Saleh, 50 ans, figure parmi les bénéficiaires du programme Moussalaha. Accusé de terrorisme, il est en prison depuis 19 ans et espère être bientôt libéré. Cet ancien radicalisé avait une autre perception de la religion musulmane. « Je croyais que les musulmans avaient le devoir de combattre les dirigeants oppresseurs qui n’appliquent pas la loi islamique et d’attaquer les États qui combattent les musulmans », a-t-il déclaré à l’AFP dans la bibliothèque de la prison de Kénitra.
À lire : Maroc : un terroriste repenti pour "déradicaliser" les jeunes (vidéo)
Saleh s’est radicalisé en Italie dans les années 1990 après avoir fait la connaissance d’un imam dans une mosquée de Turin qui appartenait à la Jamaa Islamiya, le groupe djihadiste égyptien qui a assassiné le président Anwar Sadate en 1981. Par la suite, il s’est installé avec sa famille en Afghanistan sous le régime taliban. Mais les attentats du 11 septembre aux États-Unis l’ont contraint à changer ses plans. À l’époque, les États-Unis menaçaient de renverser les talibans, ce qu’ils avaient réussi. Saleh s’enfuit alors au Maroc où il a été arrêté. Il assure n’avoir pas de sang sur les mains, mais il est incarcéré depuis 19 ans.
Mohamed Damir, 47 ans, un autre bénéficiaire du programme, a retrouvé la liberté en 2017. En 2003, il avait été condamné à mort. En 2011, sa peine a été commuée en 30 ans de prison. Une partie de sa rééducation a consisté à lire les œuvres des philosophes Jean-Jacques Rousseau et Voltaire, dont certaines idées « ne sont pas loin de l’esprit de l’Islam ». « J’ai découvert le concept du contrat social, qui permet à chacun de vivre en paix, car nous sommes évidemment tous différents », a-t-il déclaré. Selon lui, de nombreuses personnes radicalisées « ne réalisent qu’elles doivent abandonner leurs idées extrémistes qu’une fois qu’elles se retrouvent seules » dans une cellule de prison.
À lire : Vidéo : comment déradicaliser les jeunes ?
Depuis sa sortie de prison, Mohamed participe à l’animation d’une association d’érudits islamiques dans la ville de Mohammedia qui supervise l’aspect religieux de Moussalaha. Son travail consiste à guider les détenus tout au long du programme. « Ce n’est pas toujours facile. […] La plupart d’entre eux ne connaissent pas grand-chose à la religion islamique », a-t-il déclaré, ajoutant qu’il utilise des textes religieux pour changer leur point de vue. « J’essaie de les persuader qu’ils ne gagneront pas la faveur de Dieu en suivant le chemin (de la violence) », ajoute cet ex-détenu.