le mariage somptueux organisé par le président de la Chambre des conseillers, Naam Miyara, pour sa fille, soulève de vives polémiques. La quatrième personnalité politique du Maroc après le roi, le chef du gouvernement et le président de la Chambre des...

Haine envers les Marocains : prison ferme prononcée par la justice

Le parquet de Valence spécialisé dans les délits de haine a requis trois ans de détention contre un homme accusé de diffusion d’informations mensongères sur les réseaux sociaux ciblant les musulmans, notamment Marocains.

Un Marocain tabassé par des videurs dans le nord de l’Espagne

Un jeune homme de 23 ans, médiateur culturel d’origine marocaine résidant à la Corogne, dans le nord-ouest de l’Espagne, a porté plainte, affirmant avoir été victime d’une agression racistede la part de deux videurs.

Jamel Debbouze déclare sa flamme à Mélissa Theuriau

Jeudi dernier, la journaliste Mélissa Theuriau a fêté ses 46 ans. L’occasion pour son mari, l’humoriste franco-marocain Jamel Debbouze de lui faire une belle déclaration.

Au Maroc, le mariage des mineures persiste malgré la loi

Le mariage des mineures prend des proportions alarmantes au Maroc. En 2021, 19 000 cas ont été enregistrés, contre 12 000 l’année précédente.

Agression sauvage d’une femme voilée dans un magasin LiDL à Marignane

Le Conseil français du culte musulman (CFCM) réagit à « l’agression raciste et antimusulmane dont a été victime une femme de 42 ans en situation de handicap, portant un voile et récemment affaiblie par un traitement de chimiothérapie. » L’organisation...

La mère d’Achraf Hakimi, gardienne de sa fortune

Le footballeur marocain Achraf Hakimi, qui évolue au Paris Saint-Germain, a révélé que sa mère gérait ses finances depuis ses débuts professionnels, bien avant son mariage.

Ramadan et grossesse : jeûner ou pas, la question se pose

Faut-il jeûner pendant le Ramadan quand on est enceinte ? Cette question taraude l’esprit de nombreuses femmes enceintes à l’approche du mois sacré. Témoignages et éclairages pour mieux appréhender cette question à la fois religieuse et médicale.