L’huile d’argan est sortie de la confidentialité pour s’inscrire dans un mouvement de fond en faveur d’une cosmétique plus naturelle." La tendance bio (sans paraben) et la mode de la culture du hammam ont entraîné, depuis deux ans, "une explosion de ce produit sur le marché européen", constate Guy Boulanger, responsable du site Internet Huile-argan.
Preuve du succès de cet onguent, même L’Oréal a créé une gamme de shampoings à base d’huile d’argan. Chez Nature et Découvertes, où les cosmétiques au sigle "beauté du monde" occupent une place de plus en plus importante, la gamme "tradition du Maroc" arrive en tête des ventes. "L’achat d’un soin exotique n’est plus réservé aux cadeaux, mais s’inscrit dans un usage quotidien", explique une responsable de cette chaîne de magasins.
Trois mois après leur lancement, en septembre, les produits Naturelle d’argan sont désormais présents dans deux mille pharmacies. Créée par une femme passionnée par le Maroc, cette petite marque a été rachetée par le groupe de produits cosmétiques et pharmaceutiques Batteur, qui voulait développer une gamme certifiée bio. "La cosmétique bio dépasse largement la cible des fervents de l’écologie", assure Olivier Brancard, directeur marketing du groupe.
Au-delà de son image "naturelle", l’huile d’argan est parée de nombreuses vertus. Sa forte teneur en acides gras essentiels et en vitamine E lui procure des propriétés hydratantes, antivieillissement et de renouvellement cellulaire. Bref, elle vaudrait toutes les crèmes de nuit et autres antirides sophistiqués. "C’est une huile très valable, que l’on redécouvre", se félicite le docteur Cohen-Letessier, membre de la Société française de dermatologie.
Pour bénéficier des bienfaits de cette huile pour le visage, le corps et même les cheveux, il faut qu’elle ait été pressée à froid et qu’elle soit utilisée pure. Mieux vaut donc regarder l’origine et la composition (Argania spinosa) du produit. "Il est difficile d’avoir une garantie de qualité", reconnaît Guy Boulanger, car les modes de fabrication ne sont pas toujours les mêmes et peuvent parfois faire perdre une partie des qualités du produit. L’idéal est que les amandes contenues dans la coque du fruit soient pressées à froid et ne subissent aucune torréfaction. "Si elle a été chauffée, l’huile perd une grande partie de ses propriétés", insiste Mohamed Elstouh, distributeur d’huile d’argan.
Un travail long et difficile
Brute, elle est quasiment inodore, mais il est possible d’ajouter quelques gouttes d’huile essentielle pour la parfumer. Si elle sent la noisette, c’est qu’elle a été torréfiée et qu’il faut mieux l’utiliser pour la cuisine. Si elle a une odeur un peu animale, "spéciale" diront certains, c’est que le fruit n’a pas été cueilli sur l’arbre mais que l’on a ramassé sa coque dans les déjections des chèvres qui se régalent de la pulpe du fruit de l’arganier.
Casser les coques très solides d’arganier pour en extraire les précieuses amandes représente un travail long et difficile. Il faut au total près de seize heures pour fabriquer un litre d’huile d’argan. Terre d’Oc pour Nature et découvertes ou de la Fondation Tamani pour Naturelle d’argan, plusieurs marques et distributeurs promettent que leur collaboration avec des coopératives de femmes berbères contribue à améliorer les conditions de vie et de travail entre Essaouira et Agadir.
Le Monde