Les journalistes qui assistaient au meeting de Lausanne le 5 juillet n’ont pas oublié la conférence de presse d’Hicham el-Guerrouj. Evoquant sa défaite quelques jours plus tôt dans le 1 500 m de Rome, remporté par le Bahreïnien Rachid Ramzi, le recordman (3’26’’00) et triple champion du monde (1997, 1999, 2001) de la distance s’était mis à pleurer. Le Marocain a eu une saison difficile. Il a même failli déclarer forfait pour Athènes en raison de problèmes respiratoires récurrents liés, semble-t-il, à des allergies.
Trois titres glanés dans la presse ces derniers mois situent assez bien les tourments de l’intéressé : « El-Guerrouj s’est fait peur », « Je suis inquiet », « Je suis serein. » Le sera-t-il ce soir au moment de disputer sa troisième finale des JO ? Désigné plusieurs fois athlète de l’année par la Fédération internationale (IAAF), riche, respecté et idolâtré chez lui, El-Guerrouj a eu tous les bonheurs, tous les succès. Sauf un : l’or olympique. C’est sa « malédiction » à lui, pour reprendre le terme de Christine Arron. A quelques jours de ses 30 ans, El-Guerrouj veut vaincre le signe indien.
A Atlanta, rétrospectivement, il se trouvait trop jeune pour pouvoir inquiéter l’Algérien Noureddine Morceli. A Sydney, battu par le Kenyan Ngeny, il n’a pas beaucoup d’excuses, hors la pression de l’événement. Athènes devait marquer l’apothéose d’une carrière déjà bien remplie. Mehdi Baala, l’Alsacien vice-champion du monde de Paris, n’est pas là, éliminé par une entorse de dernière minute. Mais il y a Lagat, le bronze de Sydney qui lui aussi a soif de revanche. Lagat a gagné à Paris Saint-Denis. Pas avec un temps canon mais le Kenyan possède néanmoins le meilleur chrono de la saison (3’29’’21).
Les séries qualificatives n’ont pas prouvé grand-chose. El-Guerrouj a remporté sa demi-finale sans effort et le temps qu’il a réalisé en atteste (3’40’’87). Celle de Lagat, plus rapide, a été dominée par Kaouch (3’35’’69). Après son coup de tonnerre (3’30’’25), Ramzi semble moins en forme. Le Portugais Rui Silva et l’Espagnol Reys seront là, comme à l’habitude. « Pour que quelqu’un me batte à Athènes, il faudra qu’il frôle la mort », pronostiquait le Marocain au printemps. Une telle promesse mérite d’être tenue.
Alain LEAUTHIER - Libération ( France )