Il y a aux fenêtres des draps blancs en signe de deuil. Et au sol des affiches écrites à l’aquarelle noire. Un résumé des mots remâchés depuis dimanche soir : « Que justice se fasse », « Attention quartier en deuil », « Justice et paix pour Mourad ». Deux jours après le décès de Mourad, 17 ans, tué par un gendarme lors d’une course-poursuite sur les routes gardoises, les habitants de Valdegour, la cité de Nîmes où il vivait, ont « les nerfs, la haine et la rage ».
Ils l’ont dit lundi soir, un peu plus bas dans la cité voisine, Pissevin, avec des voitures incendiés, des pierres et une bataille rangée avec les CRS. Mardi au petit matin, ils étaient partagés entre la satisfaction d’avoir eu « quatre condés » (policiers) et l’envie de « donner une autre image du quartier ». « Moi je ne veux pas qu’on casse des voitures », commente un copain de Mourad, « mais on ne dit rien à Chirac quand il paie ses voyages en liquide ».
« C’est pour Mourad. » Au début de l’après-midi, des filles ont pris le bus pour « descendre en ville », un paquet d’affiches sous le bras. Un petit groupe a préparé des cartons à poser chez les buralistes, conviant à une marche samedi. Dans les locaux de l’association Azur (accueil des femmes et des cités), deux petites filles dessinent. Mélissa peint : « c’est pour Mourad, j’en ai fait quatre déjà. »
D’autres circulent avec une boîte « pour Mourad ». Karim, le beau-frère du jeune homme tué, regarde silencieux les filles écrire les affiches : « Ils ont fait un petit génocide, ils en ont tué un et ils en ont blessés 10.000 ». Madani Marzuk, de l’association Espoir, note toutefois une évolution positive -« Nous ne sommes pas des assistés »- et se dit qu’« au moins cette fois, les deux copains de Mourad se sont rendus à la police et ils ont un avocat ». Avant, assure-t-il, ils auraient pris le maquis.
Libération