Discours du Roi Mohammed VI le 20 août 2011

20 août 2011 - 23h01 - 2011 - Ecrit par : L.A

Voici le texte intégral du discours à la Nation du Roi Mohammed VI, à l’occasion du 58ème anniversaire de la Révolution du Roi et du peuple fêté samedi 20 août 2011.

"Louange à Dieu.

Paix et Salut sur le Prophète, Sa Famille et Ses Compagnons.

Cher peuple,

La commémoration, aujourd’hui, du cinquante-huitième anniversaire de la Révolution du Roi et du peuple se distingue par le fait qu’elle intervient dans le contexte de la Constitution avancée que tu as approuvée, et qui ouvre des perspectives démocratiques prometteuses pour le parachèvement de l’édification d’un Etat moderne de droit et des institutions.

Cette constitution pose, de surcroît, les fondements d’une régionalisation élargie, à la faveur d’une mutation historique visant à assurer la modernisation et la rationalisation des structures de l’Etat. Cet objectif passe par l’adoption de réformes substantielles axées sur une bonne gouvernance territoriale et vouées à la promotion du développement intégré. Ces réformes visent également à assurer la consolidation de la justice sociale et à garantir à tous les Marocains les attributs d’une citoyenneté digne.

Notre atout majeur, pour y parvenir, réside dans le dynamisme créatif de notre jeunesse dont nous célébrons aujourd’hui la fête. C’est une jeunesse qualifiée, digne de continuer à porter le flambeau de la glorieuse épopée du Vingt Août, dans le cadre d’un processus proprement marocain, caractérisé par l’implication des jeunes dans les efforts visant à en relever les défis. Ces efforts, nous les déployons en parfaite communion entre toi, cher peuple, et ton Premier Serviteur, illustrant de nouveau l’esprit immuable de la Révolution du Roi et du peuple.

Ceci nous porte à considérer la mise en œuvre optimale de la nouvelle Constitution comme le point de départ d’un processus d’action politique visant à promouvoir le développement dans un climat de respect collectif de la loi, de mobilisation et de confiance. C’est là un préalable incontournable pour dynamiser l’économie, stimuler l’investissement productif et garantir les conditions d’une vie digne à l’ensemble de Nos citoyens, surtout les démunis parmi eux.

C’est là, donc, le grand défi qu’il incombe à tous de relever par des efforts intensifiés, et au moyen d’institutions agissant comme une force d’impulsion de la démocratie et un puissant levier de développement.

Le véritable pari qu’il nous faut gagner dans la phase politique actuelle ne consiste pas à considérer les prochaines élections comme une simple compétition, certes légitime, entre partis pour remporter le plus grand nombre de sièges. C’est plutôt une occasion pour hisser cette compétition au niveau d’un combat national qualitatif autour de la sélection des meilleurs programmes et du choix des élites qualifiées. Il s’agit, en effet, d’entamer judicieusement la mise en œuvre de la Constitution et d’imprimer une forte impulsion à la mutation politique déterminante que connaît notre pays.

Pour consolider le climat de confiance en vue des prochaines élections, il ne s’agit pas uniquement de rechercher un consensus sur les moyens d’en assurer une bonne préparation. Il faudra, avant tout, que l’ensemble des acteurs politiques fassent preuve de clarté dans les positions proclamant leur engagement à renforcer la crédibilité de ces échéances et à récuser les préjugés sur leur issue, bien avant leur déroulement. Il leur appartient aussi de rompre avec la suspicion politicienne à l’égard de ces élections, car une telle attitude ne peut que servir les ennemis de la démocratie, les défaitistes et autres nihilistes.

Tout le monde -gouvernement, parlement, partis, citoyens, acteurs associatifs et médias- se trouve, de ce fait, face à un véritable test imposant à chacun de prendre ses responsabilités historiques et de placer les intérêts supérieurs de la Nation au-dessus de toute autre considération.

