Alors que le Maroc subit actuellement sa sixième année de sécheresse consécutive, le gouvernement envisage de prendre des décisions radicales pour rationaliser l’eau potable.
La terre est rêche sur ces étendues plissées de vent et de soleil. De chaque côté de la bande de bitume qui mène de Ouarzazate, au sud-est du Maroc, à El-Kalaâ M’Gouna, par la vallée du Dadès, les chemins s’en vont, se croisent, et se perdent vers les montagnes du Haut Atlas ou vers les chaînes du djebel Sarhro.
Des pierres, rien que des pierres, on dirait le désert, et c’est déjà le désert. Parfois une oasis, comme celle de Skoura, où d’incroyables casbahs ressemblent à d’immenses châteaux de sable que le temps aurait délabrés.
La route file de nouveau, un trait noir au milieu d’une palette d’ocres intenses. Soudain une couleur plus légère, presque transparente, celle de la Rosa damaskina : c’est le printemps, et un panneau signale l’entrée dans la vallée des Roses, un monde à part.
Ici, la plus petite parcelle autour des maisons est plantée de rosiers bas. Toute cette vallée vit de la récolte des pétales. Séchés, ils sont transformés en une multitude de produits divers, variés, mais toujours dans la même tonalité.
C’est ainsi qu’à El-Kalaâ M’Gouna une kyrielle d’échoppes, portes ouvertes sur la rue, propose savons en forme de cœur, crèmes, huiles, shampooings ou bouteilles d’eau évidemment de rose... Au mois de mai, les 8, 9 et 10 cette année, la petite ville célèbre sa dernière récolte, fait la fête : trois jours de musiques et de danses traditionnelles, et d’odeurs qui enivrent.
D’El-Kalaâ M’Gouna, il faut prendre la route vers les contreforts de l’oued M’Goun. Très vite elle devient piste et poussière, traverse le village d’Ifrar, où l’argile est d’un vif rouge, et parvient enfin sur un long plateau où s’éparpillent quelques troupeaux.
L’été, quand le soleil brille trop sur le désert de sable, les nomades viennent se réfugier dans les grottes de cette montagne. Plus loin encore, au sommet du col de Talouit (2 080 m) apparaît en contrebas la vallée cachée du M’Goun, ondulation de verdure et de fraîcheur.
Alors des lacets serrés, entre des rochers qui descendent en cascade, emportent au fond du canyon jusqu’à Bou Thrarar, un village paisible comme sorti d’une carte postale d’un Maroc qui n’aurait pas changé : maisons de guingois en pisé, ruelles royaume des enfants, et au bord de l’eau des oliviers, des grenadiers, des pommiers et le chant des oiseaux.
Il suffit pourtant, dès la sortie de Bou Thrarar, de traverser un oued à sec pour retrouver le bitume, les voitures, les camions qui klaxonnent et une ville, Boumaine du Dadès. Encore quelques kilomètres et ce sera de nouveau El-Kalaâ M’Gouna, ses terrasses de café au soleil et ses roses.
Bruno Caussé pour le Journal Le Monde
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