Corruption, malheur aux dénonciateurs !

20 février 2008 - 01h54 - Maroc - Ecrit par : L.A

Si vous dénoncez un acte de corruption, c’est à vos risques et périls ! Car la loi ne vous protège pas. Et les multiples rappels à l’ordre de Transparency Maroc n’y ont rien changé. Avec la publication de la convention de New York de 2003 au BO, l’absence d’une protection légale des témoins et victimes de corruption se fait encore plus ressentir.

Selon ladite convention, chaque Etat signataire doit envisager dans son système juridique interne des mesures appropriées pour assurer la protection contre tout « traitement injustifié de toute personne qui signale (…) un acte de corruption ou de blanchiment d’argent ». En clair, l’Etat doit protéger les victimes et témoins lorsqu’ils décident de dénoncer une corruption.

La loi marocaine n’évoque pas non plus les recours en réparation des préjudices en cas de corruption. Pourtant, la convention de New York prévoit ce type de recours dans son article 35.

« L’absence de ces dispositions pose un énorme problème à la lutte contre ce fléau au Maroc. Nous sommes convaincus à Transparency que les pouvoirs publics doivent mettre sur pied un cadre juridique pour protéger les témoins et les victimes de la corruption », s’indigne Azzedine Akesbi. Le secrétaire général de Transparency Maroc cite volontiers l’exemple des avocats de Tétouan. Ces derniers ont été radiés du barreau pour avoir dénoncé la corruption à la cour d’appel de la même ville. « Les cadres des administrations et des entreprises publiques détiennent des informations précises et précieuses concernant les actes de corruption. Mais ils ne peuvent pas les communiquer par peur d’être pénalisés par rapport à leur évolution de carrière », souligne Akesbi.

La protection des témoins et des victimes n’est pas la seule disposition qui pèche par son absence. La conséquence des actes de corruption est également inexistante. La convention ne vise pas la répression des éventuels corrompus ou corrupteurs (qui fonde la législation contre la corruption), mais « l’annulation ou la rescision d’un contrat, le retrait d’une concession ou de tout autre acte juridique analogue qui intervient suite à un acte de corruption ».

Pour Akesbi, « l’Etat doit activer davantage les organismes de contrôle tels que l’Inspection générale des Finances afin de pouvoir suivre l’évolution des actes publics et en contrôler les conséquences ». Le secrétaire général de TI évoque également l’activation de la circulaire relative à l’audit des marchés publics dont le chiffre d’affaires dépasse 5 millions de DH.

Amputés donc de plusieurs dispositions jugées indispensables, le dispositif anticorruption marocain ne serait-il pas un géant aux pieds d’argile ?

Source : L’Economiste - N. Be.

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Droits et Justice - Corruption - Lois - Transparency Maroc

Ces articles devraient vous intéresser :

L’affaire "Escobar du désert" : les dessous du détournement d’une villa

L’affaire « Escobar du désert » continue de livrer ses secrets. L’enquête en cours a révélé que Saïd Naciri, président du club sportif Wydad, et Abdenbi Bioui, président de la région de l’Oriental, en détention pour leurs liens présumés avec le...

Au Maroc, le mariage des mineures persiste malgré la loi

Le mariage des mineures prend des proportions alarmantes au Maroc. En 2021, 19 000 cas ont été enregistrés, contre 12 000 l’année précédente.

Sentiment d’insécurité au Maroc : un écart avec les statistiques officielles ?

Au Maroc, la criminalité sous toutes ses formes est maitrisée, assure le ministère de l’Intérieur dans un récent rapport.

Des Marocains célèbrent la fin des accords de pêche avec l’Europe

Sur Facebook, de nombreux internautes marocains et des spécialistes des relations maroco-européennes affichent leur satisfaction après la décision de la Cour de justice annulant les accords de pêche entre l’Union européenne (UE) et le Maroc.

Maroc : la liste des députés poursuivis pour corruption s’allonge

Trois députés marocains viennent d’être déférés devant la justice pour corruption. Déjà une vingtaine de parlementaires sont poursuivis en justice pour des faits de corruption et dilapidation des deniers publics.

Prison : le Maroc explore les « jour-amendes »

L’introduction du système de jour-amende dans le cadre des peines alternatives pourrait devenir une réalité au Maroc. Une loi devrait être bientôt votée dans ce sens.

Corruption au Maroc : les chiffres qui révèlent l’étendue des dégâts

Une étude de l’Instance Nationale de la Probité, de la Prévention et de la Lutte contre la Corruption (INPPLC) dresse un état des lieux préoccupant de la corruption au Maroc.

Maroc : les fraudeurs fiscaux bientôt devant la justice

Au Maroc, les fraudeurs fiscaux présumés vont répondre de leurs actes. Les contrôleurs de l’administration fiscale ont transmis leurs dossiers à la justice aux fins de poursuite.

Les cafés et restaurants menacés de poursuites judiciaires

Face au refus de nombreux propriétaires de cafés et restaurants de payer les droits d’auteur pour l’exploitation d’œuvres littéraires et artistiques, l’association professionnelle entend saisir la justice.

Hassan Iquioussen vs Gérald Darmanin : la justice se prononce aujourd’hui

Le tribunal administratif de Paris examine l’arrêté d’expulsion de Hassan Iquioussen, pris par le ministère de l’Intérieur, Gérald Darmanin, en juillet 2022. Cette audience déterminante permettra de statuer sur la possibilité de l’imam de revenir en...