A cet égard, les autorités gouvernementales et judiciaires concernées par l’organisation des élections, doivent agir dans le respect scrupuleux de la loi, mettre en œuvre les dispositifs de moralisation de la vie politique et parlementaire, et créer les conditions d’une compétition électorale libre. Elles se doivent également de veiller à l’égalité de traitement entre les différents partis politiques et d’observer une neutralité positive.

Il leur incombe aussi de s’opposer avec fermeté à toutes les irrégularités et de lutter contre l’usage de l’argent et l’achat des voix visant à pervertir les élections. Elles doivent également sévir contre l’abus de pouvoir et l’instrumentalisation tendancieuse de la religion et des sacralités dans les batailles électorales à venir.

Certes, l’action partisane et les campagnes électorales nécessitent un financement transparent et équitable. La loi en fixe les règles et punit tout manquement y afférent. Cependant, quelles que soient la qualité des lois et la fermeté des autorités, le rôle assigné par la Constitution aux partis demeure crucial pour assurer la crédibilité des élections et préserver l’inviolabilité des institutions.

Partant, les partis sont appelés à rivaliser d’ardeur pour l’élaboration de programmes électoraux novateurs et réalistes, à même de répondre aux préoccupations réelles des citoyens. Ils se doivent également d’accréditer des candidats compétents et aptes à assumer des responsabilités au niveau des pouvoirs législatif et exécutif, au sein de la majorité comme dans l’opposition.

Il importe aussi que les partis donnent leur chance aux jeunes et aux femmes pour favoriser l’émergence d’élites qualifiées, à même d’apporter du sang neuf à la vie politique et aux institutions constitutionnelles.

A cet égard, Nous considérons qu’à la faveur des larges prérogatives que confère la démocratie territoriale aux conseils qui en sont issus, l’action politique, en tant que culture et pratique, est en passe de connaître une transformation substantielle lui permettant de transcender le concept étroit qui la réduit à une simple quête de postes gouvernementaux ou de sièges parlementaires.

En effet, l’action politique va s’ouvrir sur de vastes perspectives impliquant des milliers de mandats électifs à exercer au sein des conseils régionaux, provinciaux et locaux, qui sont autant d’institutions clés pour qualifier des élites dignes d’assurer la gestion des affaires publiques.

Les nobles objectifs inhérents à l’engagement politique ne seront pleinement atteints que lorsque la classe politique, au lieu de se focaliser sur des postes à engranger au niveau central, s’intéressera davantage au mandat électif, local ou régional, vu que celui-ci permet d’être au plus près des préoccupations légitimes et des besoins fondamentaux du citoyen.

Quant au citoyen-électeur, qui par son vote librement émis, contribue à l’expression de la volonté populaire, Je lui dis ceci : En participant au scrutin, tu ne fais pas qu’exercer un droit personnel, mais tu donnes mandat à la personne que tu élis, pour te représenter dans la gestion de la chose publique.

Tu dois donc avoir conscience de la portée considérable du devoir inhérent au suffrage -qui ne saurait faire l’objet d’aucun marchandage- et t’en remettre à ta conscience patriotique, pour choisir des programmes réalistes et des candidats qualifiés et intègres.

Au citoyen-candidat, Je dis : il est temps de rompre définitivement avec les pratiques électoralistes scandaleuses qui ont porté préjudice à la crédibilité des assemblées élues, et entaché la noblesse de l’action politique.

Il appartient donc à toute personne qui envisage de faire acte de candidature aux prochaines élections de garder à l’esprit la corrélation, consacrée par la Constitution, entre l’exercice du pouvoir et la reddition des comptes.

Eu égard à la place que la Constitution leur réserve, dans l’ancrage des valeurs de citoyenneté responsable, la société civile et les médias sont tenus d’assumer efficacement leur rôle en matière d’observation légale, indépendante et neutre de la régularité des opérations électorales.

