Ils sont fous ces Marocains !

29 octobre 2007 - 23h48 - Maroc - Ecrit par : L.A

Insomnie, anxiété, tics nerveux, dépression… peu d’adultes n’en souffrent pas ou n’en ont pas souffert au moins une fois dans leur vie. Une enquête, la première du genre au Maroc, réalisée dernièrement par le service de Santé mentale au sein du ministère de la Santé et l’OMS (Organisation mondiale de la santé) indique que 49% des plus de 15 ans ont eu au moins un trouble mineur récurrent.

Ceux qui ont les moyens -et l’ouverture d’esprit-, s’offrent l’assistance d’un spécialiste, psychiatre ou psychologue privé, ceux qui en ont moins se rabattent sur les antidépresseurs et somnifères dont les noms sont devenus aussi communs que le paracétamol. Quant à ceux à qui les moyens font défaut, le plus courant est de les voir couver ses troubles en comptant sur le temps et l’amélioration de leurs conditions sociales pour les faire disparaître. Plusieurs de ces malaises, même d’apparence tout à fait bénigne, peuvent facilement tourner à la maladie grave. Mais avant d’inciter les gens à recourir à la médecine pour soigner ces malaises, il faut d’abord les convaincre que s’en est une. « Les troubles mentaux sont des maladies comme d’autres qui se traitent et peuvent souvent être guéris », ne cesse de clamer le docteur Fatima Assouab, chef du service de la Santé mentale. « Or, aujourd’hui, ils sont considérés par la personne qui en souffre et par sa famille comme une honte à garder dans le secret total », ajoute-t-elle.

Mais, cerise sur le gâteau, le système de la santé publique, se cachant derrière les croyances populaires, ne semble pas adhérer à cet état d’esprit. Les soins qu’il offre et l’infrastructure qu’il prévoit au secteur existent presque pour la forme. Il y eut même un temps

le public compte 17 psychologue

où des responsables « soucieux de l’économie des dépenses et de la réorganisation administrative ont eu la brillante idée de tout simplement supprimer le service de Santé mentale et des maladies dégénératives de la structure du ministère… Heureusement, le service, instauré par Dahir royal, était intouchable. Mais cela est très révélateur de l’intérêt porté à cette spécialité.

La situation sur le terrain est encore plus éloquente : le public compte 17 psychologues (non, nous n’avons pas oublié un zéro) et 104 psychiatres pour tout le Royaume. Ce qui, naturellement, ne peut suffire à encadrer 30 millions d’habitants.

D’ailleurs ces quelques praticiens sont répartis sur 28 provinces et préfectures. Ce qui en laisse 40 non couvertes. En outre, deux régions : Oued Eddahab-Lagouira et Guelmim-Smara ne comptent aucun spécialiste.

La responsabilité revient ici entièrement au ministère de Santé et à sa politique de recrutement. Car la formation ne pose pas jusque-là problème en termes de nombre de lauréats puisque quelque 500 psychiatres sortent des facultés de médecine marocaines chaque an mais les quotas de leurs recrutements dans le public sont très faibles. La formation pose plutôt un problème de spécialisation puisqu’elle n’octroie aucune formation en pédopsychiatrie par exemple.

Pour compléter le sombre tableau, les capacités d’accueil au sein des structures psychiatriques sont dérisoires. Moins de 1.990 lits sont décomptés au niveau national. Ils sont répartis sur les centres hospitaliers de Rabat, Casablanca et Marrakech, les hôpitaux psychiatriques, 5 au total à Berrechid, Tit Mellil, Oujda, Tétouan et Tanger et les services intégrés des hôpitaux généraux.

L’investissement privé, quant à lui, boude complètement le secteur de la Santé mentale. Les cliniques psychiatriques privées sont inexistantes au Maroc. Mais, selon plusieurs sources, les malades aisés se font hospitaliser en clinique sans jamais déclarer que le motif est d’ordre psychiatrique et un grand nombre de consultations se fait de manière officieuse.

Cela prouve aussi que les réticences culturelles au traitement freinent aussi le développement du secteur. D’ailleurs, la faible infrastructure dont dispose le Maroc est sous exploitée puisque le taux de rotation sur les lits psychiatriques est en dessous des capacités offertes.

L’Economiste - Ichrak Moubsit

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Yasmina Baddou - Santé - Ministère de la Santé

Ces articles devraient vous intéresser :

Une maladie menace les enfants marocains

La propagation de la maladie de leishmaniose dans plusieurs provinces marocaines préoccupe le Parlement. Une députée a interpellé le ministre de la Santé et de la Protection sociale Khalid Ait Taleb sur ce sujet.

Chèque de garantie : ce scandale marocain

La conseillère parlementaire du parti de l’Union Nationale du Travail au Maroc (UNTM), Loubna Alaoui, a adressé une question orale au gouvernement sur la persistance de certaines pratiques illégales dans les cliniques privées, notamment l’exigence d’un...

Le Maroc ouvre ses portes aux médecins étrangers

Des médecins étrangers pourront bientôt exercer au Maroc. C’est ce que vient de confirmer le ministre de la Santé Khaled Ait Taleb.

Bilal Ould-Chikh : « j’apprends que j’ai une tumeur de 5cm dans la moelle »

L’attaquant Bilal Ould-Chikh, 27 ans, est de retour sur les terrains après avoir surmonté une tumeur bénigne à la moelle épinière, diagnostiquée en mars dernier. Le joueur du FC Volendam (D2 néerlandaise) revient sur cette épreuve avec une philosophie...

Intoxications alimentaires : le Maroc à l’épreuve de la restauration rapide

La députée Hanane Atarguine, du groupe parlementaire du Parti authenticité et modernité (PAM), a demandé au ministre de l’Intérieur de prendre des mesures pour renforcer les contrôles dans les restaurants et établissements de restauration rapide afin...

Phosphate et cadmium : le Maroc répond aux accusations de M6

Les accusations selon lesquelles les engrais phosphatés marocains sont « naturellement très chargés en cadmium » s’avèrent fausses.

Des olives marocaines dangereuses pour la santé saisies en France

Un grossiste de Seine-Saint-Denis est au cœur d’une affaire d’importation d’olives impropres à la consommation. Fin septembre, les douanes françaises ont saisi près de 30 tonnes d’olives en saumure en provenance du Maroc. Ces dernières contenaient un...

Maroc : bientôt une taxe de 50 dirhams sur les cigarettes jetables

Mauvaise nouvelle pour les vapoteurs marocains ! Alors que le prix du tabac restera stable en 2025, le gouvernement prévoit de s’attaquer au porte-monnaie des adeptes de la cigarette électronique.

Variole du singe : le Maroc en état d’alerte

Face à la recrudescence de cas de variole du singe en Afrique, le ministère marocain de la Santé a renforcé son dispositif de surveillance et de riposte. Cette décision fait suite à la classification par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) du...

Pénurie de médecins au Maroc : Le système de santé à bout de souffle

La pénurie de médecins persiste au Maroc. Par ailleurs, la réduction de la durée de formation en médecine suscite actuellement une vive protestation de la part des étudiants.