Cher peuple,

La modernisation et la démocratisation des structures de l’Etat apparaissent clairement à travers la répartition, par la nouvelle Constitution, des pouvoirs centraux. Elles se manifestent, avec encore plus de force, dans le projet de régionalisation avancée qui est fondée sur le transfert du centre vers les régions de prérogatives et des moyens y afférents, sur la base des principes de la démocratie territoriale et de la bonne gouvernance.

Il s’agit là d’une démarche propre à favoriser un développement régional solidaire, équilibré et intégré, qui met définitivement fin à l’allégation colonialiste d’un prétendu Maroc utile, et un Maroc inutile, et qui en finit avec les disparités territoriales.

Pour consolider les piliers du grand chantier structurant de la régionalisation avancée, que nous considérons comme une nouvelle révolution du Roi et du peuple, il faudra donner la priorité à l’élaboration de la loi organique y afférente, du fait du lien existant entre celle-ci et l’élection des conseils régionaux, ainsi que les échéances et les mesures à prendre pour la mise en place de la deuxième Chambre du parlement.

Par ailleurs, il faudra accélérer le processus d’opérationnalisation du Fonds de mise à niveau sociale et du Fonds de solidarité interrégionale, de manière à renforcer les programmes de l’INDH visant à combattre la pauvreté, la marginalisation et l’exclusion sociale, par le biais de projets et d’activités générateurs de revenu et d’emplois, surtout pour les jeunes.

En effet, la jeunesse marocaine, consciente et responsable, se trouve aujourd’hui au cœur du projet de modernisation constitutionnelle et politique, au regard des droits et devoirs que prévoit la Constitution, ainsi que des instances de citoyenneté agissante qu’elle préconise pour renforcer l’adhésion des jeunes aux différentes réformes démocratiques et aux divers chantiers de développement.

Nous réservons une sollicitude particulière à tout Notre peuple, aussi bien nos citoyens vivant au sein de la patrie que ceux résidant à l’étranger. A ceux-ci, Nous réitérons Notre hommage pour leur attachement à leur identité nationale, et leur volonté de garder et d’entretenir les liens avec leurs proches et leur pays, en s’y rendant de plus en plus nombreux, en veillant à son développement et son essor et en ayant à cœur de défendre ses justes causes.

A cet égard, Nous sommes attaché à la mise en œuvre optimale des dispositions de la nouvelle loi fondamentale qui, pour la première fois, leur garantit constitutionnellement la jouissance de tous les droits de citoyenneté, ainsi que la protection de leurs intérêts dans les pays de résidence, et la participation la plus large possible aux institutions nationales et à la gestion des affaires publiques.

Cher peuple,

Notre commémoration de la Révolution du Roi et du peuple coïncide avec la dernière décade du mois béni de Ramadan où les cœurs de notre peuple sont comblés de félicités divines. C’est un moment fort qui commande de s’incliner devant la mémoire des héros de la liberté, de l’indépendance et de l’unité, notamment et au premier chef, Nos Grand - Père et Père, feus Leurs Majestés les Rois Mohammed V et Hassan II - que Dieu bénisse leur âme dans leur dernière demeure.

Nous réaffirmons également le pacte commun qui Nous unit à toi, cher peuple, et par lequel nous nous engageons à continuer à porter le flambeau de la révolution renouvelée du Roi et du peuple. Nous puisons en elle et dans l’esprit de l’heureuse fête de la jeunesse, les exemples de la communion symbiotique et les valeurs de sacrifice, de résistance et de persévérance.

Nous nous en inspirons pour œuvrer inlassablement afin de renforcer, dans ce contexte régional et international délicat, la position de notre pays qui s’affirme comme modèle de développement démocratique serein et de progrès constant, dans l’unité et la solidarité, la confiance et l’espérance, la quiétude et la stabilité.

Wassalamou alaîkoum wa rahmatoullahi wa barakatouh."

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